Après de longues années de mise au point, les premières sondes de densité devraient être commercialisées cet automne. Elles seront précédées d'une canne réfractométrique.
Stagiaires, une page se tourne. Vous, à qui l'on confie une éprouvette et un densimètre dès que vous franchissez le seuil d'un chai, sachez que vos relevés sont en passe d'être automatisés. L'appareil le plus original sera sans doute celui de Jean-Louis Bouillet, un ingénieur conseil de la région bordelaise (Léognan). Il repose sur un principe utilisé depuis longtemps dans l'industrie pétrolière. Il prélève un échantillon de moût et l'amène dans un boîtier extérieur à la cuve. Là, se trouve le dispositif de mesure : un tube vibrant. Ainsi, aucune partie sensible ne plonge dans le moût. Pour Jean-Louis Bouillet, c'est la seule manière de préserver les instruments du tartre et des coups qu'on risque de leur porter à l'occasion de délestages ou de pigeages.Son OEnoscan se visse sur une cuve que l'on perce pour laisser pénétrer une tige en Inox de 40 cm de long. Au bout de cette tige, une tête s'ouvre au moment de prélever l'échantillon. Le reste du temps, elle est fermée de manière étanche. Lors du prélèvement, une pompe aspire un soupçon de moût et l'envoie dans le boîtier où il est filtré et dégazé, après quoi sa densité et sa température sont mesurées. Une fois ces informations acquises, l'appareil se nettoie à coup d'eau claire et d'air comprimé. Une heure plus tard, il est prêt pour un autre prélèvement. Jean-Louis Bouillet a trouvé dans le commerce tous les organes de son OEnoscan, sauf la tête de collecte qu'il a conçue et brevetée. ' Elle est imbouchable ', assure-t-il. Et elle ouvre de multiples perspectives. ' A terme, on mesurera la quantité d'oxygène dissout ou le pH. Il suffira d'ajouter les instruments adéquats dans le boîtier. ' Cet automne, il installera trois appareils dans autant de chais, histoire d'en achever la mise au point. Après cela, il les vendra entre 8 000 et 10 000 F HT. Outre le système de prélèvement et d'analyse, ce prix comprend un afficheur et un système bus des informations vers un ordinateur. Les autres densimètres en préparation s'immergent dans le moût pour calculer la poussée qui s'exerce sur un ballon. Deux sociétés ont retenu ce principe : Brunet Ertia à Maraussan (Hérault) et Garneret Bernard à Ladoix-Serrigny (Côte-d'Or). La seconde a déjà prévu l'arrivée de son instrument. Elle vend depuis deux ans un boîtier de régulation de la température de fermentation appelé Dionysos. Il possède une prise pour raccorder le futur densimètre et l'électronique pour traiter le signal qu'il émettra. Cependant, là encore, d'ultimes mises au point sont nécessaires. Elles devraient déboucher sur la sonde la moins chère du marché : environ 3 000 F. Elle sera destinéee au Dionysos. Ainsi équipé, il pourra sonner l'alerte en cas d'arrêt de fermentation ou laisser la température s'élever une fois que la densité aura chuté en dessous d'une valeur. Un second modèle destiné à toutes les installations suivra. Il coûtera plus cher, mais devrait rester très compétitif. ' Nous visons les petits domaines et nous souhaitons qu'ils équipent toutes leurs cuves. Pour cela, il faut proposer des prix attractifs ', explique Bernard Garneret, le patron de sa société. Chez Brunet Ertia, une autre sonde est prête. Elle repose également sur la mesure de la poussée d'Archimède. La société l'a déjà présentée lors de salons. Pourtant, elle ne l'a pas encore vendue. ' Nous n'avions pas le logiciel de pilotage des fermentations correspondant ', affirme Michel Blain, le directeur commercial. C'est presque chose faite. Brunet Ertia le testera dans plusieurs caves lors des prochaines vendanges. Si les résultats s'avèrent concluants, ce sera l'aboutissement de dix années de recherches. Le densimètre sera alors vendu autour de 7 000 à 8 000 F hors taxes et il faudra compter 12 000 à 14 000 F HT pour équiper une cuve d'un système complet incluant le contrôle de la température et le suivi de la densité. Api Electronique, à Castanet-Tolosan (Haute-Garonne), a devancé ces trois sociétés. Quelques distributeurs commercialisent depuis peu sa canne réfractométrique Renuvia primée lors du dernier Vinitech. Contrairement aux autres sondes, elle ne s'installe pas à poste fixe et ne mesure pas la densité mais la richesse en sucre. Avec elle, on passe de cuve en cuve. Lors de chaque plongeon dans un moût, elle transmet la température et la richesse en sucre à un organiseur de marque Psion. Cet ordinateur que l'on tient dans sa main consigne aussi la date et l'heure du relevé.Son tour de chai terminé, le vinificateur raccorde l'organiseur à son ordinateur de bureau. Il bascule alors les données de l'un vers l'autre avec le câble et le logiciel fournis par Api Electronique. La société affirme que le transfert est immédiat vers des fichiers Excel. Il est possible vers tous les logiciels de supervision des fermentations prévus pour rapatrier des données sous ASCII, un standard informatique. La canne Rénuvia est précise au g/l de sucre près, ce qui représente moins de 0,1 % de volume d'alcool. Pour vérifier qu'elle fonctionne bien, il suffit de la tremper dans l'eau. Si elle n'indique pas zéro, il faut la renvoyer à son revendeur afin qu'il la réétalonne. Sauf accident, cela ne devrait pas arriver. La canne et ses accessoires coûtent cher : 30 000 F HT. Api Electronique affirme que ce prix n'est pas excessif compte tenu du service rendu, de la complexité et de la fiabilité de son système. Très rapidement, ce fabricant d'instruments de mesure devrait ajouter à sa canne une sonde à poste fixe, elle aussi réfractométrique. Il prévoit de le faire après d'ultimes mises au point cette année. Elle sera accompagnée d'un logiciel de pilotage des fermentations. Lorsque son oeil sera couvert de tartre, il avertira l'utilisateur qu'il est temps de le laver. Stagiaires, ce sera à vous de le faire !