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Un contenu restrictif

La vigne - n°101 - juillet 1999 - page 0

Les décrets d'application n'ont pas complètement éclairci la loi et la jurisprudence est parfois contradictoire

Dans le droit pénal français, la loi définit ce qui est interdit, la liberté étant posée comme postulat de départ. De ce point de vue, la loi Evin fait exception, car elle définit ce qui est autorisé, tout le reste étant considéré comme interdit. En ce qui concerne les supports, il n'y a pas d'ambiguïté, sauf pour les retransmissions à la télévision d'événements sportifs se déroulant à l'étranger, dès lors que des panneaux présents dans le stade et portant le nom de boissons alcoolisées apparaissent à l'écran. En 1995, à la suite des pressions du CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel), deux retransmissions ont été annulées par TF1 et France 2, ce qui a incité des clubs étrangers à retirer les panneaux de boissons françaises pour ne pas perdre de droits de retransmissions. Le CSA a ensuite adopté un code de bonne conduite qui n'a pas vraiment réglé le fond du problème, les annonceurs français ayant encore souvent du mal à s'afficher dans les stades étrangers.Les limites imposées au contenu des messages publicitaires sont, par contre, plus difficiles à définir précisément, car le texte prête à interprétation. ' Cette loi a créé une incertitude juridique ', soulignent de nombreuses entreprises du secteur. Les annonceurs et les agences ont pris l'habitude de faire appel à des juristes avant de lancer une campagne. En huit ans, l'Association nationale de prévention de l'alcoolisme s'est portée partie civile dans une vingtaine d'affaires, qui ont pratiquement toutes concernées des alcools forts et des bières. ' Notre but est de rappeler que la loi existe et d'éclaircir son interprétation en créant une jurisprudence', affirme Patrick Elineau, le directeur de l'Anpa.Les juges ne sont pas toujours d'accord entre eux. Ainsi, un premier jugement a estimé que des lunettes et un vieux livre pouvaient faire partie du patrimoine d'une marque de whisky ; il a été ensuite revu en Cour de cassation.' En matière d'application, nous n'avons pas encore tout vu. Une interprétation stricte de l'article L. 17 sur la propagande et la publicité indirecte pourrait amener à interdire un certain nombre d'opérations de communication ', souligne Jérôme Agostini, le directeur du Cnive (Comité national des interprofessions des vins et eaux-de-vie à AOC). Le fait d'organiser un événement attirant les médias et de faire parler du produit pourrait être considéré comme de la propagande et devrait alors se voir appliquer l'article L. 18 restreignant le contenu du message. Sur ce thème, les journalistes ont-ils encore toute liberté pour parler d'un produit? La Cour de cassation a jugé qu'un article sur une nouvelle cigarette lancée par la Seita, paru dans VSD, constituait bien une publicité interdite par la loi. Dans ces conditions, un journal peut-il légalement, par exemple, tenir une rubrique pour présenter ses découvertes en matière de vins?A la télévision, où toute publicité pour les boissons alcoolisées est interdite, a régné pendant un certain temps une ambiance qui rappelait la prohibition. ' Le simple fait de montrer une bouteille sur un plateau au cours d'une émission était considéré comme une provocation ', se rappelle un professionnel. Depuis, heureusement, le french paradox est passé par là, et il est redevenu possible de parler librement du plaisir qu'on peut éprouver à boire du vin.

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