Cinq nouvelles matières actives seront mises sur le marché au cours des deux prochaines campagnes. Elles améliorent l'efficacité ou la sécurité des traitements. Leur cadence d'emploi n'a pas à être abaissée en conditions difficiles.
Le fenomen arrive. Annoncé depuis trois ans, il sera commercialisé à partir de ce printemps au sein de deux fongicides exclusivement antimildious. L'un l'associe au fosétyl al, l'autre le mêle au cymoxanil. Le premier est vendu sous le nom de Verita ou d'Elicio. Aventis recommande de l'employer tous les 12 à 14 jours et annonce un coût de traitement voisin de 270 F/ha. Le second s'appelle Arte ou Duo Fast. Il s'applique tous les 10 à 12 jours et vaut environ 220 F/ha. Trois autres fongicides à base de fenomen, encore appelé fénamidone, arriveront l'an prochain : avec du cuivre, du folpel, du fosétyl al et du cymoxanil.Verita et Arte occupent le haut de la fourchette de prix dans leur catégorie. Aventis justifie sa politique tarifaire par ses frais de recherche et soutient que ses produits apportent un supplément de sécurité et d'efficacité. Leur cadence d'utilisation souffre peu des aléas climatiques. Arte-Duo Fast tient 10 à 12 jours quelle que soit l'agressivité du mildiou. Sur ce plan-là, il est équivalent à l'Equation pro et au Quadris, mais supérieur à tous les curzates (pénétrants à base de cymoxanil et d'une matière active de contact). Le Verita résiste 12 jours, lorsqu'en conditions dures, les autres systémiques à base de fosétyl al ou d'un anilide doivent être renouvelés au bout de dix jours. Les deux nouveaux produits ont d'autres atouts. Selon l'Inra de Bordeaux, ' ils présentent une activité antisporulante remarquable, significativement supérieure à celle des meilleurs traitements de référence ' qui, dans les essais, impliquaient le Valiant flash, le Quadris duo et l'Acrobat M. L'Inra observe également que leurs performances curatives sont supérieures à celles des fongicides associant le fosétyl al ou le cymoxanil à une matière active de contact. On est plus assuré de réussir un traitement après une pluie survenant en fin de rémanence. Malgré cela, on obtiendra de meilleurs résultats à la suite d'applications préventives. Par ailleurs, ceux dont les vins sont susceptibles d'être exportés vers les Etats-Unis devront arrêter la fénamidone après le début de la nouaison. Aventis garantit qu'ils n'auront alors aucun résidu dans leurs vins. La firme lèvera cette restriction lorsqu'elle aura obtenu une tolérance d'importation. Verita et Arte ont été précédés par Eperon, de Novartis, homologué dès octobre. Il s'agit d'une version rajeunie et repositionnée de l'Acylon. Elle résulte, en effet, d'un nouveau procédé de fabrication du métalaxyl qui n'en retient que l'isomère actif, appelé méfénoxam. Le métalaxyl était un mélange, en parts égales, de deux substances de même composition chimique, dont l'une seulement détruit le mildiou. Dans son imposante communication de lancement, Novartis ignore ce lien de filiation. Certains lui en font le reproche, estimant qu'il s'agit-là d'un manque de transparence visant à faire passer pour nouveau ce qui ne l'est pas vraiment. La firme s'en défend. Elle a pris ce parti pour marquer la rupture avec le positionnement d'Acylon : plus de cadence à 14 jours, plus d'applications en encadrement de la floraison. L'Eperon s'utilise dès le premier traitement antimildiou et se renouvelle au bout de 10 jours. Après un maximum de trois passages, on passe à autre chose et, durant le reste de la saison, on n'emploiera pas d'autre anilide, car le méfénoxam en est un.Aucune firme n'avait encore exclusivement revendiqué le début de campagne pour l'un de ses fongicides. Novartis s'y risque à un moment favorable. Les vignerons débutent de moins en moins avec des produits de contact. Ils leur préfèrent les pénétrants ou les systémiques à base de fosétyl al. Eperon a des arguments pour s'inscrire dans ce mouvement. Il protège les pousses nées après un traitement, car le méfénoxam y migre. Du fait qu'il renferme du mancozèbe, il agit contre le black-rot et le brenner. Sa cadence est fixe quelles que soient les conditions climatiques. Et fin avril-début mai, il ne rencontrera aucune souche résistante. Le tout pour 210 F/ha, soit un prix voisin des solutions comparables. Une autre raison a sans doute guidé Novartis : la concurrence s'annonce de plus en plus rude sur la période de l'encadrement de la floraison. L'an prochain, trois nouvelles matières actives devraient venir l'attiser. L'une d'elle sera la seconde strobilurine de BASF : la pyraclostrobine (nom de code BAS 500 F). La firme l'a présentée lors de la sixième conférence internationale sur les maladies des plantes, à Tours, du 6 au 8 décembre 2000. Elle a donné des résultats d'essais fracassants qui laissent entrevoir de grandes ambitions commerciales : ' En situation d'infestation naturelle, la protection est quasi totale. Dans les essais où la pression parasitaire a été renforcée par des contaminations artificielles, les performances dépassent celles des meilleures références. ' La référence en question est Mikal. Selon les chiffres fournis par BASF, à la cadence de 14 jours, il protège moins bien les grappes que 100 g/ha de pyraclostrobine. La société ajoute que sa matière active possède un pouvoir curatif supérieur à celui de l'azoxystrobine ou du cymoxanil. Voilà contre le mildiou. Car ce n'est pas tout. A raison de 50 g/ha, la pyraclostrobine combat mieux l'oïdium que Corail. A raison de 75 g/ha, elle dépasse l'Olymp contre le black-rot. Elle contrôle aussi bien le brenner et l'excoriose que le mancozèbe. Malgré son large spectre, la matière active ne sera pas vendue seule mais associée. BASF veut ainsi prévenir l'apparition de souches résistantes. Ses fongicides seront-ils aussi performants que la pyraclostrobine seule ? ' Oui ', répond la firme, car le partenaire viendra s'ajouter à la strobilurine, dont le dosage sera maintenu à 100 g/ha. A moins d'antagonismes chimiques, on ne voit pas comment le mélange pourrait être inférieur au meilleur de ses composants. Sa principale cible sera le mildiou qu'il tiendra en respect à la cadence de 14 jours.Contrairement aux sociétés précédentes, Bayer et Rohm and Haas prévoient d'introduire des matières actives au mode d'action inédit. Ce sera l'iprovalicarbe pour l'Allemand et le zoxamide (ou zoxium) pour l'Américain. Toutes deux s'intègreront dans les programmes pour réduire le risque de sélectionner des souches résistantes. La première de ces substances est déjà commercialisée dans son pays d'origine, au sein d'un fongicide qui l'associe au tolylfluanid. En France, elle devrait apparaître l'an prochain dans trois mélanges différents : avec du mancozèbe, du folpel ou du cuivre. Leur cadence d'emploi sera de 10 à 12 jours. Bayer promet une action curative très intéressante, un effet antisporulant et une efficacité sur feuilles et sur baies supérieure à celles des pénétrants à base de diméthomorphe ou de cymoxanil et de mancozèbe. L'iprovalicarbe est systémique. Toutefois, il ne faudra pas l'employer plus de trois fois par an. Le zoxamide agit préventivement. Il bloque l'élongation des tubes germinatifs des spores. En revanche, il est peu efficace aux autres étapes du cycle du mildiou. Il n'est donc ni curatif, ni antisporulant. Il ne sera pas vendu seul mais associé au mancozèbe. Rohm and Haas a présenté quelques résultats d'essais lors de la conférence de Tours, qui attestent d'une efficacité comparable à celle d'Equation pro ou de Panthéos à la cadence de 10 jours. La firme a commandé à l'Inra de Bordeaux des tests de résistance au lessivage. Ces derniers montrent que le fongicide encaisse 50 mm de pluie sans que son efficacité s'en trouve affectée. Pour l'instant, elle reste discrète sur les préconisations d'emploi et le positionnement de son produit, dont elle a confié la vente à Philagro.