Les initiatives qui placent le vignoble au coeur de la stratégie de promotion des vignerons sont nombreuses et variées. Si elles attirent beaucoup de visiteurs, il est difficile d'évaluer leur impact sur les ventes.
'Les visites dans les caves, tout le monde en fait. C'est le plus simple. Dans les vignes, il n'y a jamais personne. Mais quand on y amène des gens, ils sont très intéressés. On dévie facilement sur autre chose que le vin. Les gens sont surpris d'apprendre le travail de la vigne, le temps passé à s'occuper d'1 ha. ' Ce constat est dressé par Jean-Claude Fournaise, vigneron à Lagery, près d'Epernay (Marne). Mais il aurait pu l'être en Alsace, en Bourgogne ou dans les Corbières, où d'autres vignerons ont choisi de jouer la même carte. Leurs offres prennent des formes multiples.Dans l'Aude, elles sont individuelles. A Talairan, Annie et Jean-Pierre Mazard sont parmi la douzaine de domaines qui proposent des week-ends à thème, organisés autour de l'hébergement dans leur gîte et d'un programme à la carte. ' Après un passage dans la cave, nous proposons une lecture du paysage à travers les orchidées sauvages qui bordent nos vignes. Sur place, on explique les sols, les cépages, le cycle de la vigne ', raconte Jean-Pierre Mazard. Au domaine de Fontsainte, à Boutenac, Yves Laboucarie programme sur demande des demi-journées de découverte de la vigne et de son environnement pour des groupes de dix à quarante personnes amenés de l'étranger par ses distributeurs. Ailleurs, ces initiatives adoptent un tour plus collectif. Les ' Flâneries champenoises ' réunissent depuis deux ans quatre vignerons proches d'Epernay. Pour 30 F par personne, chacun propose une prestation spécifique d'une durée de deux heures à date fixe à partir du mois de mai. ' J'ai la chance d'avoir des vignes accollées à l'exploitation. La visite est donc axée sur les soins de la culture. Elle se termine à la cave par une dégustation ', indique Claude Corbon, qui cultive 6 ha à Avize.A Ladoix-Serrigny (Côte-d'Or), les membres du syndicat viticole sont mobilisés chaque premier dimanche de juillet. Les départs de la ' Ballade gourmande ' (200 F/personne), à travers le vignoble de la commune (155 ha), s'échelonnent entre 10 h 30 et 14 h 30. Le parcours fléché est ponctué de quatre postes de restauration où l'on peut associer à chaque plat un vin (aligoté, ladoix blanc, ladoix 1 er cru, corton) de chacun des dix-sept participants. Pour maîtriser une manifestation lancée il y a cinq ans, les organisateurs ont défini un quota de réservations par entreprise. La dernière édition a accueilli 2 700 convives. En Alsace, chaque lundi de Pentecôte, le Synvira (Syndicat des vignerons récoltants d'Alsace) chapeaute le pique-nique du vigneron et soutient l'opération avec un budget promotionnel (120 000 F en 1999, 50 000 F en 2000), consacré à la diffusion de messages dans la presse et sur les ondes. La recette est simple : les participants apportent leurs repas, le vigneron fournit l'infrastructure, les vins et assure l'animation dont une promenade digestive dans son vignoble. Cette année, les trente-huit maisons participant au pique-nique ont vu défiler quelque 5 000 personnes, autant que l'an passé. Ce succès incite à étudier la faisabilité d'une journée ' Vendanges chez le vigneron ' à l'automne 1999. Régulières ou ponctuelles, ces rencontres avec la vigne séduisent. Pour Yves Laboucarie, le vigneron a tout intérêt à montrer son outil de travail car ' la connaissance précise du site géographique où naît un vin rapproche les gens du produit final '. La remarque vaut pour l'ensemble d'un public éclectique, composé d'amateurs de vin, de touristes, de clients récents ou de longue date. Face à un tel auditoire, ' on ne peut rien préparer. Il faut être prêt à répondre à tout ', déclarent tous les vignerons. La majorité d'entre eux sont motivés au premier chef par la promotion de leur appellation. ' Notre objectif est de faire connaître Ladoix, de cibler des clients qui peuvent en ramener d'autres. La vente n'est pas le but ', note Claude Chevalier, président du syndicat viticole de Ladoix. ' C'est une journée de détente. Nous ne voulons pas en faire un moment de vente ', enchaîne François Sorg, à la tête de 10 ha à Eguisheim (Haut-Rhin). S'il n'est pas prioritaire, l'impact commercial immédiat est fréquemment palpable. ' L'achat termine presque chaque visite ', reconnaît Claude Corbon. ' Le plus souvent, on achète pour soi ou pour des amis. C'est la meilleure promotion, celle qui revient le moins cher ', commente Jean-Pierre Mazard. Au lendemain de la Pentecôte 2000, le Synvira a essayé de chiffrer les ventes de la journée. Selon son enquête, quelque 20 000 bouteilles ont été écoulées. ' Je ne suis pas accroché aux statistiques de vente. S'il y a des retombées, c'est sur le long terme ', avance François Sorg. Un avis partagé. ' Consacrer une heure et demie à deux-trois personnes, c'est beaucoup de temps et c'est payant à long terme. Une fois que l'on a expliqué la vigne et ce qui fait le prix d'une bouteille, les gens reviennent ', raconte Jean-Claude Fournaise.