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Le dépôt-vente chez des particuliers

La vigne - n°92 - octobre 1998 - page 0

Pour réduire les coûts de transport et rester compétitifs, des vignerons font appel à leurs relations pour stocker et vendre des bouteilles chez elles. Ils bénéficient ainsi d'une présence dans d'autres régions. Le dépôt-vente bénévole reste l'un des meilleurs moyens de fidéliser sa clientèle.

Il n'est pas rare de rencontrer un collègue ou un ami qui vous propose ' le vin d'un petit propriétaire, à un prix accessible '. Des vignerons font appel à leur famille, à leurs amis ou simplement à des connaissances pour être des relais de vente. L'avantage de cette pratique? Etre présent dans toute la France ou dans certaines régions, avec des tarifs plus accessibles pour les clients car le coût de transport se trouve diminué grâce aux grandes quantités livrées. Certains vignerons répercutent partiellement ou totalement le port, avec parfois 1 F de supplément; d'autres estiment que cette charge est compensée par une diminution des frais de prospection. Certains clients ne commanderaient pas une petite quantité de bouteilles s'ils devaient payer un transporteur. ' Le dépôt-vente peut être considéré comme une alternative au caviste ou à la grande distribution, explique un vigneron qui vend la moitié de sa production de cette façon. De fait, la majorité des personnes ne prennent que quelques bouteilles, les commandes dépassant rarement les quinze unités. 'Ce fractionnement suppose une certaine disponibilité de la part des amis qui réceptionnent la commande.Pour être en règle avec les fraudes en cas de contrôle des stocks à la propriété, le vigneron doit émettre une facture à la personne qui fait le relais. Les bouteilles sont ainsi officiellement sorties du caveau. Le dépositaire enverra ensuite les chèques, libellés au nom du vigneron, au fur et à mesure des ventes. ' En aucun cas, le dépositaire ne doit avancer l'argent, précise un vigneron. Il a déjà les désagréments de réception de la marchandise et la visite de quelques clients, inutile d'en ajouter. 'Si les avantages de cette pratique sont nombreux, reste à trouver des ' relayeurs '. Il arrive que des clients ou amis se proposent d'eux-mêmes, par sympathie et par goût du commerce. Pour certains, notamment les personnes retraitées, ce service peut être source de contacts. Les membres d'associations, de chorale ou autre activité sociale sont en général plutôt efficaces dans cette tâche. Le but est que la revente se fasse le plus naturellement possible, avec un esprit de service rendu plutôt que de transaction commerciale.' Après plus de dix ans d'expérience, j'estime qu'un relais sur trois fonctionne bien, témoigne un vigneron du Val-de-Loire. Il m'est arrivé de solliciter un client avenant, faisant preuve de réelles qualités commerciales dans son travail, mais qui s'est révélé incapable de vendre quelques bouteilles de vin. Nous sommes parfois surpris du comportement des ' relayeurs '. Une personne timide qui bénéficie d'un large réseau relationnel peut s'avérer très performante. Mon but est de trouver des personnes souples et conciliantes, qui ne soient pas choquées de recevoir exceptionnellement un client qu'elles ne connaissent pas un samedi après-midi. Souvent, les acheteurs appartiennent au réseau relationnel des revendeurs. Mais il arrive que j'oriente un client de ce département vers le relais si la quantité désirée est faible. Pour les remercier de leur service, je leur offre des bouteilles ou je les invite au restaurant quand je viens livrer moi-même. ' Seul petit bémol envers le dépôt-vente, avancé par certains vignerons : ' Quand la personne qui fait le relais déménage, il est difficile de conserver les clients de sa région car nous les avions rarement en direct ou ils ne comprennent pas pourquoi maintenant il leur faudra payer le port. 'L'échange peut également se faire avec des vignerons d'une autre région viticole. Ce relais réciproque est parmi les plus intéressants car chacun cautionne le vin de l'autre. Le problème, c'est qu'il est assez rare que les deux jouent vraiment le jeu. ' Quand j'ai commencé à vendre ma production en bouteilles, je me suis rendu dans plusieurs régions viticoles pour créer ce genre de partenariat, témoigne un vigneron alsacien. Parmi les trois dépôts-ventes que j'ai mis en place, en prenant du vin des trois vignerons en échange, aucun n'a bien fonctionné. En six mois, j'avais vendu toutes leurs bouteilles. A eux trois, ils avaient vendu vingt bouteilles de ma production! Il est rare que ce genre d'échange fonctionne quand il n'existe aucun lien au départ entre les viticulteurs. En revanche, j'ai renouvelé l'expérience avec un producteur rencontré lors d'un salon. Nous avions tous les deux la même motivation et cet échange s'avère satisfaisant. 'Bruno Montels, vigneron dans la région de Gaillac, fait lui aussi office de relais : ' En plus de ma production, je vends des bouteilles de Champagne car ma clientèle me demandait souvent si je connaissais de bons producteurs de cette région. J'en ai contacté un dont j'appréciais la production. Je vends maintenant ses bouteilles mais sans échange car dans sa région, le vin de Gaillac est encore peu consommé. Cela ne me dérange pas car je rends ainsi service à ma clientèle. Et il arrive même que des clients viennent pour acheter du champagne et prennent en plus quelques bouteilles de Gaillac. Le champagne est vendu au même prix qu'à la propriété et les chèques sont libellés à son ordre. 'D'autres moyens de créer des dépôts-ventes existent : coiffeurs, ou encore producteurs de fruits et légumes qui vendent en direct peuvent être de bons relais grâce à une grande fréquentation. Outre ces relais, il y a les dépositaires professionnels qui travaillent sous deux statuts. L'agent commercial est mandaté par le vigneron, avec des factures au nom de la propriété. Il reçoit des commissions et doit se faire enregistrer au registre spécial des agents commerciaux. Le commissionnaire vend les bouteilles sous son propre nom. Il est immatriculé au registre du commerce et des sociétés.

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