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éditorial

Vent nouveau

PAR BERTRAND COLLARD, RÉDACTEUR EN CHEF DE LA VIGNE - La vigne - n°263 - avril 2014 - page 5

À la bonne heure ! Enfin un jugement qui ne va pas dans le sens de l'Anpaa. On s'était habitué, très à contrecoeur, à voir la justice donner régulièrement raison à cette association qui ne supporte pas de voir des publicités plus séduisantes qu'une porte de prison.

En 2012, l'Anpaa avait obtenu gain de cause de la Cour de cassation. L'association poursuivait l'interprofession des vins de Bordeaux pour une campagne d'affichage montrant de jeunes vignerons et négociants, confiants, épanouis, un verre à la main. Elle avait vu dans leur regard une incitation à la consommation, ce que la loi interdit. La cour suprême l'a suivie. Elle a estimé que cette publicité « visait à promouvoir une image de convivialité de nature à inciter le consommateur à absorber les produits vantés ».

Elle a cassé le jugement favorable au CIVB rendu quelques mois plus tôt par la cour d'appel de Paris et demandé à la cour d'appel de Versailles de rejuger l'affaire. Et là, surprise : les juges versaillais ne l'ont pas suivie ! Début avril, ils ont rendu un arrêt réjouissant énonçant que « les annonceurs ne peuvent pas être tenus, sous prétexte de satisfaire aux exigences légales, de représenter des professionnels grincheux ». Plus fort encore, la cour versaillaise affirme que « l'image donnée [dans la publicité du CIVB] de professions investies par des jeunes, ouvertes aux femmes, est pleinement en accord avec les dispositions légales autorisant une référence aux facteurs humains liés à une appellation d'origine ».

Serait-ce la fin d'une longue série de victoires pour l'Anpaa ? On l'espère. Car ces derniers temps, la justice est allée extrêmement loin dans son soutien aux menées prohibitionnistes de cette association qui veut faire inscrire, sur toutes les publicités, que l'alcool, et non plus l'abus d'alcool, est dangereux pour la santé. Il faut se rappeler qu'en 2013, le tribunal de grande instance de Paris a condamné « Paris Match » à sa demande.

Ce magazine avait publié un article expliquant que l'actrice Scarlett Johansson était la nouvelle égérie de la marque Moët et Chandon. Pour l'Anpaa, cet article tombait sous le coup de la loi Évin, car il associait une boisson alcoolisée à une personnalité valorisante. Le TGI de Paris a jugé, comme l'Anpaa, que la loi Évin s'applique aux articles de presse, même si elle a été prise pour régir la publicité. Une décision stupéfiante. Comme si l'on pouvait condamner des romans policiers parce que les crimes sont interdits ! Vin & société mène bataille pour faire changer cette loi. Un vent nouveau semble souffler en sa faveur.

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