Le passage aux 35 heures exige une réflexion approfondie sur la nouvelle organisation du travail afin de limiter la hausse des coûts de production et l'impact sur le revenu des salariés.
La durée légale du travail est passée de 39 à 35 h par semaine le 1 er janvier dernier pour les entreprises de plus de vingt salariés. Pour les autres, majoritaires dans notre filière, l'échéance est fixée au 1 er janvier 2002. L'objectif affiché par Martine Aubry est de créer des emplois selon le principe de la répartition : ceux qui ont un emploi travaillant moins, d'autres accèdent au marché du travail. Une attention louable dans le principe mais aux résultats contestés, certains estimant que les emplois créés actuellement résultent surtout de la croissance économique.Dans les entreprises de plus de vingt salariés, la réflexion est achevée ou en cours. Dans celles de moins de vingt salariés, deux attitudes s'affrontent. L'une consiste à attendre le dernier moment en se disant qu'il sera déjà bien assez tôt ; certains irréductibles espèrent d'ailleurs un miracle politique qui relèguerait cette loi (et pourquoi pas son auteur !) au rayon des mauvais souvenirs. D'autres, plus réalistes face à cette échéance inévitable, cherchent à négocier au mieux ce passage aux 35 h. Pour cela, il faut trouver le meilleur compromis entre les impératifs techniques et économiques de l'entreprise, et les attentes des salariés. Pour l'employeur, dans l'hypothèse la plus fréquente d'un maintien des salaires, la réduction du temps de travail (RTT) provoque un accroissement des coûts de production d'environ 11 %. Ce surcoût peut être en partie compensé par des allégements de charges, une réorganisation du travail par le biais de la modulation et donc la suppression des heures supplémentaires, comme nous le verrons dans ce dossier. Pour le salarié, l'avantage évident est de faire moins d'heures pour le même salaire. L'inconvénient est de voir disparaître les heures supplémentaires qui pouvaient constituer un appoint financier non négligeable. La concertation entre employeurs et salariés doit permettre de trouver le meilleur compromis face à une obligation légale de toute façon incontournable.Pour les entreprises de moins de vingt salariés, une autre réflexion porte sur l'intérêt ou non d'anticiper la RTT. Nous détaillons plus loin les aides et les contraintes pouvant accompagner cette anticipation. Mais un autre frein à la mise en place de cette loi vient de sa grande complexité sur certains points et de son flou. Cela inquiète les employeurs qui craignent de s'engager dans une démarche sans en connaître, ni en maîtriser tous les aspects. Inutile de cacher que cette opacité ne simplifie pas non plus la tâche des conseillers, des organisations professionnelles ou des cabinets privés. Malgré tout, leur aide est indispensable pour ne pas commettre d'erreurs grossières qui pourraient poser des problèmes ultérieurement ou compromettre l'accès aux aides. Enfin, les grands absents du passage aux 35 h sont, dans bien des départements, les services de l'inspection du travail, pourtant représentants sur le terrain du ministère à l'origine de la loi. Difficile en effet d'obtenir de leur part un avis précis et officiel sur certains points de la loi Aubry. Une attitude regrettable de la part de ceux qui sont censés conseiller et qui viendront demain contrôler la mise en oeuvre des 35 h dans les entreprises...