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De la vigne à la cuve

La vigne - n°90 - juillet 1998 - page 0

En identifiant le devenir des raisins au cours de la vinification grâce à la traçabilité, les caves peuvent mobiliser les vignerons pour améliorer la qualité de leur travail à la vigne.

Sur le quai de réception, nous ne pouvons que constater les problèmes. Dans notre démarche de certification, nous avons tenu à aller jusqu'à la parcelle, pour inciter les vignerons à améliorer la qualité des raisins , explique Alain Ignace, le président de la cave coopérative de Beaumes-de-Venise (Vaucluse), qui vinifie 50 000 hl de vins d'appellation et de table. Certifiée Iso 9 002 depuis 1994, cette cave a mis en place une traçabilité de la parcelle à la bouteille. Sur une fiche envoyée par la coopérative, chacun des deux cents vignerons enregistre les interventions. ' Adopter de nouvelles habitudes n'est pas facile. La première année, nous n'avons récupéré que 40 % des fiches. Il a fallu taper du poing sur la table mais aujourd'hui, tout le monde a compris l'utilité du système ', souligne-t-il.Avant les vendanges, une commission visite la moitié des vignes, soit 600 ha, pour contrôler la maturité, le potentiel qualitatif, la maîtrise du rendement et l'état sanitaire, avant d'organiser le planning des apports. Sur le quai de réception, le raisin est agréé en A +, A, B ou C. Pour les catégories A et A +, qui correspondent à de beaux raisins, la parcelle n'est pas notée sur le ticket d'apport, la traçabilité n'apportant rien de plus dans ce cas. Mais pour les catégories B et C qui sont vinifiées à part, le numéro de la parcelle est enregistré et rapproché de la fiche d'enregistrement et du compte-rendu de visite de la vigne. Après les vendanges, Michèle Vacher, la responsable qualité, analyse ces informations et propose des améliorations techniques au vigneron. ' Avec les adhérents, nous réalisons également des dégustations de différentes catégories avant assemblage, pour bien leur faire percevoir la différence entre A et B, par exemple. Notre objectif est de diminuer au maximum les catégories B et C, en fonction des possibilités climatiques de l'année, bien sûr ', précise-t-elle.Entre les catégories A et C, l'écart de prix, très incitatif, atteint 30 %. Depuis que ce système est instauré, les vignerons qui vendangent à la main, n'hésitent plus à trier les raisins dans les parcelles à problème. Les progrès obtenus sur la matière première se retrouvent au niveau des vins. ' Nous avons eu des retours très positifs de nos clients sur l'amélioration de notre qualité. Le pourcentage en haut de gamme a augmenté et la rémunération des producteurs a progressé de 5 % par an ', constate Alain Ignace.Le temps où les caves coopératives mélangeaient tous les raisins pour les vinifier de la même manière est révolu depuis longtemps. Pour répondre aux demandes du marché qui se diversifient de plus en plus, le nombre de produits élaborés a nettement augmenté. Cela nécessite une bonne orientation des raisins en fonction des types de vins recherchés et du mode de vinification choisi. Pour piloter cet ensemble de façon raisonnée, la traçabilité devient incontournable. ' Nous cherchons à rapprocher les potentialités de nos caves adhérentes et les différentes demandes de nos acheteurs, en mettant en place une traçabilité à caractère économique ', explique Jean-Yves Barsalou, le directeur du Val d'Orbieu, basé à Narbonne (Aude). Ce groupement rassemble des coopératives et des caves particulières du Languedoc-Roussillon; il produit et commercialise 800 000 hl. Il est déjà certifié Iso 9 002 pour son chai d'embouteillage.' Nous envisageons de poursuivre la traçabilité vers l'amont pour rapprocher la classification des parcelles et celle des vins, de façon à vérifier la cohérence de nos choix de vinification et de nos assemblages, qui doivent nous permettre de valoriser au mieux la qualité des raisins. Nous pourrons alors orienter les caves en connaissance de cause, en nous engageant sur des niveaux de rémunération. ' Les parcelles sont déjà classées dans les caves adhérentes en quatre catégories, en fonction de leur potentiel qui est estimé tous les ans par une commission interne. Les vins, eux, sont dégustés et notés par une équipe d'oenologues avant d'être orientés sur le marché. Il reste à connecter les deux en instaurant une traçabilité complète. ' Nous organisons les apports depuis dix ans déjà et nous savons quelles parcelles nous allons rentrer chaque jour. Noter la provenance des raisins n'est pas difficile mais suivre leur parcours n'est pas toujours évident ', explique Christian Cailhau, le président de la cave de Cuxac d'Aude, qui a fonctionné comme site test en 1997.Cette coopérative, qui élabore une quarantaine de vins différents, vinifie beaucoup de cépages blancs. ' Nous estimons à l'avance les rendements de chaque parcelle et prévoyons un planning d'utilisation des quatre pressoirs. Mais si, au jour J, nous constatons qu'il y a 5 tonnes en plus ou en moins, nous sommes obligés de compléter avec des raisins d'autres parcelles pour tourner à plein et ne pas faire attendre la vendange, sans avoir forcément le temps de tout enregistrer. Il devient alors plus difficile de suivre le parcours du raisin. Mais si sa qualité est homogène, cela ne pose pas de problème ', explique Cyril Chamontin, le maître de chai. La traçabilité n'est qu'un simple outil de travail et ne constitue pas un but en soi, la maîtrise des coûts et la qualité restant les deux priorités de la cave.

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