Face à la crise qui dure depuis presque deux ans, et qui s'est propagée cette année, la filière s'organise à tous les niveaux. Une embellie pointerait même depuis début décembre.
En Bergeracois, l'ambiance est morose. La crise qui dure depuis 18 à 24 mois se fait de plus en plus ressentir au niveau des exploitations. En effet, les cours du vrac chutent depuis un an et demi à deux ans car, selon Gil Barde, président sortant de la Fédération des vins du Bergeracois (FVB), ' les négociants bordelais ont fait baisser les cours volontairement '. Du coup, le cours moyen du bergerac rouge durant la campagne 2001-2002 se situe autour de 722 euros/tonneau de 900 l contre 1 045 euros/tonneau en 1999-2000, celui du blanc sec à 580 euros/tonneau au lieu de 640 euros, et celui du blanc moelleux à 595 euros/tonneau, au lieu de 804 euros.
Les différentes appellations ne réagissent pas toutes de la même façon face à la crise. Parmi les treize AOC, trois semblent à peu près épargnées : Montravel rouge, Pécharmant et Saussignac ; une s'en sort même bien : Monbazillac. Ce phénomène peut s'expliquer par la faible taille de ces appellations positionnées sur des marchés de niche.
En 2002, les chais particuliers qui vendent en vrac ou en bouteilles ont eu d'autant plus de mal à supporter la baisse des génériques, que leurs charges d'amortissement sont élevées, en raison des investissements réalisés entre 1998 et 2000. Cependant, toutes les exploitations ne sont pas touchées : ' Un écart se creuse entre les plus riches et les pauvres ', remarque Jean-Marc Cornée, du Centre d'économie rurale de Bergerac. Ceux qui s'en sortent ont su se moderniser, se différencier, trouver de nouveaux marchés et nouer des relations contractuelles avec des acheteurs. Les autres se retrouvent dans une situation de plus en plus difficile.
Pour essayer d'enrayer la crise, la Fédération des vins du Bergeracois a organisé une réunion, courant novembre, entre les représentants de la production et les représentants du négoce bordelais qui commercialisent les vins de Bergerac.
A l'issue de cette séance, tous se sont accordés sur ' un prix éthique ' de 770 euros/tonneau en dessous duquel les négociants essaieront de ne pas descendre. Les cours devraient remonter un peu, mais ne seront pas suffisants pour couvrir les coûts de production. ' Avec les charges qui augmentent et avec les amortissements, les marges se laminent ', analyse Laurent de Bosredon, viticulteur-négociant à Bergerac.
Pour sortir de cette situation, la profession souhaite jouer la carte de la qualité. Paul-André Barriat, président du Syndicat de l'AOC Bergerac et nouveau président de la FVB, annonce que le syndicat souhaite ' inciter au suivi en amont '. Ainsi, une commission de suivi et de contrôle des conditions de production a été mise en place dès cette année. Toujours en amont, l'étude des terroirs, commencée il y a environ 15 mois, se poursuit. En aval, les sept coopératives réagissent elles aussi. Elles sont en train de s'unir dans le but de constituer une force de proposition plus importante sur le marché du vrac. Le statut de cette union sera décidé fin janvier 2003. Cela devrait contribuer à soutenir les cours puisque les ' caves coopératives représentent entre 35 et 40 % du volume de vin en vrac commercialisé en AOC Bergerac ', estime Pierre Chenin, président de la Fédération des caves coopératives de Dordogne.
Grâce à toutes ces actions, une légère reprise se fait sentir depuis mi-novembre : le cours moyen du bergerac rouge est remonté à 720 euros/tonneau les quinze premiers jours de décembre, alors qu'il était autour de 682 euros/tonneau en octobre, celui du bergerac blanc sec tourne à 640 euros/tonneau environ. Cette tendance devrait se confirmer parce qu'à l'issue de la campagne, les stocks ont baissé (vente de 610 000 hl) et que la vendange de l'année 2002 est faible. Le marché est donc moins saturé.
Afin de donner un nouvel élan à Bergerac, le CIVRB (Comité interprofessionnel des vins de la région de Bergerac) a changé l'orientation de sa politique marketing. Au lieu de chercher à donner une image de marque et de prestige à ses vins, le CIVRB a choisi d'être proche des professionnels, c'est-à-dire d'organiser des animations sur le terrain, en collaboration avec les entreprises, ' afin de tenir nos positions, voire d'en gagner ', annonce François-Xavier de Saint-Exupéry, du CIVRB.
Pour cela, un programme de trois ans a débuté l'année dernière. En France, il consiste à promouvoir les treize AOC auprès de la grande distribution et des cafés hôtels restaurants, par le biais d'animations en magasin ou de salons. A l'étranger, les pays visés sont le Royaume-Uni, l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas. Des actions de promotion sont organisées dans ces pays, tels que des dîners-dégustations, des séminaires de découverte, des animations chez des cavistes et des cercles de dégustation. Une campagne de publicité est également prévue pour 2003 avec, pour thème central, le slogan ' Nous les Bergerac '. Le budget du CIVRB pour 2003 est de 1,6 million d'euros, et les CVO vont augmenter de 10 % pendant trois ans pour réaliser toutes ces ambitions.