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Le travail du sol, une affaire de conviction

La vigne - n°116 - décembre 2000 - page 0

Les vignerons retournés au travail du sol ont vu leurs charges s'envoler.

Michel Gendrier n'a pas hésité à reprendre la pioche. Il a renoncé, en 1999, à tout herbicide sur son domaine de 30 ha situé à Cour-Cheverny (Loir-et-Cher). Il s'est remis à cultiver le rang qu'il entretenait avec une application printanière de prélevée complétée, en été, d'un passage de postlevée. Il s'est engagé dans la voie de la culture biologique, mais il n'a pas abandonné ses exigences quant à la tenue de ses vignes plantées à 2,10 m d'écartement. ' Je veux que ce soit très propre, explique-t-il. Je ne veux pas voir une herbe qui monte à graine. Alors, il faut fignoler et compléter à la main. ' Son intercep n'atteint pas les adventices qui poussent contre le pied des vignes. Pour parfaire le travail de l'outil, il passe une fois par an avec sa pioche, avant le mois de juin, ou avant l'été.La remise en culture des rangs a eu d'autres conséquences. ' On passe plus d'heures sur le tracteur car, avec la décavaillonneuse, cela va moins vite. ' Michel Gendrier butte et débutte deux fois par an, ce qui fait quatre passages pour l'entretien du rang. Entre les rangs, il en fait autant. Les débuttages sont combinés au griffage de l'interrang. Cette partie du vignoble, il l'a toujours entretenue mécaniquement, ce qui le contraignait à déchausser tous les cinq à sept ans pour éviter que des pieds s'affranchissent. Les ceps étaient habitués au passage d'un outil et peu ont souffert du fait qu'il devienne annuel. Michel Gendrier constate que sa nouvelle orientation a alourdi ses coûts de production, mais il n'a pas fait précisément ses comptes. Olivier Lecomte a fait les seins. Depuis l'automne 1998, il reconvertit à l'agriculture biologique les 65 ha du château de Passavant, dans les coteaux du Layon. Auparavant, certaines parcelles étaient intégralement désherbées, d'autres en partie enherbées. Il a dû acheter des outils de travail du sol sur le rang et entre les rangs. ' Si je compte tout, l'amortissement, l'usure des pièces, les temps d'entretien et de conduite, cela me coûte 3 200 à 3 500 F/ha, calcule-t-il. Avant, j'en avais pour 600 F/ha d'herbicides. Au total, il faut compter 200 000 F de charges en plus. Pendant six mois, de mars à début août, deux employés ne font que ça. Avant, en douze jours, on désherbait tout. Maintenant, il suffit de finir un carré pour que l'herbe repousse dans votre dos. ' Les rangs sont distants de 1,8 à 2 m. Pour nettoyer au plus près des pieds de vigne, Olivier Lecomte demande à ses employés de passer avec un intercep hydraulique, puis de suivre immédiatement avec une cure-cep, appareil constitué d'une lame maintenue par un ressort. Cette dernière touche le bois, ce que l'outil hydraulique ne pourrait pas faire sans lui causer de graves dégâts car il est animé par un moteur. Malgré ces précautions, un complément manuel est nécessaire, surtout à l'entrée des rangs. Olivier Lecomte attribue cette forte pression des adventices au climat humide des deux dernières années. Il estime que lors d'années normalement pluvieuses, elles devraient s'arrêter de pousser vers le 20 juin. La lutte s'en trouverait écourtée et allégée. Nos vignerons rencontrent également des problèmes de portance. Au château de Passavant, on a réembauché des porteurs de hotte. Un tracteur portant une cuve les avait remplacés. Cette année, il n'a pas pu pénétrer dans les parcelles. Fin novembre, Michel Gendrier n'avait pas encore eu l'occasion de butter ses rangs comme il l'avait prévu. Ses sols étaient trop trempés pour qu'il y entre. L'amoindrissement de la portance et l'augmentation des coûts sont les deux principaux obstacles au retour du travail du sol. Les vignerons qui pratiquent ou se convertissent à l'agriculture biologique ont peu de moyens de les contourner. Ils estiment que c'est le prix à payer pour revenir à un mode de production plus naturel. Ceux qui n'ont pas renoncé aux herbicides peuvent combiner les techniques pour atténuer les défauts de chacune. En Bourgogne, il est courant que des domaines commencent la saison par des façons superficielles et qu'en juin, ils appliquent une dose réduite d'herbicide. Ainsi, la terre a le temps de se raffermir. Lorsqu'on intervient après un orage d'été, elle a retrouvé une portance équivalente à celle d'un sol qui n'est pas cultivé. Une autre façon de diminuer les risques consiste à travailler une partie du domaine et à désherber le reste.

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