DOSSIER - Bonnes pratiques phyto

Effluents après traitement : dix-sept procédés reconnus

MARIANNE DECOIN* - Phytoma - n°693 - avril 2016 - page 38

Ces outils des bonnes pratiques que sont les procédés de traitement des effluents des traitements phytosanitaires officiellement reconnus ont vu leur gamme s'enrichir. Catalogue.
1. Nouveau modèle de Phytobac, agréé Bayer, proposé par Axe Environnement.  Photo : Axe Environnement

1. Nouveau modèle de Phytobac, agréé Bayer, proposé par Axe Environnement. Photo : Axe Environnement

2. Ecobang, un des dix procédés « séparateurs ». Adivalor collecte les reliquats de ce procédé avec les PPNU (produits phyto non utilisables).  Photo : Vento Sol

2. Ecobang, un des dix procédés « séparateurs ». Adivalor collecte les reliquats de ce procédé avec les PPNU (produits phyto non utilisables). Photo : Vento Sol

3. Gros plan sur le système de ventilation d'un dispositif Ecobang sur GRV.  Photo : Vento Soll

3. Gros plan sur le système de ventilation d'un dispositif Ecobang sur GRV. Photo : Vento Soll

Tableaux 1 : Les 17 procédés officiellement reconnus, leurs champs de reconnaissance. Point au 30 mars 2016

Tableaux 1 : Les 17 procédés officiellement reconnus, leurs champs de reconnaissance. Point au 30 mars 2016

La liste des procédés de traitement des effluents phyto-sanitaires officiellement reconnus efficaces s'est enrichie d'un dix-septième procédé... qui porte un nom déjà connu. Faisons le point sans attendre la publication de la liste réactualisée au BO (Bulletin officiel) du ministère concerné.

Rappel sur dix ans

Huit procédés reconnus en 2007

Nos lecteurs s'en souviennent, les agriculteurs peuvent, de par l'arrêté de septembre 2006(1), traiter les effluents phytosanitaires générés sur leur exploitation au lieu de les envoyer à traiter en centre agréé. Mais ils ne peuvent rien rejeter dans le milieu si leur procédé de traitement des effluents n'a pas été officiellement reconnu efficace par le ministère de l'Environnement.

Une liste des procédés de traitement des effluents phytosanitaires reconnus efficaces a été publiée en février 2007, forte de huit procédés différents(2).

Seize procédés reconnus en 2014 et 2015

Depuis lors, elle est périodiquement révisée et enrichie. Ainsi, il y a deux ans(3), nous l'annoncions forte de seize procédés.

Reconnaissances en 2015

En 2015, Emeraude prend le numéro de BF Bulles et élargit son champ

La dernière liste disponible a été publiée le 10 novembre 2015 au BO de ce ministère, appelé à l'époque le MEDDE(4) et depuis février 2016 le MEEM(5).

Elle officialisait le changement de nom du procédé enregistré sous le numéro PT 06 001. Nommé auparavant BF Bulles, il s'appelle désormais Emeraude et est proposé par la société Jade.

L'avis ministériel lui reconnaissait son efficacité pour le traitement de post-récolte des bananes, en plus de ses champs de reconnaissance précédents en viticulture, arboriculture fruitière et traitement de post-récolte des pommes(6).

Ce procédé s'est vu également attribuer un autre champ supplémentaire, mais non agricole celui-là : le traitement des effluents en ZNA, zones non agricoles.

De plus, il est nommément autorisé pour traiter les effluents de traitement des cultures de bananes, et pas seulement ceux des traitements de post-récolte.

Renouvellements par ailleurs

Le même avis renouvelait leurs reconnaissances à ceux des procédés qui arrivaient en fin de validité.

Celle-ci est en effet de cinq ans, renouvelable après vérification. On restait donc à seize procédés comme en 2014.

En 2016, reconnaissance d'un procédé de plus

Nouveau BF Bulles avec nouveau numéro et champ élargi

Et puis ce printemps, la société Axe Environnement a reçu une reconnaissance pour un dix-septième procédé nommé... BF Bulles ! Mais ce nom de marque est désormais estampillé du numéro PT 15 001.

Ce procédé ressemble beaucoup dans son principe à celui désormais nommé Emeraude. Tous deux sont des « séparateurs » (voir Encadré 1).

Quoi qu'il en soit, le nouveau BF Bulles est officiellement reconnu pour traiter les effluents de la viticulture et de l'arboriculture, mais aussi des grandes cultures. Cette dernière reconnaissance inclut les effluents du traitement des semences.

Ainsi, même s'ils se ressemblent beaucoup, ces deux procédés ne sont pas reconnus tout à fait, disons, sur le même territoire.

À noter : chacune des deux sociétés annonce de son côté avoir fait des améliorations par rapport au BF Bulles initial.

Élargissement pour Carola Epumobil

Une autre nouveauté concerne Carola Epumobil, désormais de la société Aubepure (auparavant de Résolution).

Reconnu à l'origine seulement en viticulture, puis l'an dernier en arboriculture et post-récolte des pommes et bananes, il l'est désormais également en grandes cultures. Cette catégorie inclut les légumes de plein champ.

Quoi de neuf côté Phytobac ?

Un nouveau partenaire

Concernant les procédés dont les champs de reconnaissance ne changent pas, des innovations sont à noter.

C'est le cas pour le Phytobac, marque déposée de Bayer. On se souvient que c'est un procédé de biodégradation sur substrat solide, et que ce dernier est un mélange de terre, idéalement prise sur l'exploitation donc naturellement porteuse de bactéries adaptées, et de paille dont le rôle est de stimuler l'activité de ces bactéries.

Bayer vient d'agréer une nouvelle entreprise au plan national pour commercialiser des Phytobacs reconnus. C'est Axe Environnement, déjà cité plus haut dans cet article comme détenteur du BF Bulles, et par ailleurs distributeur exclusif de l'Osmofilm (1 500 unités vendues à ce jour) mis au point sous l'égide de BASF.

Le contenant de ce nouveau Phytobac est une citerne PEHD (polyéthylène haute densité) à double paroi, à laquelle peut être accolée une citerne de stockage des effluents (photo 1).

Le dispositif comprend un système de pompe et d'arrosage permettant de maintenir le substrat assez humide (pour que les bactéries restent actives sans s'enkyster) sans le noyer (ce qui serait fatal aux bactéries).

Les dispositifs reconnus par Bayer ont en général, d'une façon ou d'une autre, un système de régulation de l'humidité du substrat qui optimise leur fonctionnement.

Ainsi, Axe Environnement s'ajoute à Biotisa (filiale de CAPL) et Hermex, agréés au plan national depuis plusieurs années, ainsi qu'à VitaConsult, Cerana Edart et Natur'Appro, agréés dans leurs régions respectives, comme partenaires Phytobac.

Pour un développement continu

Ajoutons que ce type de dispositif peut être autoconstruit ou construit localement, mais toujours sous l'égide d'un expert Phytobac agréé Bayer.

Faute de quoi, il s'agira de lits biologiques sauvages à épuration non garantie, dont l'absence de fuite n'est pas davantage garantie et dont toutes vidanges seront interdites ! De fait, les Phytobacs agréés continuent à se développer. Fin 2015, Bayer avait recensé 4 200 dispositifs installés, dûment reconnus et suivis par 590 experts Phytobac formés (en 2013, selon notre n° 673 d'avril 2014, il y avait 3 500 Phytobacs agréés installés via 520 experts formés).

Quant à savoir combien de lits biologiques sauvages existent dans la campagne... Bien malin qui les recensera.

Ecobang et ses contenants

Rappel sur ce procédé

Un autre événement concerne Ecobang, de la société Vento-Sol, procédé séparateur, précisément évaporateur/déshydrateur, reconnu depuis juin 2013. Nous l'avions présenté il y a deux ans.

L'effluent est introduit soit dans un GRV (grand réservoir vrac) de 1 000 litres (photo 3), soit dans une caisse palette de 600 à 1 400 litres équipée d'une sache spécifique imperméable à tout produit phyto. L'évaporation de l'eau est stimulée par ventilation forcée à température ambiante. Le résidu à traiter en DD est, soit le GRV lui-même qui peut être gardé sur plusieurs campagnes, soit la sache à changer en fin de campagne, donc tous les ans. Des sacs spécifiques sont fournis pour permettre d'y insérer les saches chargées de reliquats en attendant leur collecte pour destruction.

Convention avec Adivalor

Concernant cette collecte, Vento-Sol et Adivalor ont signé en mars dernier une convention : Adivalor récupérera les déchets d'Ecobang auprès des distributeurs de produits phytosanitaires à l'occasion des collectes de PPNU (produits phytosanitaires non utilisables).

En effet, les deux types de déchets sont à traiter comme des DD dans les mêmes centres agréés.

Avec les saches Osmofilm et les bâches Héliosec, ce sont donc les résidus de trois procédés séparateurs/déshydrateurs dont la collecte est désormais organisée au plan national via Adivalor.

(1) Arrêté du 12 septembre 2006, au JORF du 21 septembre 2006. (2) Liste publiée au BO du 28 février 2007. Voir aussi « Gérer les effluents à la ferme », Phytoma n° 602, mars 2007, p. 30 à 33. (3) Voir « Traitement des effluents phyto, un seizième procédé et quelques nouveautés », Phytoma n° 673, avril 2014, p. 28 à 37. (4) Ministère de l'Écologie, du Développement durable et de l'Énergie. (5) Ministère de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer. (6) Voir « Traitement des effluents phytosanitaires : liste actualisée », Phytoma n° 690, janvier 2016, p. 8.

1 - Comment ça marche ? Les deux voies possibles

Phytobac agréé Bayer de Biotisa. La pousse d'herbe dans le dispositif indique un bon état biologique du substrat. Photo : J.-R. Sanche-CAPL-Biotisa

Phytobac agréé Bayer de Biotisa. La pousse d'herbe dans le dispositif indique un bon état biologique du substrat. Photo : J.-R. Sanche-CAPL-Biotisa

À la base, il existe deux types de procédés de traitement des effluents phytopharmaceutiques : les « séparateurs » et les « dégradeurs ».

Les « séparateurs » dissocient l'eau des effluents (substances actives et coformulants) qui sont concentrés en petit volume. Ce peut être par :

- évaporation de l'eau ; c'est le cas de procédés Heliosec, Osmofilm, Ecobang et Evapophyt ;

- séparation de l'eau liquide d'avec les effluents ; c'est le cas des procédés BF Bulles, Emeraude, Carola Epumobil, Sentinel, Phytopur et Hydrocampe ; ils associent des phases de coagulation, floculation et/ou adsorption sur charbon actif avec une phase de filtration, l'eau seule passant les filtres ; l'eau est garantie assez épurée pour être rejetée dans le milieu, condition sine qua non de la reconnaissance officielle.

Le reliquat concentré de ces procédés doit être éliminé comme un DD (déchet dangereux au regard de la loi), avec les éventuels consommables du dispositif. Mais le volume de tout cela, donc son coût de transport et de destruction, est bien moindre que celui de l'effluent brut (lui aussi classé DD).

Les « dégradeurs » dégradent les effluents donc font baisser la quantité à éliminer.

Un seul fonctionne par photodégradation, c'est le Phytocat.

Pour leur part, Aderbio STBR 2, UTP, Vitimax, Cascade Twin, Phytocompo et Phytobac fonctionnent par biodégradation. Les quatre premiers rejettent de l'eau épurée dans le milieu. Phytocompo et Phytobac, fonctionnant sur substrat solide, ne rejettent pas d'eau.

2 - Reliquats ultimes : quid des métaux en général et du cuivre en particulier ?

Les procédés « dégradeurs » agissent en « cassant » les molécules complexes contenues dans les effluents ; il ne reste que des petites molécules (ex. : CO2 ou O2) et des corps simples. Le carbone et l'azote, par exemple, vont être intégrés au métabolisme des bactéries et/ou recyclés sans problème dans le milieu.

Mais certains éléments, en particulier des métaux, peuvent poser problème. C'est le cas de l'aluminium et du manganèse mais surtout du cuivre.

Le plus fort tonnage de métaux utilisés dans des produits phyto est en effet celui du cuivre. De plus, ce dernier a des propriétés bactéricides. La preuve : des produits à base de cuivre sont autorisés contre diverses bactérioses.

Trois questions se posent. Voyons-les une par une.

Le cuivre va-t-il tuer les bactéries dégradeuses de molécules phytopharmaceutiques, donc les empêcher de travailler ?

Réponse : il faut quand même une certaine concentration...

Sur substrat solide, des suivis de Phytobacs sur des exploitations utilisant des produits cupriques ont montré une activité microbienne perdurant plusieurs années.

Et en milieu liquide ? Une réponse ressort des résultats de l'équipe travaillant sur un procédé dont la reconnaissance devrait être demandée en 2016 (voir l'article p. 42-43). Citons l'un des auteurs de l'article, en réponse à une question de Phytoma :

« La quantité de cuivre augmente lors des traitements cupriques mais diminue très rapidement, ce qui nous laisse à penser que le cuivre sédimente au fond des bassins, piégé par les colloïdes apportés par le lavage des tracteurs.

Nous avons des graphes montrant l'apparition et la "disparition" du cuivre dans l'eau des bassins. Il ne s'agit pas de dégradation mais de séquestration. » Ainsi, il n'y a pas d'accumulation dans le milieu liquide, donc pas de stérilisation de ce milieu. Les bactéries continuent leur travail.

Si l'on est en « AB », agriculture biologique, et qu'on n'utilise comme fongicides que ceux à base de cuivre et de soufre (ce dernier est un corps simple), à quoi peut servir un procédé biodégradeur ?

Réponse : effectivement, un procédé séparateur peut être mieux adapté. Rappelons qu'il en existe dix : Heliosec, Osmofilm, Ecobang, Evapophyt, BF Bulles, Emeraude, Epumobil, Sentinel, Phytopur et Hydrocampe.

Ceci étant, en cas de conversion au « bio » d'une exploitation possédant un procédé dégradeur, ce dernier peut encore être utile. Rares sont les exploitations bio qui n'utilisent aucun bio-insecticide (à base de pyréthrines, de Bacillus thuringiensis, de spinosad, etc.), sans compter les coformulants et les produits de nettoyage du pulvérisateur (« bio » et biodégradables, bien entendu !). Toutes ces substances seront biodégradées.

Que faire des reliquats chargés en cuivre des procédés dégradeurs ? À terme, il faut bien s'en débarrasser.

L'épandage du substrat solide d'un Phytobac ou d'un Phytocompo, en principe autorisé sur l'exploitation, peut poser problème. Mais que représentent les quantités de métal ainsi reversées au champ par rapport à celles tombant au sol lors des pulvérisations ?

Quant aux autres procédés, le cuivre s'accumule sur les consommables du « photodégradeur » Phytocat et dans les boues tapissant le fond et les parois des « biodégradeurs en milieu liquide » Aderbio STBR2, UTP, Vitimax et Cascade Twin. Or, ces consommables chargés et ces boues, voire leurs contenants, sont de toute façon à éliminer en tant que DD au bout d'un certain temps.

RÉSUMÉ

CONTEXTE - Le traitement des effluents phyto (phytopharmaceutiques) sur site est autorisé. Mais tout reliquat de ce traitement doit être détruit en tant que DD, sauf les portions (eau liquide ou vapeur, substrat) épurées issues de procédés officiellement reconnus efficaces pour un ou des champs d'application.

Il y a un an, seize procédés étaient officiellement reconnus. Cela a évolué depuis.

RECONNAISSANCES - Emeraude est le nouveau nom du procédé de la société Jade, anciennement nommé BF Bulles.

La société Axe Environnement a fait reconnaître un dix-septième procédé sous le nom de marque BF Bulles.

Emeraude et Carola Epumobil d'Aubepure ont vu leurs champs de reconnaissance étendus.

Enfin, la société Vento Sol a signé avec Adivalor une convention pour la reprise des reliquats concentrés de produits issus du procédé Ecobang, et Bayer a agréé Axe Environnement pour un nouveau modèle de Phytobac.

MOTS-CLÉS - Bonnes pratiques phytosanitaires, DD (déchet dangereux), procédés de traitement des effluents phytopharmaceutiques, dispositifs, reconnaissance officielle, Emeraude, BF Bulles, Carola Epumobil, Ecobang, Phytobac.

POUR EN SAVOIR PLUS

AUTEUR : *M. DECOIN, Phytoma.

CONTACT : m.decoin@gfa.fr

LIEN UTILE : www.developpement-durable.gouv.fr

BIBLIOGRAPHIE : voir notes (2), (3) et (6).

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