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Des connaissances encore limitées

La vigne - n°125 - octobre 2001 - page 0

L'esca, maladie de la vigne déjà décrite par Pline l'Ancien, reste pourtant encore mal connue.

L'esca fut longtemps considérée comme un déclin physiologique des vieilles vignes. C'est seulement à la fin du XIX e siècle que Louis Ravaz évoqua son origine fongique. On sait aujourd'hui que derrière le même nom se sont cachées, pendant des années, au moins deux maux distincts, l'esca et le Black dead arm. Mais les connaissances sur ces maladies ont surtout progressé durant ces quinze dernières années.
En 1987, Philippe Larignon et Bernadette Dubos, à l'Inra de Bordeaux, suggèrent qu'un cortège de champignons intervient dans cette dégradation du bois. Pour eux, deux processus existent. Le premier fait intervenir au moins trois champignons, Phaeoacremonium aleophilum et Phaeomoniella chlamydospora (nommé auparavant Phaeocremonium chlamydosporum), dont les interventions semblent nécessaires à l'installation de Fomitiporia punctata (ancien Phellinus punctatus), qui provoque la nécrose claire caractéristique de l'esca.
Eutypa lata, agent de l'eutypiose, intervient dans le second processus et prépare le terrain pour Fomitiporia punctata. Des chercheurs italiens ont cependant montré que ce dernier pouvait aussi intervenir seul, sans l'aide d'agents pionniers, et provoquer des nécroses claires dans le bois. Mais il doit être associé aux autres pour que la vigne extériorise tous les symptômes de l'esca.
Ces champignons sont les plus fréquemment isolés en Europe et en Californie. Mais d'autres peuvent intervenir, comme Stereum Hirsutum , longtemps considéré comme l'un des principaux responsables de cette maladie du bois, mais isolé dans seulement 5 % des pieds dépérissant. Quant au Black dead arm, il est dû à l'intervention de champignons du genre Botryosphaeria (lire La Vigne n° 114).
La biologie de tous ces pathogènes est encore mal connue. On sait par exemple que Phaeomoniella chlamydospora et Fomitiporia punctata peuvent s'introduire dans le cep via les plaies de taille, mais pas Phaeoacremonium aleophilum. ' Comme pour Botryosphaeria, on ne sait pas encore comment il pénètre dans la plante ', indique Philippe Larignon.

D'autre part, et c'est plus préoccupant, ces champignons ont été isolés dans des bois d'un an, et même dans du matériel végétal destiné aux pépinières. Il peut donc y avoir une propagation de la maladie par les plants. Les champignons peuvent être présents dans le bois sans provoquer de dommages visibles à leur hôte. Des sondages, réalisés à l'occasion d'arrachages de parcelles dans le Bordelais, montrent un pourcentage de maladie potentielle entre 60 et 80 % pour des vignes âgées de 15 à 25 ans ! La situation serait similaire à Cognac. Une caractéristique de l'esca est d'ailleurs que des vignes montrant des symptômes typiques une année, n'expriment pas forcément la maladie l'année suivante. Les conditions climatiques du millésime jouent un rôle important dans l'extériorisation des symptômes.
Pour combattre l'extension de la maladie, le vigneron n'a plus à disposition que des mesures prophylactiques : repérer les ceps malades, les arracher, les brûler et enlever les bois de taille. Des chercheurs italiens conseillent aussi de tailler séparément les pieds infestés. ' Mais aucune étude n'a démontré que la maladie progressait par les outils de taille ', précise Philippe Larignon. Avant l'apparition des premiers symptômes, il est habituellement conseillé, pour éviter les contaminations, de tailler tard et de limiter le nombre et la surface des plaies de taille. L'Escudo, badigeonné sur ces plaies, n'a qu'un effet préventif et n'agit pas sur tous les agents pathogènes. Il faut rappeler que les champignons responsables de l'esca ne pénètrent pas tous par les plaies de taille.
Des essais sont en cours pour estimer l'efficacité de fongicides déjà sur le marché. Le mancozèbe, les benzimidazoles, quelques triazoles ou le fosétyl Al donnent des résultats encourageants in vitro. Dans les mêmes conditions, le tolyfluanide serait, d'après Bayer, efficace à la même dose sur tous les champignons de l'esca aujourd'hui identifiés. Mais l'efficacité en plein champs reste à démontrer. Enfin, des essais sont en cours pour juger de l'intérêt d'utiliser des trichoderma dans la lutte préventive contre ces maladies de dépérissement.

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