Une étude de la MSA, dévoilée cet été, conclut que même bien protégé, le vigneron peut être exposé à l'arsénite de sodium, produit toxique.
L'arsénite de sodium est resté sur le devant de la scène durant tout l'été. Utilisé depuis plus de cent ans, ce vieux produit a traversé le XX e siècle, reconduit d'homologation en homologation, alors que sa toxicité pour l'homme et l'environnement est connue depuis longtemps. Il n'y a qu'à ouvrir un index phytosanitaire pour en être persuadé. Manipulé par des générations de vignerons, l'arsénite ne répond plus aux normes actuelles. Trop toxique, il aurait dû être interdit à partir de 2003. Certains ont évoqué un moment que, seul rempart face à l'esca, il aurait pu être maintenu en demandant à l'Union européenne une dérogation pour usage mineur. ' Une telle dérogation n'aurait jamais pu être accordée à un cancérogène avéré, la réglementation ne le permet pas. Je ne sais pas pourquoi les firmes ont, un temps, évoqué cette possibilité ', assure Jean-Pierre Grillet, à la MSA. C'est justement une étude de la Mutualité sociale agricole, rendue publique cet été, qui a précipité la destinée de ce fongicide bien particulier. En effet, elle conclut qu'il est impossible d'éviter tout contact avec l'arsénite de sodium lors des traitements d'hiver. Le 23 juillet, le comité d'homologation des produits antiparasitaires préconisait alors une mesure de retrait du marché des préparations à base d'arsénite, et recommandait un arrêt, sans délai, de l'écoulement des stocks, afin d'éliminer immédiatement tout risque pour l'opérateur. Ces stocks devaient être récupérés, solidifiés, puis enfouis dans des mines de sel, l'arsenic étant indestructible. Face à des stocks représentant les deux tiers d'une année d'utilisation, les firmes phytosanitaires proposaient de permettre, une dernière fois, l'application d'arsénite de sodium, en prenant toutes les mesures de sécurité nécessaires.
Aujourd'hui, une seule chose est sûre : l'arsénite va être rapidement et officiellement interdit, mais on ne sait toujours pas ce que vont devenir les stocks. Programmée au début, puis à la fin du mois de septembre, la décision du ministre de l'Agriculture a été une nouvelle fois repoussée. Au début, la majorité des professionnels prévoyait que les stocks ne pourraient pas être utilisés. A la fin du mois, des voix, certes peu nombreuses, avançaient qu'une ultime utilisation serait possible. Mais à l'heure où nous écrivons ces lignes, la décision du ministre de l'Agriculture n'est pas connue et l'interdiction du produit n'est toujours pas officielle.
Alors que le ministère prenait son temps pour trancher, les distributeurs se sont empressés, cet été, de se débarrasser de leurs stocks auprès des vignerons, avec parfois des opérations promotionnelles ! ' S'il y avait une décision à prendre, il fallait la prendre vite et ne pas laisser planer le doute tout l'été , juge un professionnel. Aujourd'hui, les stocks sont chez les vignerons. Va-t-on leur demander de rapporter le produit dans leur mairie ? Ce n'est pas réaliste, et on ne pourra pas les empêcher d'utiliser de l'arsénite de sodium une dernière fois. '
Il est probable que le ministre décide enfin du devenir des stocks entre le moment où nous écrivons ces lignes et l'expédition de votre revue La Vigne . Mais si, à nouveau, il reporte sa décision et laisse traîner ce dossier, l'hiver sera vite là et les ultimes traitements à base d'arsénite de sodium auront permis aux stocks de fondre comme neige au soleil.