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DOSSIER - Pulvérisation des bases à la dérive

Pulvérisation par drone en vignoble de forte pente

GUILHEM POUXVIEL(1), XAVIER DELPUECH(2), YANN FRENDO(2), ÉRIC COTTEUX(1) ET SÉBASTIEN CODIS(2) (1) Inrae, UMT EcoTech - Montpellier. (2) Institut français de la vigne et du vin (IFV), UMT EcoTech - Montpellier. - Phytoma - n°741 - février 2021 - page 35

Le projet PulvéDrone étudie la qualité de la pulvérisation par drone. Voici les premiers résultats sur vigne.
 Drone Agras MG-1P en vol à Cornas, en Ardèche, juillet 2020. Photo : G. Pouxviel

Drone Agras MG-1P en vol à Cornas, en Ardèche, juillet 2020. Photo : G. Pouxviel

Fig. 1 : Localisation des sites expérimentaux et dates des essais du projet PulvéDrone menés en vigne

Fig. 1 : Localisation des sites expérimentaux et dates des essais du projet PulvéDrone menés en vigne

Fig. 2 : Exemple de trajectoire sur un essai à Guebwiller (Alsace)       Les points de rouge foncé à rouge clair représentent les positions du drone entre le début et la fin de l'essai, les points blanc les ceps échantillonnés. La largeur de passage est de 3 m, les interrangs de vigne sont à 1,5 m.

Fig. 2 : Exemple de trajectoire sur un essai à Guebwiller (Alsace) Les points de rouge foncé à rouge clair représentent les positions du drone entre le début et la fin de l'essai, les points blanc les ceps échantillonnés. La largeur de passage est de 3 m, les interrangs de vigne sont à 1,5 m.

 2. Drone DJI Agras MG-1P équipé de buses à réduction de dérive pulvérisant une solution de tartrazine lors d'essais à Rivolet en juillet 2020.      3. Drone DJI Agras MG-1P en action lors d'un essai de traitement à Cornas en juin 2020.

2. Drone DJI Agras MG-1P équipé de buses à réduction de dérive pulvérisant une solution de tartrazine lors d'essais à Rivolet en juillet 2020. 3. Drone DJI Agras MG-1P en action lors d'un essai de traitement à Cornas en juin 2020.

 Photos : G. Pouxviel

Photos : G. Pouxviel

Fig. 3 : Distribution des dépôts normalisés sur les essais réalisés en 2019 et 2020 sur les trois vignobles en pleine végétation

Fig. 3 : Distribution des dépôts normalisés sur les essais réalisés en 2019 et 2020 sur les trois vignobles en pleine végétation

Fig. 4 : Répartition moyenne des dépôts en fonction de la hauteur (de A à Z du bas vers le haut) et de la profondeur dans la végétation (tous essais confondus)

Fig. 4 : Répartition moyenne des dépôts en fonction de la hauteur (de A à Z du bas vers le haut) et de la profondeur dans la végétation (tous essais confondus)

 Cornas, juin 2020. Photo : G. Pouxviel

Cornas, juin 2020. Photo : G. Pouxviel

Rivolet, juillet 2020. Photo : G. Pouxviel

Rivolet, juillet 2020. Photo : G. Pouxviel

Fig. 5 : Comparaison des dépôts entre les faces externes et l'intérieur de la végétation pour chaque appareil et chaque site (modalités moyennées)

Fig. 5 : Comparaison des dépôts entre les faces externes et l'intérieur de la végétation pour chaque appareil et chaque site (modalités moyennées)

Fig. 6 : Distribution des dépôts sur vigne en fonction de la distance entre le drone et le cep échantillonné      Essais réalisés à Rivolet, France, juillet 2020, avec l'Agras MG-1P de DJI, hauteur de vol comprise entre 2,5 et 3,5 m de haut.

Fig. 6 : Distribution des dépôts sur vigne en fonction de la distance entre le drone et le cep échantillonné Essais réalisés à Rivolet, France, juillet 2020, avec l'Agras MG-1P de DJI, hauteur de vol comprise entre 2,5 et 3,5 m de haut.

Dans les zones de forte pente (> 30 %), à la suite de l'interdiction des traitements aériens en 2015, ces opérations sont majoritairement réalisées par des opérateurs au prix d'une exposition conséquente aux produits phytosanitaires ainsi qu'aux risques d'accidents (renversement des engins). La pulvérisation par drone pourrait constituer une alternative aux traitements au sol pour pallier ces deux écueils majeurs sur la santé et la sécurité des travailleurs agricoles, et permettre la poursuite de l'activité agricole sur ces terrains difficiles d'accès. Lancé en avril 2019, le projet PulvéDrone(1) mené par l'UMT EcoTech (IFV-Inrae-CTIFL-Montpellier SupAgro) a pour objectif d'étudier les performances techniques des drones pour la pulvérisation sur vigne, banane et en arboriculture.

Vignobles en pente : les enjeux

Les avantages du drone

En France, la viticulture sur des pentes supérieures à 30 % représente plus de 5 000 ha, et se concentre sur les territoires du Languedoc-Roussillon, de la vallée du Rhône, du Beaujolais ou encore de l'Alsace. Malgré la faible part des terres concernées (moins de 1 % du vignoble français), il s'agit souvent de productions à forte valeur ajoutée dont une partie significative était traitée par hélicoptère avant 2015.

Le drone offre la possibilité du contrôle à distance et évite ainsi les dangers liés au retournement de machines, limite l'exposition des opérateurs aux produits lors de la pulvérisation, et diminue la pénibilité du travail en terrain accidenté et pentu. Le drone limite également les impacts sur le tassement et l'érosion du sol des parcelles en réduisant le nombre de passages d'engin nécessaire pour la pulvérisation, voire en les supprimant complètement. Il permet aussi d'intervenir sur des sols qui ne permettraient pas le passage d'un engin terrestre, et offre ainsi une capacité de réaction rapide pour protéger les cultures, par exemple après des pluies intenses favorables au développement des maladies fongiques. À cela s'ajoutent des capacités de positionnement précis et de vol à basse altitude. Les attentes de la profession concernant ce nouveau moyen de traitement aérien sont donc fortes. En Suisse, le drone s'est fait une place et est déjà employé depuis 2019 pour répondre aux problématiques de traitement de la vigne en forte pente : aujourd'hui une vingtaine d'entreprises et de vignerons peuvent traiter avec une trentaine de machines sur plusieurs dizaines d'hectares (environ 150 ha en 2020). Ces chiffres sont amenés à augmenter dans les années à venir pour le traitement de parcelles de forte pente, au vu des nombreux avantages du drone par rapport à l'hélicoptère du point de vue opérationnel et de la dérive : moins coûteux et moins dangereux pour les opérateurs et les riverains, plus silencieux, plus précis et plus petit ce qui permet de voler plus bas et ainsi de limiter la dérive. Le recul et l'expertise acquise par l'institut de recherche suisse Agroscope nous aident également au développement de ce projet à travers la collaboration initiée en 2020.

Des vols expérimentaux autorisés

Le drone est un moyen de traitement aérien, donc soumis à interdiction depuis 2015. La réglementation française s'est récemment assouplie avec la loi EGalim d'octobre 2018, transcrite dans l'arrêté du 26 août 2019(2), afin de permettre la réalisation, à titre dérogatoire jusqu'en octobre 2021, de vols expérimentaux de pulvérisation de produits phytopharmaceutiques par drone. Ces traitements ne concernent que des produits utilisables en agriculture biologique ou dans le cadre d'une exploitation certifiée de haute valeur environnementale, et uniquement sur parcelles de pente supérieure à 30 %.

L'étude de la pulvérisation par drone est un sujet complexe, avec de nombreux facteurs. Les paramètres de vol, de pulvérisation ainsi que les conditions environnementales dans lesquelles le drone évolue sont susceptibles d'influencer la qualité de pulvérisation. Une première étape du projet PulvéDrone a donc été de réaliser une campagne d'essais de terrain pour appréhender les capacités opérationnelles des drones à réaliser une pulvérisation sur des situations variées de vigne en forte pente.

Expérimentations 2019-2020

Les campagnes d'essai

Entre le printemps 2019 et l'été 2020, seize essais ont été réalisés au vignoble en début et pleine végétation : en Ardèche sur vigne en échalas, en Beaujolais et Alsace sur vigne palissée (Figure 1). Il est important de réaliser des essais sur différents modes de conduite de la vigne pour avoir une vision la plus complète possible des capacités et limites des drones. La dernière campagne 2020 a majoritairement été réalisée avec le drone Agras MG-1P (photos 1 à 3), drone de pulvérisation de grande série entièrement conçu par l'entreprise DJI (Chine). Deux autres machines ont également pris part aux essais : l'Agrico-Drone X6 de DroneVisionPro et le BLY-C-1 d'Aermatica3D. À la différence du drone de DJI et de DroneVisionPro, le BLY-C-1 est une adaptation d'une base de drone standard en drone de pulvérisation par le prestataire Aermatica3D.

Lors de ces essais, nous avons fait varier certains paramètres :

- paramètres de vol : hauteur de vol (entre 2,5 m et 5 m), trajectoire parallèle ou perpendiculaire aux rangs ;

- paramètres de pulvérisation : type de buse (antidérive ou à fente), volume/hectare.

Il s'agissait avant tout d'explorer la gamme des paramètres possibles pour obtenir une vision d'ensemble de la pulvérisation par drone, dans différents contextes, et commencer à identifier les facteurs les plus importants jouant sur la qualité de pulvérisation.

Validation des prérequis : positionnement et respect des doses

L'objectif des essais était d'abord d'évaluer la capacité opérationnelle des drones à maîtriser les paramètres de base d'une pulvérisation, que sont la dose de produit et le positionnement de son application sur la parcelle. Les constatations suivantes ont pu être faites :

- les technologies GPS embarquées dans les drones sont aujourd'hui parfaitement fiables pour assurer un positionnement et une maîtrise de la vitesse du drone conformes aux consignes (Figure 2) ;

- les drones équipés en RTK(3) peuvent se positionner à quelques centimètres près ;

- les drones équipés de systèmes de détection d'obstacle et de suivi de terrain (radar de sol) ont rencontré des difficultés lors de trajectoires face à la pente lors des essais ; le radar assimile le sol à un obstacle devant lui ; le drone s'arrête et reprend alors de l'altitude, ce qui conduit à des trajectoires en marches d'escalier ; pour ces drones, une trajectoire en courbes de niveau sera préférable ;

- certains opérateurs commencent à proposer de cartographier au préalable le terrain en 3D puis de positionner précisément le drone à partir de ces données, ce qui permet de voler au plus près du terrain en évitant le problème cité ci-dessus ;

- le système de pompe est fiable, mais sur les drones testés, les pressions se sont parfois avérées un peu trop faibles générant ainsi des gouttes trop grosses avec des buses antidérives ; cela touche nécessairement la qualité de pulvérisation en termes de densité et de taille d'impacts ;

- comme sur les pulvérisateurs terrestres, la vigilance est de mise pour éviter le bouchage des buses, en réalisant un entretien et un nettoyage du système de pulvérisation pointilleux et en réalisant des tests de pulvérisation avant décollage ;

- les débits et les volumes/hectare sont stables, répétables et conformes aux consignes données.

Bilan : les technologies de navigation et de pulvérisation embarquées et propres à chaque modèle de drone permettent la maîtrise de certains prérequis (localisation précise et hauteur maîtrisée au-dessus des ceps, dose appliquée conforme aux attentes, contrôle de la vitesse de vol), mais qu'en est-il de la qualité d'application ?

Qualité de pulvérisation : premiers résultats

Méthode de mesures

Les mesures sont réalisées à l'aide de collecteurs PVC de 10 cm² répartis sur les feuilles de neuf ceps de la parcelle traitée de manière à obtenir un échantillonnage homogène dans la végétation et quelle que soit la trajectoire du drone (Figure 2). Entre dix et vingt collecteurs sont posés sur chaque cep selon la quantité de végétation à échantillonner. Les pulvérisations sont réalisées avec un colorant alimentaire en solution aqueuse : la tartrazine (E102) à la concentration de 15 g.l-1. Après son extraction des collecteurs, elle est quantifiée par spectrométrie (absorbance 426 nm). Afin de permettre la comparaison entre essais, la mesure de dépôt est normalisée par la dose appliquée et la concentration en traceur de la bouillie mère. La quantité de dépôt surfacique normalisée s'exprime en nanogramme de traceur par décimètre carré de collecteur pour 1 gramme de traceur pulvérisé par hectare (ng.dm-2/g de traceur/ha).

Quantité de dépôt

Les valeurs de dépôt médian obtenues lors des essais en pleine végétation pour les différents appareils sont inférieures à 100 ng.dm-2 (Figure 3). Les appareils de référence actuellement employés dans les fortes pentes affichent des résultats globalement meilleurs que les drones, que ce soit pour l'atomiseur passé tous les rangs (essai n° 19) ou le chenillard (essai n° 8). La qualité de pulvérisation d'un atomiseur passé tous les deux rangs (essai n° 11) est par contre peu différente de ce que l'on observe avec les drones. Les faibles valeurs du premier quartile des dépôts drone, aux alentours de 10 ng.dm-2, laissent présager une vulnérabilité sur la plante en raison de traitements trop faibles sur certains compartiments du cep. Les dépôts médians appliqués par les drones sont toujours inférieurs à 60 ng.dm-2. Les meilleurs résultats, similaires aux références sol, sont obtenus lors de deux vols à 3,5 m de haut avec l'Agrico-Drone X6 à 65 l/ha, équipé de buses à réduction de dérive Agrotop Airmix 110-015 (essai n° 9) ainsi qu'avec l'Agras MG-1P à 140 l/ha, équipé de buses à fente Teejet XR 110-01 (générant des gouttes plus fines que les buses à réduction de dérive) (essai n° 18).

Ces résultats confirment les résultats obtenus en Suisse par l'Agroscope de Changins. Toutefois, l'effet positif du volume/hectare observé avec l'Agras MG-1P peut être discuté dans la mesure où ce drone ajuste automatiquement un ensemble de paramètres (vitesse d'avancement, pression) pour obtenir le volume consigne : il est possible qu'en passant moins vite au-dessus de la vigne lors d'un traitement à 140 l/ha au lieu de 100 l/ha, le souffle généré par le drone ouvre mieux la végétation à son passage, permettant à la pulvérisation de pénétrer plus efficacement dans le feuillage. Des fines gouttes générées par des buses à fente, en comparaison aux gouttes plus grosses des buses à réduction de dérive, sont suspectées aussi d'être mieux à même de pénétrer la végétation. Elles sont cependant plus sensibles au phénomène de dérive, paramètre central à prendre en compte lors de traitements aériens, et pourraient donc se déposer en quantité variable selon les conditions de vent (diminution de la quantité avec l'augmentation de la vitesse de vent). La qualité de dépôt est aussi à relier au mode de conduite de la vigne, pour lequel des différences de densité de feuillage peuvent être observées. Ce facteur joue sur la pénétration de la pulvérisation dans la végétation et donc l'homogénéité du traitement.

Les profils de dépôt

La distribution des dépôts dans différents compartiments foliaires d'une vigne est représentée sous forme de blocs de couleur empilés, montrant une section transversale au rang (Figure 4). Les profils de dépôts obtenus après passage d'appareils terrestres présentent un manque d'homogénéité, avec des différences très nettes selon les essais. Le drone constitue un moyen de traitement atypique, avec une pulvérisation de la végétation réalisée par le dessus. Nous retrouvons une hétérogénéité de traitement mais, à la différence des outils terrestres, un gradient haut/bas est constaté. Les gouttes traversent d'abord les strates de végétation supérieures avant d'atteindre le milieu et le bas de cep. Le maximum de dépôt est donc généralement situé sur le haut du cep, tandis que peu de produit arrive à atteindre les strates les plus proches du sol et au coeur de la végétation. Cela peut donc poser des problèmes de couverture de zones sensibles basses, notamment la zone des grappes. Nous avons aussi constaté une hétérogénéité entre les deux faces de la vigne, qui pourrait s'expliquer par un déséquilibre du flux d'air lié à la rotation des hélices.

Comparaison des dépôts internes et externes

Sur les essais réalisés à Guebwiller et Rivolet, l'atomiseur à dos passé tous les rangs et le chenillard traitent de manière similaire l'intérieur et l'extérieur de la végétation (Figure 5). La pulvérisation pénètre bien dans la végétation. À Cornas, lorsque l'atomiseur à dos est passé tous les deux rangs, la qualité de pulvérisation est moins bonne et la pulvérisation pénètre moins bien dans la végétation. La densité de végétation a pu aussi jouer un rôle sur ces vignes conduites en échalas.

Sur les trois vignobles, les dépôts obtenus par le drone sont inférieurs à ceux mesurés avec le matériel terrestre de référence. Ces valeurs de dépôts sont assez faibles et comprises entre 40 et 10 ng.dm-2 pour 1 g de traceur épandu par hectare. L'intérieur de la végétation présente des valeurs plus faibles que l'extérieur, mettant en évidence la capacité limitée du traitement par drone à faire pénétrer la pulvérisation dans la végétation. Il sera primordial de vérifier sur le terrain le niveau de protection obtenu contre les maladies.

Par ailleurs, la distance entre le cep et le drone joue sur la qualité de pulvérisation. La largeur de passage du drone est classiquement de 3 m, et la trajectoire du drone est complètement indépendante de la structure de la vigne. De fait, des ceps peuvent se retrouver sous le drone ou à l'extrême à 1,5 m, avec toutes les valeurs possibles entre ces deux bornes. Lors des essais menés à Rivolet en 2020, avec des buses à fente, une diminution des dépôts a été constatée sur les ceps situés à plus de 1 m de distance du drone (Figure 6). Avec les buses antidérive, les dépôts sont beaucoup plus homogènes entre les ceps, bien que plus faibles en moyenne. Le positionnement du drone par rapport à la vigne peut donc être un facteur de variation de la qualité de pulvérisation selon le type de buse employé. Une maîtrise de ce positionnement pourrait ouvrir des possibilités d'optimisation en ciblant mieux la vigne.

Conclusions et perspectives

Des paramètres à ajuster

Du point de vue agronomique, une des limites de la pulvérisation par drone se situe dans la capacité à faire pénétrer la pulvérisation dans la végétation de manière à traiter convenablement tous les compartiments du cep. Avec les trois modèles de drone qui ont pris part aux essais en pleine végétation, un paramétrage optimal se dégage : un passage du drone selon les courbes de niveau, avec un volume hectare élevé, proche des 140 l/ha, à une altitude comprise entre 2,5 et 3,5 m, en évitant les trop grosses gouttes. En parallèle, des travaux sur le banc d'essai EvaSprayViti de vigne artificielle sont réalisés pour compléter les connaissances sur l'effet des paramètres de vol et du réglage de la pulvérisation sur la qualité de dépôt, dans des conditions les plus standardisées possibles. Il est ainsi possible d'isoler plus précisément des paramètres à étudier et de limiter l'influence du vent, facteur influençant fortement la qualité de pulvérisation.

Les contraintes météorologiques, en particulier le vent, sont aussi un facteur déterminant de la qualité du traitement par drone. En effet, pour des raisons de sécurité, le drone évolue relativement loin de sa cible en comparaison aux références terrestres, et dans un environnement perturbé en raison des turbulences générées par les rotors. Cela rend la pulvérisation par drone particulièrement sensible à la dérive, il est donc important que le vent naturel soit le plus faible possible lors du vol pour limiter au maximum ce phénomène. La dérive est une donnée clé à caractériser lorsque l'on s'intéresse aux traitements aériens ; les essais de la campagne 2021 permettront de caractériser les conditions d'utilisation des drones et de faire émerger des recommandations (hauteur de vol, vitesse, type de buse...).

En complément aux traitements terrestres

Les résultats obtenus jusqu'ici conduisent à envisager les traitements par drone plutôt pour le traitement de la vigne en complément aux traitements terrestres en pleine végétation ou début de végétation quand la densité du feuillage est moins importante. De premiers essais en début de végétation (non présentés ici) ont permis d'obtenir des résultats positifs. L'exemple suisse montre qu'un niveau de protection globalement satisfaisant est obtenu en combinant l'utilisation des drones et des applications terrestres selon la période végétative et la cible à traiter (feuille ou grappe). Des essais d'efficacité biologique sur une campagne 2021 complète de traitement par drone de vignes en forte pente devraient aussi permettre d'accroître les connaissances sur les capacités de ce vecteur à protéger réellement les cultures(projet Drone Viti : CA07, IFV, MSA). En complément, des données seront collectées concernant les aspects logistiques et opérationnels qu'implique l'utilisation du drone (organisation de chantier, coûts, temps de travail/hectare, bilan énergétique, autonomie...), pour les comparer aux moyens de traitement de référence.

Améliorations techniques

À l'avenir, des améliorations techniques de la part des constructeurs sont attendues. La majorité des drones de pulvérisation ont été développés dans une optique de traitement de grandes cultures, moins pour des parcelles de cultures hautes, en rangs et en pente comme la vigne. Dans ce contexte, il est intéressant de chercher à optimiser le dépôt sur cible en ne traitant que les rangs. Ceci fait appel à des capacités de positionnement du drone en fonction des rangs de végétation, ce qu'il ne nous a pas été possible de réaliser avec les machines testées jusque-là. Il est aussi envisageable d'obtenir de meilleurs résultats de pénétration du produit avec des systèmes de propulsion du drone plus performants, tout en limitant la dérive. En effet, si le souffle des hélices du drone participe à la pénétration des gouttes projetées dans la végétation, elle peut aussi être source de dérive. De même, les pompes embarquées doivent être suffisamment puissantes pour garantir la bonne formation de gouttes, notamment lors de l'utilisation de buses à injection d'air. De nouveaux modèles d'aéronefs plus performants sont déjà disponibles, nous espérons pouvoir en inclure dans nos essais d'ici la fin du projet. Ces drones sont souvent plus gros et dépassent 25 kg au décollage, poids qui constitue actuellement un seuil réglementaire, ce qui complique pour l'instant leur évaluation en France.

(1) Le projet PulvéDrone, financé par le CasDAR sur appel à projet FranceAgriMer, regroupe quatre partenaires et instituts techniques : l'Institut français de la vigne et du vin (IFV), Inrae, le Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes (CTIFL), ainsi que l'Institut technique tropical (IT²).

RÉSUMÉ

CONTEXTE - En France, les vignobles en pentes supérieures à 30 % représentent plus de 5 000 ha. Hors dérogation, les traitements aériens sont interdits depuis 2015. Les traitements au sol exposent l'opérateur à des risques d'accidents. La loi EGalim autorise, à titre dérogatoire jusqu'en octobre 2021, l'expérimentation de pulvérisation de produits phytosanitaires par drone dans quelques cas : uniquement sur des parcelles de pente supérieure à 30 %, avec des produits AB ou en exploitation certifiée de haute valeur environnementale.

ÉTUDE - Le projet PulvéDrone, lancé en avril 2019, étudie les performances techniques des drones pour la pulvérisation sur vigne, banane et en arboriculture. Cet article présente les premiers résultats sur la qualité de pulvérisation au vignoble.

RÉSULTATS - L'usage des drones remplit certains prérequis : positionnement précis, dose appliquée, contrôle de la vitesse.

La qualité de pulvérisation varie toutefois selon différents paramètres : la hauteur de vol, le volume/hectare, la buse utilisée, la conduite de la vigne, le positionnement du drone par rapport aux ceps... La quantité de produit déposée reste globalement plus faible avec les drones qu'avec les équipements au sol testés. Par ailleurs, sa répartition au niveau du feuillage est hétérogène, avec un dépôt plus important au sommet et à l'extérieur de la végétation.

MOTS-CLÉS - Drone, pulvérisation, traitements aériens, vigne, pente.

POUR EN SAVOIR PLUS

CONTACTS : guilhem.pouxviel@inrae.fr

xavier.delpuech@vignevin.com

REMERCIEMENTS

Pierre Martini, Céline Abidon, Adrien Vergès et Élodie Trinquier (IFV), Amandine Fauriat (chambre d'agriculture de l'Ardèche), Bertrand Saulnier (DroneJet), Loïc Saura (DroneVisionPro), Andrea Torri et Paolo Marras (Aermatica3D), Stéphane Chaise et Claude Vanyek (Domaine Schlumberger), Olivier Clape et Guy Farge, vignerons à Cornas, Ardèche.

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