Bons points pour Pécharmant et Monbazillac
Bergerac paie les pots cassés du Bordelais... Si ce dernier a su gérer tant bien que mal l'après-flambée des prix, ce n'est pas le cas de ' l'autre grand vignoble d'Aquitaine ' qui a souffert, sur la campagne 2000-2001, d'un triste ' retour à la réalité '. Le coup de bâton n'étonne pas : ' Quand les cours de Bordeaux redeviennent concurrentiels, la grande distribution et le hard discount trouvent moins d'intérêt à Bergerac. La demande baisse et le marché du vrac prend une claque ', analyse un négociant. Le repli le plus important est enregistré en côtes-de-bergerac (- 29 %) avec un niveau de commercialisation et des prix comparables à ceux pratiqués au cours des campagnes 1996-1997 et 1997-1998.
L'AOC Bergerac rouge a été aussi très chahutée. ' Le négoce a acheté du millésime 99 à 1 067,14 euros/tonneau de 900 l (7 000 F) environ. Comme il était impossible de répercuter cette hausse sur le prix consommateur, de nombreux négociants ont perdu de l'argent. Ils ont abordé 2000-2001 avec des stocks importants et ont peu acheté du millésime 2000. Celui-ci a vu son prix baisser en dessous de la barre des 914,69 euros/tonneau (6 000 F)... Au final, cette situation a permis aux négociants de se refaire et l'on devrait repartir sur de bonnes bases ', déclare Philippe Barbier, négociant bordelais, récemment élu à la tête du CIVB (Comité interprofessionnel des vins de Bergerac). Une situation inédite mais qui reflète bien la réalité, à savoir le faible poids d'un négoce local indépendant. ' Une faible proportion des transactions en vrac est assurée par des maisons bergeracoises , explique le président, qui ne mâche pas ses mots. La profession compte sur moi pour lui ouvrir des portes sur la place de Bordeaux. Et il y a vraiment une carte à jouer... '
' Non seulement la gamme des AOC bergeracoises (1) est extrêmement riche mais, de plus, le rapport qualité/prix est très favorable , poursuit Philippe Barbier. On assiste à un écart de prix de 228,67 à 304,90 euros/tonneau (1 500 à 2 000 F) entre le bordeaux générique et le bergerac rouge, alors que cela ne se justifie pas au niveau qualitatif. Sans compter que les relations entre la production et le négoce sont moins tendues à Bergerac qu'à Bordeaux. '
A côté de ses AOC bergeracoises vendues en vrac et pleinement touchées par la moindre demande sur le marché, des producteurs valorisent très bien leurs ventes en bouteilles. ' Certains domaines manquent de stocks ', remarque Jean-François Defarge, président du syndicat de Montravel. L'AOC Pécharmant fait partie de celles qui ont le mieux profité du mythique millésime 2000, avec + 62 % de volumes échangés sur le marché du vrac et un prix en hausse de 4 %. Quant à Monbazillac, le repli des volumes enregistrés doit être relativisé puisqu'il fait suite à une campagne 1999-2000 particulièrement active. L'équilibre entre l'offre et la demande sur cette AOC a encouragé une légère revalorisation des cours à 2 198,31 euros/tonneau (14 420 F). Pour les professionnels, ces bons résultats sont le fruit des efforts qualitatifs effectués depuis plusieurs années. ' Aujourd'hui, pour s'en sortir, il faut faire mieux que moyen. Même ceux qui ont de bons produits doivent se battre au niveau commercial pour occuper le terrain ', remarque un élu.
C'est cette ' présence auprès du consommateur ' que le président de l'interprofession compte renforcer. Un programme sur trois ans a été adopté en juin dernier, dont une enveloppe de 76 224,51 euros (500 000 F) pour l'actuelle campagne. L'objectif est de créer un ' Evénement Bergerac ' qui permettrait, par exemple, d'animer les ventes en linéaires. Difficile d'en savoir plus pour l'instant... Parallèlement à ces actions sur le terrain, l'interprofession annonce une nouvelle campagne publicitaire pour février 2002, avec un budget de 0,30 Meuros (2 MF).
En plus de ces investissements sur l'aval, la filière bergeracoise travaille sur l'amont avec son étude des terroirs. Le financement des 0,69 Meuros (4,5 MF) a été permis grâce à des aides régionales et européennes. Les premiers relevés sur le terrain ont démarré au mois d'octobre. Dans un premier temps, il s'agira d'établir la cartographie du vignoble, soit 110 000 ha dont 12 000 ha plantés, puis d'enchaîner sur les examens pédologiques. ' L'objectif à moyen terme est d'établir des fiches de valorisation viticole, c'est-à-dire de trouver la meilleure adéquation sols-cépages-conditions de production... , annonce Pierre Guerin, du laboratoire de CIVB. Jusqu'à présent, les plus gros progrès effectués par le vignoble de Bergerac ont eu lieu dans les chais. Si l'on veut aller de l'avant, il nous faut avoir une meilleure connaissance du terrain . '
(1) On compte treize AOC bergeracoises : Bergerac rouge, Bergerac rosé, Bergerac sec, côtes de Bergerac rouge, côtes de Bergerac blanc, Pécharmant, Saussignac, Montravel sec, Montravel rouge (décret du 23 novembre 2001), Haut Montravel, côtes de Montravel, Rosette, Monbazillac.