ImprimerPlusieurs interprofessions ont pris des accords pour que le nom de leur région apparaisse sur toutes les bouteilles. L'objectif est d'améliorer la compréhension de l'offre par les consommateurs.
Cela ressemble à un effet de dominos. Depuis l'an dernier, la plupart des interprofessions françaises ont pris des accords pour que le nom de leur région soit inscrit sur leur gamme de vins. Par exemple, le terme ' Bourgogne ' ou ' Grand vin de Bourgogne' , s'il s'agit d'un village, d'un cru ou d'un grand cru, apparaîtra désormais aux côtés de toutes les appellations du vignoble. Le Bordelais, le Val de Loire et le Languedoc ont également opté pour cette formule. Le nom de ces régions sera noté sur les étiquettes selon diverses échéances et modalités.
Ces initiatives constituent une réponse à l'offre du Nouveau Monde, vantée pour sa simplicité et donc sa facilité de compréhension par les consommateurs. A l'opposé, le système des AOC à la française pêche par sa grande complexité. Les deux rapports Berthomeau, parus en juillet 2001 et juillet 2002, ont mis l'accent sur cette faiblesse. ' En Bourgogne, nous possédons une centaine d'appellations. Il n'y a que peu d'initiés qui savent les rattacher à leur région d'origine. Le fait d'inscrire 'Bourgogne' sur l'étiquette permet de clarifier notre offre dans l'Hexagone et à l'étranger , confie Dominique Lambry, responsable des marchés France et Europe au BIVB (Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne). Cette identification permettra de capitaliser sur le terme 'Bourgogne', qui comporte des valeurs positives : il est synonyme, auprès des amateurs de grands vins, de qualité et de consommation pour les grandes occasions . '
Dans cette région, la décision d'apposer le nom de la grande région aux côtés des noms d'appellation a été prise le 12 décembre 2001, dans le cadre d'un accord interprofessionnel. Les termes de cet accord ont fait l'objet d'un arrêté interministériel du 20 mars 2002 et d'une parution au JO le 12 avril. Le texte rend obligatoire, à compter du millésime 2002, l'apposition sur tous les habillages frontaux des bouteilles des dénominations ' Bourgogne ' ou ' Grand vin de Bourgogne '. Une importante communication interne auprès des syndicats d'appellations, des opérateurs (vignerons, négoce) et des imprimeurs... a eu lieu pour que le dispositif soit appliqué dans les temps. Ce sont tous les jeux d'étiquette qui doivent être remis à jour.
' Cette décision constitue aussi un retour sur investissement, souligne Dominique Lambry. La cotisation interprofessionnelle en Bourgogne est en augmentation pour investir dans le marketing et la communication. Cela s'est fait par la mise en avant, dans nos campagnes, de la terminologie 'Bourgognes', au pluriel, désignant la richesse de nos appellations. Pour qu'elle ait un impact, cette communication doit correspondre à ce que l'on trouve en rayon. '
A Bordeaux, des accords interprofessionnels similaires ont été pris en 1999. Ils prévoyaient l'utilisation des mots ' Bordeaux ' ou ' Grand vin de Bordeaux ', en fonction des catégories de vins. Cet accord a été modifié en 2002. L'interprofession a proposé qu'un logo se substitue à ces termes. Celui-ci, lancé cette année par l'interprofession, est un ' B ' stylisé, barré du mot Bordeaux.. ' De cette manière, nous nous inscrivons dans la stratégie des grandes marques , annonce Roland Feredj, directeur du CIVB (Conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux). Un logo, c'est facilement lisible et accessible. '
Déposé à l'Inpi (Institut national de la propriété industrielle), il fait l'objet d'un contrat de franchise auprès des opérateurs et il est mis gratuitement à leur disposition. ' La plupart des grands négociants ont d'ores et déjà signé la licence d'exploitation ', se réjouit Roland Feredj. Elles pourront apposer le logo sur la capsule ou sur les étiquettes. Selon l'interprofession, il sera adopté par tout le monde d'ici deux à trois ans, le temps que les opérateurs écoulent leur stock d'étiquettes et se penchent sur l'intégration du logo dans leurs habillages.
Dans le Val de Loire, Inter-Loire, l'interprofession qui regroupe l'Anjou, le Saumurois et la Touraine, a elle aussi décidé d'avancer en douceur. L'assemblée générale du 19 juin dernier a voté un accord de campagne stipulant que le terme ' Val de Loire ' figure désormais sur les contenants. La liberté de choix est laissée aux opérateurs : soit sur l'étiquette, soit sur la capsule, soit par le biais de la bouteille interprofessionnelle déjà gravée du terme ' Val de Loire '. ' Nous souhaitons surtout une prise de conscience plutôt que de mettre en place quelque chose de contraignant , indique Edouard Cabasse, directeur général d'Inter-Loire. Ce type d'initiative permet de jouer la synergie entre les appellations d'une même région. Lorsqu'un consommateur a apprécié un chinon, il y aura toutes les chances pour qu'il goûte un saumur de la même région . ' L'interprofession des vins de Nantes pourrait prochainement rallier la démarche.
Lors de son assemblée générale ordinaire d'août dernier, l'interprofession du Languedoc a acté le principe d'une utilisation de la mention ' Vin du Languedoc ' sur l'ensemble de sa gamme de vins (corbières, minervois, etc.). Le syndicat des Coteaux du Languedoc, auquel appartient le terme ' Languedoc ', a accepté de le partager avec les autres appellations de la région.
Reste à savoir si les opérateurs mettront effectivement en place les mesures décidées par toutes ces différentes interprofessions. Elles n'ont pas toujours été accueillies dans l'enthousiasme. Certaines appellations, Chablis par exemple, qui se sont battues pour accéder au rang de cru ou de grand cru ont, en effet, du mal à comprendre l'intérêt de faire désormais référence à leur région d'origine. Elles vivent cela comme un recul. Aux interprofessions de leur démontrer qu'ils ne perdront rien à proclamer leur appartenance régionale.