Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 2002

Accroître ensemble la valeur ajoutée à partager

La vigne - n°133 - juin 2002 - page 0

Le premier contrat doit apporter des éléments positifs aux deux parties, c'est un préalable indispensable pour créer la confiance. Mais la progression de la rémunération se construit aussi dans la durée.

Signer un contrat, c'est poser la première pierre d'un partenariat. Les producteurs y trouvent des garanties de débouchés qui leur permettent de mieux organiser leur travail. ' Je me suis engagé sur trois ans pour des moûts, car je n'arrivais plus à écouler tous mes vins ', confie un petit vigneron du Val de Loire, qui apprécie de ne plus avoir à courir derrière les clients.
Les négociants, de leur côté, sécurisent une partie de leur approvisionnement, tant sur le plan des volumes que des profils de vins. ' Actuellement, sur le marché, il est très difficile de trouver des côtes-de-provence rosés, par exemple ', constate Jean-Louis Vallet, directeur de Prodis, la filiale des vins de Carrefour, qui s'est engagée dans une politique de partenariat.
Dans un cadre contractuel, les négociations deviennent plus sereines, car le prix n'est plus le seul élément en jeu, et les partenaires ont à coeur de trouver un équilibre durable. Mais ils ne peuvent pas se déconnecter des réalités du marché. Sur le segment des vins de base, la valeur ajoutée supplémentaire obtenue par les producteurs reste faible. ' Nous sommes payés au prix moyen de la mercuriale de Béziers, et nous avons des garanties d'enlèvement et de paiement sur les douze mois à venir. C'est appréciable pour notre trésorerie, mais ce n'est pas suffisant pour envisager l'avenir. Nous n'avons plus de soucis d'écoulement, mais nous avons toujours des problèmes de rentabilité car, pour un tiers des vins, les prix sont inférieurs aux coûts ', affirme un président de groupement languedocien qui a décroché des contrats sur la quasi-totalité de ses vins de table et de pays.

En milieu et en haut de gamme, les marges sont plus confortables et les vignerons arrivent à obtenir des bonus intéressants. En nouant des relations durables avec des négociants, ils peuvent aussi envisager de se repositionner sur des segments plus valorisants, auxquels ils n'ont pas forcément accés avec leurs propres capacités commerciales. ' Cette année, nous avons réalisé des sélections poussées et obtenu d'excellentes cuvées de vins de pays. Mais nous n'avons pas pu trouver suffisamment de débouchés pour les valoriser à leur juste prix, et nous avons dû en brader une partie. Le premier moteur de notre développement qualitatif a été la bouteille, le deuxième pourrait être la contractualisation avec le négoce ', estime le responsable d'une coopérative du Languedoc.
Dans la durée, le partenariat accompagne l'évolution des caves, en leur apportant la lisibilité du marché dont elles ont besoin pour se fixer des orientations. ' En quinze ans, nous avons totalement modifié notre encépagement et notre palette de vins, et nous avons augmenté la rémunération de nos adhérents ', explique Jacques Bourbousson, président de la coopérative de Beaucaire (Gard), qui a noué des partenariats pour commercialiser ses 45 000 hl de vins de pays sur le marché français et à l'export.

' Nous pouvons progresser seuls bien sûr, mais avec nos partenaires, nous allons plus vite. Ils nous ouvrent des débouchés et nous apportent des informations qui nous aident à faire évoluer nos vins. Ceux qui nous achètent au coup par coup nous rémunèrent parfois aussi bien, mais ils ne nous apprennent rien. Nous réalisons déjà 35 % de nos ventes en partenariat, et nous comptons aller jusqu'à 50-60 % ', affirme Pierre Mirc, président de la coopérative Sieur d'Arques (Aude), qui vend 110 000 hl de vins tranquilles et effervescents.

' Construire un partenariat est un travail de patience, qui peut prendre plusieurs années. Son succès repose sur la qualité des relations, le respect des engagements et le partage des informations. Nous travaillons à livre ouvert, nous tenons nos partenaires au courant de ce que deviennent leurs vins. Quand cela fonctionne bien, il se crée une dynamique croisée entre nos entreprises ', souligne Bruno Kessler, directeur des achats des Grands chais de France, qui travaille entre autres avec Sieur d'Arques.
Ces possibilités d'évolution ne sont pas écrites dans le contrat de départ. Elles apparaissent dans la durée, au fur et à mesure que la confiance s'installe et que les hommes apprennent à se connaître. Et si elles se concrétisent, c'est parce qu'ils décident de construire ensemble. ' Nous devons aller au-delà de ce que nous savons faire. Les négociants évoluent dans un monde plus vaste, en perpétuel mouvement. Ils peuvent nous aider à ne pas rester enfermés dans nos citadelles ', ajoute Pierre Mirc.

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :