Les Alsaciens ont eu la satisfaction de voir les cours du sylvaner et du riesling poursuivre leur redressement sur le marché du vrac. Lors de la campagne 1998-1999, ces cépages avaient touché le fond, le premier à 106,70 euros/hl (700 F, prix moyen de campagne) et le second à 137,20 euros/hl (900 F). En 2000-2001, ils se sont vendus respectivement 129,70 euros/hl (851 F) et 146,50 euros/hl (961 F). Cette hausse se poursuivait au cours des premiers mois de la nouvelle campagne. En octobre 2001, le sylvaner s'échangeait, en moyenne, à 143 euros/hl (936 F) et le riesling à 159 euros/hl (1 046 F). Leur progression s'explique par une contraction de l'offre. Les arrachages de sylvaner ont continué. Ce cépage ne représente plus que 13 % de l'encépagement, contre 15 % il y a cinq ans. Par ailleurs, l'Association des viticulteurs d'Alsace (Ava) a abaissé le rendement butoir du riesling de 100 à 88 hl/ha, ce qui correspond au rendement de l'appellation générique Alsace pour 2001. Jusqu'à présent, les vignerons pouvaient récolter jusqu'à 100 hl de riesling, à condition de rentrer une quantité de sylvaner et de pinot blanc calculée de manière à ne pas dépasser les 88 hl de moyenne par exploitation.
Une nouvelle discipline est également appliquée dans plusieurs grands crus. Quatorze sur cinquante ont renforcé leurs règles de production (degré minimum, rendement) comme les y autorise le décret paru en janvier, qui ouvre la voie à la gestion locale de ces terroirs. Cependant, dans l'appellation Alsace, la discipline de production reste parfois encore lâche. ' En 2001, il y a eu des rendements déconnectés de ce qu'il est permis d'attendre d'une parcelle figurant dans l'appellation d'origine ', déplore Gérard Boesch, le président de l'Ava. Pour mettre fin à ces excès, depuis deux ans le conseil d'administration du syndicat visite des ' parcelles repérées ' afin d'y vérifier le respect des règles de taille. Il ne baissera pas la garde en 2002.
En volume, la récolte 2001 s'annonce à peine inférieure à celle de 2000. La profession s'attend à rentrer aux alentours de 1,2 Mhl, se caractérisant par une matière proche du dernier millésime, mais présentant une meilleure acidité. Cela maintient les disponibilités dans la bonne moyenne alors que les indicateurs de vente demeurent bien orientés. Le crémant confirme que le passage à l'an 2000 a été un bon vecteur de promotion, surtout à l'exportation (+ 30 %). Ses ventes 2001 promettent de s'établir autour des 156 000 hl, contre 149 200 hl en 2000.
Les ventes totales de l'appellation sont stables. Sur les huit premiers mois de l'année 2001, elles n'ont progressé que de 1 %. En rythme annuel, à fin septembre, la performance commerciale (1 174 276 hl) est en léger retrait (- 0,4 %) par rapport à la même période de l'année précédente. Sur ce total, la métropole (870 600 hl) augmente légèrement alors que l'export (304 700 hl) se tasse. Les vins d'Alsace résistent bien sur leurs premiers marchés extérieurs : les Pays-Bas et la Belgique gagnent respectivement 1,7 et 2,7 % sur huit mois. En revanche, ils cèdent toujours du terrain en Allemagne (- 7,2 %) et au Danemark (- 19 %).
' Les difficultés concernent davantage les vins de début de gamme, pour lesquels la concurrence est sévère, que ceux du haut de gamme pour lesquels la concurrence est moindre et la demande plus affective , constate Jean-Louis Vézien, directeur du Civa (Conseil interprofessionnel des vins d'Alsace). Cette évolution doit encourager le vignoble à renforcer l'identité de ses produits . ' Pour y parvenir, le bureau stratégique du Civa a proposé un doublement du budget de la communication (3,31 Meuros, soit 21,7 MF en 2000). La réponse de la base est attendue au printemps 2002, avant l'éventuelle application de la mesure en 2003.
La hiérarchisation est une autre balle jetée dans le camp de la production. Cette réflexion pour créer un niveau intermédiaire entre les grands crus et l'Alsace générique suit son cours. Si la dénomination ' Alsace terroirs ' semble tenir la corde, les conditions de production précises restent à définir. En revanche, le projet de salon réunissant, en Alsace, les vignobles du nord de la France a fait long feu. Les réticences des entreprises à s'engager et celles du Civa à participer au financement ont eu raison des velléités de l'Ava.
Durant l'année, des avancées ont eu lieu dans d'autres domaines. L'Ava a obtenu le maintien de deux recettes locales que les douanes voulaient fermer. Toutes deux se trouvent dans le Haut-Rhin, l'une à Ribeauvillé, l'autre à Riquewihr. Toujours dans la rubrique fiscale, l'Alsace a peut-être été le dernier vignoble à trouver un terrain d'entente avec les douanes pour mettre en place le formulaire unique de déclaration récapitulative mensuelle, répondant aux exigences de cette administration et de l'interprofession. Les opérateurs l'appliquent depuis fin août.
Deux dossiers ont fortement fâché la profession en 2001. Le premier a été la réorganisation du Sernam et son choix de n'assurer, depuis l'été dernier, les expéditions que d'un nombre très restreint de maisons de vins d'Alsace. Le gros peloton des vignerons indépendants a été le premier touché par cette mesure qui s'est répercutée sur les tarifs pratiqués.
Le deuxième sujet de polémique est l'application de la directive Natura 2000. Gérard Boesch s'élève contre de ' graves dysfonctionnements. Il n'y a ni étude d'impact, ni concertation. Il manque un débat serein. La viticulture est prête à faire des concessions sur 320 ha situés dans le secteur en cause, mais les associations écologistes veulent profiter de la situation pour passer en force et faire classer les sites en zone de protection de la faune et de la flore alors que leurs demandes ne reposent sur aucune base scientifique. Nous marchons sur la tête '. Dans un domaine voisin, l'Ava ne veut pas que la viticulture régionale rate le virage des principes inscrits dans la réflexion terroirs et environnement. ' 2001 a été l'année de la prise de conscience ', indique Gérard Boesch.