Les signes de qualité étant importants dans notre secteur, certains voient d'un mauvais oeil l'arrivée d'une nouvelle mention sur l'étiquette.
'Lorsque je décris ma manière de travailler, les visiteurs me demandent immanquablement comment reconnaître les agriculteurs qui raisonnent comme moi, com- ment distinguer leurs produits. Jusqu'à présent, je n'avais pas de réponse ', témoigne un agriculteur à la tête d'une ferme rencontre Farre. L'étiquetage des produits issus de l'agriculture raisonnée a sans doute été le sujet le plus discuté lors des réunions préparatoires. Certains ne voulaient qu'une communication institutionnelle, sans étiquetage des denrées, ' pas dans la philosophie de l'agriculture raisonnée '. Le compromis est de permettre cet étiquetage si, à tous les stades de la production, par tous les opérateurs, des moyens sont mis en oeuvre pour garantir la traçabilité.
Jean Glavany, ministre de l'Agriculture, l'avait annoncé début janvier : les efforts réalisés par les agriculteurs pour raisonner leurs pratiques doivent être valorisés. Cette valorisation passe par un étiquetage explicite. Réclamé par les consommateurs, il était également souhaité par des agriculteurs, las de vivre une concurrence jugée déloyale face à des producteurs d'autres pays n'hésitant pas à étiqueter clairement leurs produits.
Cette décisison courrouce les ' bio '. Ils jugent les efforts demandés insuffisants et craignent que la mention sur l'étiquette soit perçue comme un signe de qualité. L'Inao, déjà gêné par la référence à l'agriculture biologique, craint que l'AOC ne se dilue dans un maquis de mentions portées sur l'étiquette. Pour Jean-Marie Mutschler, directeur de Farre, il n'y a aucun risque de confusion avec les signes de qualité existants. La mention autorisée ' ... issu d'une exploitation qualifiée au titre de l'agriculture raisonnée ' est, selon lui, ' tout sauf sexy ! Mais si les vignerons ont des états d'âme, qu'ils se rassurent, les Sud-Africains n'auront pas les mêmes réticences ! ' Aucun logo n'est envisagé, justement afin d'éviter toute confusion, conformément aux recommandations du CSO.
Mais avec une seule et même mention sur l'ensemble des produits agricoles, l'Etat cherche un effet de masse pour faire passer le message auprès des consommateurs. Ils seront alors peut-être prêts à payer un peu plus cher les produits issus de l'agriculture raisonnée. A vérifier...
Le décret risque de sortir juste après le nouveau règlement européen sur l'étiquetage, attendu d'une semaine à l'autre. Celui-ci devrait être moins restrictif que le précédent, en prévoyant des mentions obligatoires, facultatives réglementées ou facultatives libres, autorisées si elles ne sont ni mensongères ni confusionnelles. La référence à l'agriculture raisonnée pourrait entrer dans cette dernière catégorie et trouver alors sa place sur la contre-étiquette.
Mais la Cnaoc (Confédération nationale des appellations d'origine contrôlée) s'interroge sur la reconnaissance internationale d'une telle qualification. ' Si l'Etat met en place ce concept, il doit être reconnu au niveau européen et international. Le marché des producteurs n'est pas qu'en France. '