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ANSES-EFSA

André Fougeroux - Phytoma - n°730 - janvier 2020 - page 7

UN POINT SUR LA SANTÉ DES ABEILLES
 Photo : Pixabay

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La 8e édition de la journée internationale sur la santé des abeilles s'est tenue à la Maison de la RATP le 9 décembre dernier.

En raison des grèves, tous les inscrits n'ont pas pu se rendre sur place, mais la conférence organisée par l'Anses(1) et l'Efsa(2) pouvait être suivie en direct via internet. La santé des abeilles est un enjeu majeur lié au défi plus global de protection de la biodiversité. Pour l'Anses, il s'agit d'un sujet transversal de recherches portant sur les différents stress des abeilles : parasites, pathologies, produits de protection des plantes, substances vétérinaires, facteurs environnementaux... mais aussi les méthodologies d'évaluation des produits vis-à-vis des abeilles et des autres pollinisateurs.

Des restriction d'emploi en floraison

Avec la progression des connaissances scientifiques, les méthodologies d'évaluation des produits évoluent afin de mieux prendre en compte les effets potentiels sur les pollinisateurs. En France, les fongicides et les herbicides peuvent être autorisés pendant les périodes de floraison ou de production d'exsudats par les insectes. En revanche, les insecticides et les acaricides régis par l'arrêté du 28 novembre 2003 sont interdits pendant ces périodes. Certains peuvent bénéficier de dérogation sous réserve de fournir des études justifiant de leur innocuité. Toutefois ces emplois dérogatoires ne sont possibles qu'en dehors de la présence d'abeilles(3).

En 2018, une saisine de l'Anses formule de nouvelles propositions à la suite de l'analyse des données des réseaux de surveillance mettant en évidence la présence de fongicides et d'herbicides dans les ruches. Ces propositions élargissent l'interdiction d'application en cours de floraison aux fongicides et aux herbicides. Elles renforcent aussi les paramètres de suivi pour les demandes de dérogation.

Une autre saisine, en 2019, porte sur les évaluations des substances actives et s'appuie sur un document guide de l'Efsa (2013). Ces évaluations qui ne concernaient jusqu'alors que les abeilles mellifères sont, dans les propositions de l'agence, étendues aux autres pollinisateurs : bourdons, abeilles solitaires... Toutefois, elles ne peuvent être concrétisées que si des tests standardisés sont disponibles. L'Anses recommande également que les évaluations comportent de nouvelles informations, comme, par exemple, la toxicité chronique sur adultes à 20-30 jours, le vol de retour à la ruche, des informations sur la fertilité des mâles et la fécondité des femelles. Ces nouvelles données doivent aussi prendre en compte les différentes voies d'exposition des abeilles. Enfin, des seuils validés par les États membres doivent être définis pour assurer l'évaluation. Ainsi, si les questions de départ sont légitimes, les réponses nécessitent une démarche scientifique rigoureuse.

Des causes de stress multiples

À ces approches nécessaires par rapport aux traits de vie des pollinisateurs s'ajoutent les approches sur les stress multiples et sur les éventuelles interactions entre les facteurs de stress.

Pour comprendre les systèmes complexes intégrant les pollinisateurs, l'environnement et les activités apicoles, des programmes européens sont mis en oeuvre :

- Rescue-B a pour objectif de connaître les effets létaux et sublétaux liés aux pesticides et à l'alimentation des abeilles ;

- PoshBee assure une évaluation et une surveillance des effets des facteurs de stress en Europe sur la santé des abeilles, et travaille sur leur atténuation.

Une partie de la conférence a été consacrée aux réseaux de surveillance, comme l'Observatoire de mortalités et des affaiblissements des abeilles (OMAA), mis en place fin 2017 et piloté par la Direction générale de l'alimentation (DGAL). Cet observatoire s'intéresse aux différents signalements tels que des suspicions de danger sanitaire de catégorie 1, des cas de mortalité aiguë, auxquels ont été ajoutés récemment tous les autres troubles. Ce dispositif est déployé dans trois régions pilotes : Bretagne, Pays de la Loire et Auvergne-Rhône-Alpes. Mille déclarations ont été enregistrées, quatre cents ont fait l'objet d'enquêtes. La conférence a été aussi l'occasion de faire un point sur les mortalités hivernales des colonies d'abeilles en France qui s'élevaient en moyenne à 29,3 % au printemps 2018 et à 21,3 % en 2019. Ces chiffres moyens masquent de grandes disparités à la fois entre les régions et au sein des mêmes régions.

Initiatives agriculture-apiculture

Les modélisations ont été abordées avec la présentation du modèle Apiram d'intégration de multiples facteurs de stress et celle du modèle B-Good qui devrait permettre d'accompagner une production apicole durable et saine. Ces modèles sont en phase de mise en place. Enfin, une table ronde a rassemblé des représentants d'organisations apicoles (Cari, Apimondia, EPBA), d'organisations agricoles (Symbiose, Copa-Cogeca) afin de présenter les initiatives des différents secteurs pour une cohabitation agriculture-apiculture dont tous s'accordent à dire qu'elle est nécessaire. À cet égard, les actions menées en Champagne par Symbiose et en Vendée par Agrapi démontrent combien, dans cette relation, le dialogue demeure primordial.

(1) Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail.(2) Autorité européenne de sécurité des aliments.(3) Voir « Pollinisateurs, traiter et préserver : l'équation impossible ? », Phytoma n° 722, p. 4.

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