Appliquée dans les règles, l'an dernier, la lutte contre l'eudémis et la cochylis par confusion sexuelle a enregistré de bons résultats dans la majorité des situations malgré une forte pression de tordeuses.
Lors de la mise en marché des diffuseurs il y a cinq ans, le fournisseur opposait une réponse prudente quant à l'efficacité de la technique dans des années à forte pression de vers de la grappe. En raison de la chaleur et de l'hygrométrie de son printemps, 1999 a pris valeur de test en se classant parmi les années records en la matière. 'Le seuil d'intervention de trente glomérules dénombrés pour cent grappes a été atteint dans 15 à 20% des parcelles suivies. Cela correspond au double de la normale' rappelle Isabelle Thévenet, technicienne du GIE Magister en Champagne.Dans cette région, le taux d'efficacité de la confusion sexuelle fut de l'ordre de 80%. En Alsace, on parle de 'résultats corrects dans l'ensemble' et d'autant meilleurs que la surface traitée fut grande et d'un seul tenant. Dans le Sauternais, 'la confusion sexuelle a tenu', affirme Jacques Stockel, de l'Inra de Bordeaux, alors que la multiplication des insecticides (4 à 7) contre l'eudémis n'a pas empêché certains châteaux de relever de très forts taux de grappes attaquées au mois d'août.L'année passée a cependant mis en exergue quelques problèmes ponctuels d'efficacité, sans pour autant que les produits classiques fassent mieux. En Champagne, en Val de Loire et en Alsace, ils ont été expliqués par un sous-dosage des diffuseurs ou une pose trop tardive, parfois les deux. 'Les groupements techniques restent mobilisés pour les comptages à chaque vol et pour l'aide à la pose', signale Isabelle Thévenet. En situation sensible dans le vignoble d'Anjou, une pose trop tardive par rapport à un vol précoce a obligé le traitement de certaines parcelles avec un insecticide en première génération, mais 'tout est rentré dans l'ordre pour la deuxième', signale un technicien. En Alsace, où l'on considère que la méthode est assimilée, les chambres d'agriculture et l'ITV vont arrêter leurs comptages en 2000. Mais la vigilance doit rester de mise. 'Les viticulteurs pensent que l'utilisation de la confusion sexuelle règle tout d'elle-même. Mais la surveillance des pontes doit se poursuivre afin de pouvoir positionner si nécessaire un insecticide de rattrapage' avertit Jean-Michel Speich, de l'Adar du vignoble en Alsace. La pratique oblige à constater que ce traitement n'est pas toujours effectué pour une question de coût.Reste le cas plus spécifique du Beaujolais. La confusion sexuelle a débouché sur des résultats très hétérogènes. Ils furent excellents contre la cochylis à Fleurie avec 95% d'efficacité malgré une pose tardive des diffuseurs. En revanche, ils furent décevants à Vaux où l'on n'a enregistré que 10 à 20% d'efficacité. Ces derniers scores laissent d'autant plus dubitatifs que la date de pose a été respectée et que le morcellement des surfaces et la présence de haies ont été pris en compte par l'augmentation à 635 (contre 500 normalement conseillé) du nombre de diffuseurs à l'hectare. 'A ce niveau, la concentration en phéromones dans l'air aurait dû être suffisante. La seule explication envisagée est l'extrême pression de la cochylis en début d'été qui a augmenté le nombre de rencontres dues au hasard', avance Caroline Le Roux, du Comité de développement du Beaujolais. Un éclairage complémentaire met l'importance des dégâts en rapport avec le fait que dans les parcelles mal protégées l'an dernier, la confusion sexuelle n'était appliquée que depuis deux ou trois ans, durée minimale pour qu'elle s'exprime pleinement. 'L'efficacité de la méthode se juge sur deux à trois ans au moins. C'est le temps nécessaire pour obtenir une baisse de la population', remarque Caroline Le Roux. Jacques Stockel confirme: 'En pratiquant une confusion sexuelle en permanence, la population d'eudémis diminue d'année en année jusqu'à atteindre un rythme de croisière. Mais l'arrêt de la technique conduit à un rétablissement de la population en deux ans.'Les déboires notés en 1999 ne remettent pas la méthode en cause tant les viticulteurs paraissent convaincus de son intérêt. Un peu partout, les surfaces traitées sont annoncées en hausse en 2000. En Champagne, elles passent de 4 600 à 6 000 ha. L'Alsace franchit le cap des 2 000 ha. Le Beaujolais (550 ha en 1999) persévère aussi. Le seul bémol est apporté par le Bordelais pour une raison indépendante de l'efficacité de la lutte. La nécessité de contrôler la cicadelle vectrice de la flavescence dorée rend indispensable les traitements insecticides. En théorie, la confusion sexuelle reste possible, mais au prix d'un surcoût qui fait reculer la majorité des intervenants.