Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 2001

Les attentats inquiètent la filière française du vin

La vigne - n°127 - décembre 2001 - page 0

En valeur, les Etats-Unis sont notre deuxième client à l'export. La filière française est soucieuse de l'incidence des attentats sur la consommation de vin.

Après avoir frappé les Américains dans leur chair, les attentats survenus le 11 septembre font ressentir leurs effets dans la vie économique outre-Atlantique. Or, lorsque le marché américain toussote, toute l'économie occidentale s'enrhume. Le bilan 2000 des exportations françaises de vins et de spiritueux place ce pays en tête de nos clients.
Si l'on ne s'attache qu'aux livraisons de vins, cette destination représente 6,2 milliards de francs (deuxième marché après le Royaume-Uni) et 1,1 hectolitre (cinquième position). Le champagne arrive au premier rang de l'offre française, avec 42 % de parts de marché en valeur. ' En temps normal, nous exportons 20 millions de bouteilles vers les Etats-Unis. Cette année, nous nous attendons à 12 millions au maximum ', déclare Daniel Lorson, du CIVC (Comité interprofessionnel du vin de Champagne). Certes, ce marché était déjà déprimé avant les attentats. A la fin du mois d'août, le cumul sur huit mois des exportations champenoises accusait un recul de 30 % en volume par rapport à la même période précédente. Les grandes maisons n'ont pas eu le temps d'assainir la situation provoquée par le surstockage de l'année 2000, et elles sont confrontées à une consommation en berne, à quelques semaines des fêtes de fin d'année, période habituellement favorable à l'achat d'effervescents. Sur la Côte Est, où se trouvent les plus gros consommateurs de vin et où les attentats ont eu lieu, ouvrir une bouteille de champagne est, vu le contexte actuel, un peu déplacé. Les Etats-Unis, deuxième plus important marché à l'exportation pour le champagne, risquent d'être devancés par l'Allemagne.

Trois jours après les attentats, la filière champenoise a mis en place une cellule de veille. ' Pour l'instant, c'est surtout la consommation hors domicile qui est touchée ', explique-t-on au CIVC. La psychose du terrorisme pousse la population à délaisser les restaurants, les pubs et autres discothèques. Ces propos sont confirmés par Emmanuel Drion, directeur d'Inter-Rhône, pour lequel ' il n'y a malheureusement pas de transfert d'achats entre la consommation hors domicile et celle à domicile '. Pour l'instant, cette dernière reste stable.
Face à une demande en suspens, les importateurs restent prudents. Plusieurs opérateurs ont dû faire face à des reports de commandes.
Selon un récent rapport de l'Organisation de la coopération et du développement économique (OCDE), ' le choc du 11 septembre a amplifié l'incertitude face à l'avenir, provoquant une nette réticence à prendre des engagements pour le futur ', ce qui ' inhibe la dépense de tous les ménages '. Certains analystes craignent un regain de patriotisme jusque dans les actes d'achats, ce qui conduirait les Américains à préférer un vin domestique à un vin étranger.
A Bordeaux, l'interprofession a changé son plan média prévu tout au long du mois de septembre. ' Nous avions lancé une opération de promotion dans une trentaine de restaurants new-yorkais, dont deux situés dans les tours , explique Marie-Claude Delaveau-Fontanne, du marketing export. Après les attentats, nous avons adopté une communication de crise et fait paraître un visuel spécifique dans la presse (voir La Vigne économique de novembre). '

Dans le Beaujolais, des opérateurs exportateurs de vins nouveaux aux Etats-Unis ont été gênés par la nouvelle logistique (les bouteilles ont dû être livrées plus tôt aux aéroports) et par une augmentation des coûts du fret. En Bourgogne, la traditionnelle vente des Hospices a été marquée par un recul sensible des cours. Certes, l'événement a été bien accueilli par les professionnels soucieux de voir les prix monter depuis 1993. Il reste que des acheteurs étrangers, notamment américains, n'ont pas fait le voyage cette année. Selon Antoine Jacquet, le directeur des Hospices, cette absence ' a pu jouer sur le résultat des enchères '.
Ce point met l'accent sur une conséquence indirecte des attentats : la baisse du tourisme, relevée dans le rapport de l'OCDE. La moindre fréquentation des visiteurs en France aura également un impact sur le secteur viticole, même s'il est difficile d'en mesurer l'importance pour l'instant. Les experts de l'organisation internationale notent que ' les coûts de transaction devraient être considérablement alourdis en raison du renforcement des mesures de sécurité qui plombent les coûts des transports '. Là encore, attention aux mauvaises surprises à venir...


Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :