Après les textes sur les examens analytiques et gustatifs (' JO ' du 9-12-01), le projet de décret relatif aux conditions de production et aux rendements a été adopté par l'Inao. Il instaure un rendement agronomique maximal à la parcelle.
Après une période agitée, le comité national des vins et des eaux-de-vie de l'Inao s'est réuni les 13 et 14 février à Paris. Rappelons qu'en quelques semaines, l'Institut a connu une grève de son personnel, une grève des représentants professionnels à la suite d'une bataille budgétaire mal ficelée avec les pouvoirs publics, et un limogeage du directeur en place depuis 1996.
Au niveau de la direction, c'est Philippe Mauguin, 39 ans, en provenance du cabinet de Lionel Jospin à Matignon, qui prend les rênes.
Côté budget, il est calé pour l'exercice actuel, mais concernant les engagements à terme, tout le monde attend les élections. De toute façon, il serait inconcevable que l'Inao, ' au coeur de la politique agricole française ' d'après les termes du nouveau directeur, n'ait pas les moyens de travailler enfin sereinement.
Ce comité de février a donc quasiment bouclé, au niveau des textes, la lourde réforme des agréments... entamée il y a plus de six ans ! Ce dossier avait coûté la place d'Alain Berger en 1996, le précédent directeur de l'Institut.
De la production au négoce, tout le monde s'accorde pour estimer que les responsables de syndicats disposent désormais d'une série d'outils juridiques et réglementaires pour faire respecter la limitation des rendements, clé de voûte du système des AOC, et la véracité des dégustations. Aux textes parus dans le Journal officiel du 9 décembre concernant l'aval de la procédure - auxquels La Vigne a consacré son dossier du mois dernier - vient donc s'ajouter un texte pour l'amont. L'Inao a en effet adopté, après moult discussions et suspensions de séance, un décret relatif aux conditions de production et aux rendements des vignobles produisant des vins à AOC (un texte sur les effervescents est prévu ultérieurement). L'adoption de ce texte était initialement prévu en novembre ; sa parution au JO est imminente. Les responsables souhaitent une application totale du nouveau dispositif dès la nouvelle campagne 2002-2003.
Lors de la présentation du décret adopté, le président René Renou, vigneron angevin, a confessé que de nombreux articles du texte étaient d'une grande ' banalité ', comme le fait qu'il faille respecter les conditions de production pour obtenir l'AOC ! Il faut dire que de nombreux producteurs et régions, avec le temps, avaient pris des ' libertés ' avec le décret de base de 1974, d'où une décrédibilisation potentielle du système. Il fallait donc resserrer tous les boulons. Grande nouveauté de ce texte : la mise en place obligatoire dans chaque décret d'appellation d'un rendement agronomique maximal (RAM) à la parcelle. Aucun chiffre n'est donné, chaque syndicat fera ses propositions à l'Inao. Aujourd'hui, les rendements ne sont considérés qu'au niveau de l'exploitation, d'où des vignes éponges et autres ' ficelles '. ' Il y a des problèmes pour 1 à 2 % des vignerons. Une fois qu'un ou deux seront accrochés, tous y regarderont de plus près ', explique-t-on. Dissuasion et contrôle vont de mise. Pour effectuer ces contrôles, sous la responsabilité de l'Inao, des commissions techniques de suivi des conditions de production sont instituées dans chaque AOC, des vignerons en feront partie. Ces commissions n'existent, à ce jour, que dans quelques appellations pionnières. Si un vigneron refuse le contrôle chez lui, il ne pourra présenter ses vins à l'agrément.
Pour compléter ce dispositif, les appellations qui le souhaitent pourront aussi mettre en place un rendement maximal de production (RMP). Ce système facultatif est condamné à avoir peu de succès car le rendement à la parcelle est plus contraignant... et il est obligatoire. Il a été cependant introduit dans le texte car le Beaujolais et les côtes du Rhône viennent juste de le mettre en place. Si cette réforme d'ensemble est louable car plus rigoriste, on peut regretter qu'on n'en est pas profité pour toiletter le système au niveau des mots et des paliers : rendement de base, rendement annuel, plafond limite de classement, rendement butoir, rendement maximal de production ! Comme dans les administrations, on empile sans éliminer.
Signalons également que le texte prévoit dans son article 7 qu'en zone mixte, on ne pourra produire plus de 100 hl/ha de vin de table, au-delà du quota déclaré en AOC. Et que l'article 11 prévoit, qu'à partir de la campagne 2005-2006, chaque décret fixera un taux maximal de manquants (pas plus de 25 %). S'il est dépassé, le rendement autorisé sera réduit en proportion.