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archiveXML - 1999

Maurice Mazuque, un artiste spécialisé dans les objets du vin

La vigne - n°100 - juin 1999 - page 0

Depuis quarante ans, Maurice Mazuque exerce le métier d'artisan graveur dans le vieux Bordeaux. Il travaille surtout pour le monde du vin.

Maurice Mazuque grave le verre et le cristal, mais aussi le métal, l'or, l'argent, les bijoux et l'orfèvrerie. Spécialiste des blasons, des armes et des armoiries, il peut en cinq minutes dessiner de superbes esquisses, en tenant compte des souhaits du client. ' Un bon monogramme ou de belles armoiries passent les générations ', dit-il. En fait, l'artiste grave ce qu'il dessine et le dessin, c'est sa passion. ' J'écris à la plume et je dessine au crayon. 'Dans sa boutique, le client choisit un objet, centré autour des arts de la table, et peut le faire graver sur place. ' A la maison, mon père avait de vieilles gravures sur bois. A l'école, j'ai fait de la linogravure. Tout cela a peut-être participé à mon envie d'être graveur ', explique-t-il.Scanners, ordinateurs et machines à tout faire remplacent désormais les artisans... Après cinq ans aux Beaux-Arts, trois de dessin et trois de gravure en loge, André Mazuque entre dans une maison bordelaise, pour faire son apprentissage avec les ouvriers expérimentés. A dix-neuf ans, le jeune artisan rencontre Auguste Laroque, graveur de bijoux, ' un génie de la gravure. Il m'a tout appris. 'Quand il a commencé en 1969, il travaillait 'en chambre', c'est-à-dire à façon, chez lui, pour les bijoutiers et les orfèvres. ' Mais quand vous avez une affaire intermédiaire, vous ne pouvez pas parler de votre travail, ni le signer. ' Alors il s'installe rue des Bahutiers, dans le vieux Bordeaux, avec l'idée ' de vendre son travail '. Il y aménage son atelier, comme aujourd'hui, dans sa boutique rue du Parlement Sainte-Catherine. En poussant la porte, on aperçoit un homme en blouse blanche penché sur son établi, une loupe à la main, gravant un verre ou une carafe. On peut aussi le voir choisir un crayon dans sa belle collection (deux cents pièces uniques ramenées de voyages ou offertes), prendre une feuille blanche et dessiner un monogramme en lettres courbes, un écusson aux ombres légères, d'élégantes armoiries familiales. ' Je fais plusieurs croquis et le client choisit. Puis je le redessine sur la pièce et je le grave : je graisse ma plaque avec du talc et je dessine avec une pointe d'ivoire. 'La gravure héraldique est un art délicat. L'artisan propose une diversité de styles et de lettres. ' Il n'y a pas de limites à l'imagination. Sans cette hétérogénéité, mon métier n'aurait pas de sens et je n'aurais plus envie de l'exercer, dit l'homme, qui espère pouvoir graver jusqu'à la fin de ses jours. Tant que j'y prendrai plaisir. Un graveur ne s'arrête pas. Connaissez-vous un peintre qui cesse de peindre? ', demande-t-il.Les particuliers font appel à Maurice Mazuque pour un cadeau personnalisé : ' Si vous offrez un décanteur à un ami qui se marie, il l'aura encore dans vingt ans et le donnera plus tard à son petit-fils ', dit-il.L'artiste est connu des professionnels du vin. Quand ils reçoivent des acheteurs étrangers, ils mettent une belle bouteille gravée à leurs initiales dans leur chambre. 'Une bouteille seule, c'est mesquin ; une caisse, c'est encombrant ; mais un grand vin dans un magnum gravé, c'est un cadeau prestigieux. Un château m'apporte régulièrement la signature d'un ou plusieurs clients japonais, relevée sur le bon de commande. Je la grave sur la bouteille.'Pour son art, Maurice Mazuque utilise un nombre impressionnant d'outils au manche de bois patiné par le temps et le travail : poinçons, lames, onglettes, burins, carré conique, échoppe plate... ' L'outil, je le sens comme un doigt. Je me sers du cristal comme le menuisier du bois. Et je n'ai pas le droit à l'erreur! Un jour, j'ai gravé deux magnifiques chandeliers en cristal. Lorsque j'ai fini ma pièce, j'ai une manie : je la frotte contre moi, sur mon tablier. Ce jour-là, j'ai frotté trop fort... '

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