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L'autorisation du propriétaire réel n'est pas indispensable

La vigne - n°110 - mai 2000 - page 0

L'Onivins a refusé d'accorder la prime d'arrachage définitif à un fermier n'ayant fourni dans son dossier que l'autorisation de son GFA bailleur, et non celle du réel propriétaire des terres. Le Conseil d'Etat lui a donné tort.

Le contentieux relatif à la prime d'arrachage est foisonnant. Un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 8 décembre 1999 en est un exemple. Depuis un règlement communautaire du 24 mai 1988, les exploitants viticoles peuvent bénéficier d'une prime d'abandon définitif (récemment cantonné à certaines régions), dont l'octroi entraîne la perte du droit de replantation. Le principe est clair. Mais que se passe-t-il si celui qui a la jouissance des vignes n'en est pas propriétaire? Un fermier souhaitant arracher contre la prime en a-t-il le droit?Selon le règlement, en son article 4, la prime n'est accordée que si le demandeur a, selon la législation nationale et au moment de la demande, le droit de disposer de la superficie en question (c'est le cas du propriétaire exploitant) ou s'il produit l'accord écrit du propriétaire de la superficie. Conformément à ce principe, l'Onivins, chargé de la constitution du dossier de prime exige l'accord écrit du bailleur, lorsque la demande émane du preneur. L'expérience nous enseigne que si, en principe, la prime est réservée à l'exploitant, le propriétaire exige une partie de cette prime pour donner son accord.Dans notre cas, les terres, propriété de M. X., ont été louées par bail emphytéotique à un groupement foncier agricole (GFA). Conformément à une pratique liée à de telles conventions, le GFA y a planté des vignes. Comme il en a le droit, par voie de sous-location, le groupement a consenti un bail rural sur les vignes et le fermier du GFA entend arracher et bénéficier de la prime.Juridiquement, le fermier n'a aucun lien de droit avec le propriétaire des terres. Son seul interlocuteur juridique ne peut être que son bailleur, le GFA. Aussi, lorsque l'Onivins lui demande de joindre à son dossier de prime, l'autorisation du propriétaire, il sollicite le GFA bailleur. Satisfaction obtenue, les éléments sont transmis à l'Onivins. Cependant, ce dernier rejette la demande de prime au motif que le propriétaire n'a pas accepté l'arrachage. C'est à partir de cette rupture que la juridiction administrative sera amenée à raisonner en droit rural. En effet, dans son recours contre le refus opposé par l'Onivins, le preneur soutient que 'le propriétaire de la superficie' est le GFA, titulaire du bail emphytéotique et bailleur des vignes.Le tribunal administratif rejettera la requête du preneur au motif que le GFA n'est pas le propriétaire de la superficie. Statuant comme juge d'appel, étant donné la date du jugement, le Conseil d'Etat se livrera à une analyse des droits conférés par l'article L 451-1 du code rural au titulaire d'un bail emphytéotique. Tenant que la conclusion d'un tel bail confère au locataire un droit réel susceptible d'hypothèque, et considérant que la notion de propriétaire de la superficie au sens de la réglementation communautaire s'apprécie 'par rapport à la législation nationale', il en conclura que l'emphytéote est propriétaire de la superficie et qu'ainsi, l'autorisation d'arrachage dépend de lui et non du propriétaire du sol. En conséquence, le Conseil d'Etat annulera le refus opposé par l'Onivins.Devant le Conseil d'Etat et à titre subsidiaire, le propriétaire du sol soutiendra qu'en donnant l'autorisation d'arrachage, l'emphytéote diminue la valeur du fonds contrairement aux dispositions de l'article L 451-7 du code rural. Il lui sera répondu que, même si pareil comportement de l'emphytéote peut justifier des dommages-intérêts au bénéfice du propriétaire, il n'entache pas d'erreur de droit la validité de l'autorisation accordée au fermier par l'emphytéote.On peut ajouter qu'un tel raisonnement du propriétaire aurait pu également se fonder sur le fait que dans le bail emphytéotique, le locataire est engagé à planter et à maintenir des vignes. Une telle argumentation se serait heurtée à un principe fondamental retenu par la jurisprudence: le propriétaire consentant un bail emphytéotique ne peut pas valablement imposer à l'emphytéote une destination particulière du bien loué (Cour de cassation du 13 mai 1998, BC 98-III, n° 101).Référence: Conseil d'Etat, 8 décembre 1999, affaire Renucci, n° 168 165.

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