'Aider ceux qui ont des problèmes, c'est agir pour l'ensemble. L'appellation est une propriété collective. Si certains ne sont pas au niveau, c'est toute la communauté des vignerons qui en pâtit . ' Les responsables syndicaux des appellations du Sud-Ouest ont tous le même raisonnement, seules les méthodes diffèrent. De Cahors à Madiran, en passant par Fronton, tous jouent la carte de l'encadrement technique.
' A Gaillac, nous avons effectué un travail de repérage pour cibler les exploitations en situation précaire , explique Philippe Derrieux, président de la fédération des vins d'appellation du Sud-Ouest (1) et administrateur du syndicat. Nous avons travaillé en symbiose avec les responsables de l'agrément, les laboratoires et même les centres de gestion. Cette démarche, initiée il y a des mois, arrive à son terme. Nous sommes en mesure de dresser un véritable audit de la production. Des exploitants vont devoir prendre leurs responsabilités : soit ils investissent et adoptent une vraie démarche d'entreprise, soit ils se reconvertissent, se tournent vers la coopération ou vers le négoce via des vendangeoirs... On peut être bon cultivateur de raisins mais mauvais vinificateur. Dans l'intérêt de tous, il vaut mieux se limiter à ce que l'on sait faire. '
A Cahors, on parle de ' contrat de maîtrise des vignerons '. ' Notre consultant opère avec les techniciens de l'AOC pour analyser les différentes exploitations de l'appellation. L'idée est de tout passer au crible, de la production de raisin à la commercialisation de vins. Pour l'instant, nous nous sommes centrés sur la vigne et dans les chais mais le système devrait être opérationnel pour mars 2002 ', raconte Jean-Marie Sigaud, président du syndicat.
L'objectif est de faire progresser le niveau moyen de l'AOC. Même volonté à Fronton où le syndicat a embauché un technicien pour animer les groupes ' production raisonnée ' et ' vinification des hauts de gamme '. Son travail s'effectue en liaison avec une commission rassemblant l'ensemble des techniciens de la chambre d'agriculture et des coopératives. Ses services s'adressent à des volontaires qui paient une cotisation symbolique pour bénéficier de l'information. De l'avis de plusieurs participants, le travail en équipe permet la rationalisation des coûts et une bonne émulation. A Madiran, le syndicat est passé à la vitesse supérieure en créant une structure de développement technique, la Sica Altema (Alliance technique du Madiranais). Elle vient de recevoir son agrément par le ministère de l'Agriculture. Vingt et un producteurs, représentant 380 ha, adhèrent à la structure. Moyennant une cotisation proportionnelle à la surface de l'exploitation, ils bénéficient des conseils techniques de Bernard Fage, animateur de la Sica Altema : ' Près des trois quarts de mon temps sont consacrés à des actions individuelles , explique-t-il. Le reste est réservé à des opérations collectives. Par exemple, nous organisons des stages avec des intervenants extérieurs pour aborder des problèmes techniques spécifiques : la modélisation du mildiou, les méthodes de fertilisation des sols, etc. '
L'investissement technique fait également partie des axes de développement du Comité interprofessionnel des vins du Sud-Ouest (Civso) qui vient d'embaucher un jeune ingénieur. ' Sa mission sera triple, explique le nouveau directeur, Michel Huellou. Avant tout, il sera chargé de coordonner les travaux qui sont actuellement menés dans la région par les différents intervenants publics ou privés, et de diffuser l'information auprès des professionnels. Il n'est pas question de s'investir directement dans l'expérimentation. Nous voulons être des organisateurs, des aboyeurs, mais pas des chercheurs !' dit-il.
Par ailleurs, le Civso compte instaurer un référentiel de production intégrée pour la région. ' Il nous faut recenser toutes les personnes qui sont actuellement sur cette voie. Après quoi, il faudra mettre tout le monde dans la même direction ', poursuit notre interlocuteur. Enfin, le nouveau venu aura pour mission des actions techniques qui participent à la promotion des vins du Sud-Ouest : suivi en aval de la qualité, développement du concours des vins de Toulouse, et action de présentation des vins auprès des prescripteurs ou des distributeurs. ' Nous avions une forte demande de la part des écoles hôtelières auxquelles nous ne pouvions pas répondre jusqu'à présent, faute de personnel. Désormais, nous allons créer un module de formation avec vidéo, fiche de présentation des vins et échantillons pour la dégustation... '
Cet axe de développement participe aussi d'une volonté des professionnels d'être plus présents dans les CHR (cafés-hôtels-restaurants). Désormais, ce secteur fait partie des priorités. Faute de moyens suffisants (le budget du Civso s'élève à 14 MF, pour 17 AO !), les professionnels ont décidé de cibler leurs actions sur quelques territoires. Quatre zones sont en ligne de mire : le Sud-Ouest, le Nord, l'Ouest et Paris.
Sur ces destinations, l'interprofession réoriente sa communication. Plus question de grande campagne publicitaire mais des ' actions événementielles ciblées sur le consommateur de vin '. La nouvelle stratégie s'appliquera dès le mois de janvier avec l'organisation de ' bacchanales ' parisiennes. L'opération, menée dans les 150 bars à vins de la capitale, sera animée par les vignerons du Sud-Ouest. Elle devrait devenir un rendez-vous annuel...
(1) La fédération des vins d'appellation du Sud-Ouest regroupe les 17 appellations membres du comité interprofessionnel (Gaillac, Fronton, Madiran, Pacherenc, Saint-Mont, Lavilledieu, coteaux du Quercy, Jurançon, Béarn, Irouléguy, Tursan, Marcillac, côtes du Brulhois, côtes de Millau, Estaing, Entraygues et Fel) auxquelles s'ajoute Cahors.