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Cognac prépare la fin des parcelles à tout faire

La vigne - n°139 - janvier 2003 - page 0

Jusqu'à présent, à Cognac, les vignerons pouvaient produire, sur une même parcelle, des vins de distillation, des vins de table et du jus de raisin. L'an dernier, la région a décidé de mettre fin à ce système : dès 2003-2004, un seul produit sortira d'une parcelle donnée.

Depuis 1999, les ventes de cognac ont repris. L'an dernier, le mouvement s'est poursuivi. Durant l'année mobile arrêtée au 31 octobre 2002, les expéditions (toutes destinations confondues) étaient supérieures de 14 % à celles des douze mois précédant le 31 octobre 2001. Elles avaient atteint près de 350 000 hl d'alcool pur. Au cours de la dernière campagne, elles ont contribué, à hauteur de 1,25 milliard d'euros, à l'excédent de la balance commerciale française. Mais les stocks et les volumes produits sont tels que l'amélioration tarde à venir pour les viticulteurs.
De fait, toute la région se cherche depuis plusieurs années. D'une part, les rendements et les quantités distillées ont été réduits pour limiter la surproduction. D'autre part, des politiques ambitieuses d'arrachage et de reconversion en vins de pays ont été mises en place. Mais comme elles se mettent en oeuvre lentement, au rythme charentais, leurs effets ne sont guère ressentis.
Certes, 25 000 ha de vignes ont disparu au cours des vingt dernières années et 3 500 ha ont été reconvertis en VDP. Mais il reste 75 000 ha dédiés au cognac. Le vignoble continue de produire, en vins de distillation, le double de ce dont il a besoin. Les viticulteurs espèrent toujours en la reprise du cognac et beaucoup préfèrent attendre ces hypothétiques jours meilleurs.

Pour éviter un nouveau gonflement des stocks, le ministère de l'Agriculture avait projeté d'abaisser le rendement à 100 hl/ha en 2002. Le Syndicat général de la viticulture, qui réunit l'essentiel des producteurs locaux, s'y est vivement opposé. Il a obtenu le maintien du rendement global à 120 hl/ha et la quantité normalement vinifiée (QNV) à 6 hl d'alcool pur par ha (hl d'AP/ha).
Mais il a aussi proposé d'arrêter le système de double fin, qui permet d'affecter la récolte d'une même parcelle à une multitude d'utilisations : distillation en cognac, élaboration de pineau-des-charentes, vinification en VDT ou en base pour les mousseux, jus de raisin... Ce système a toujours existé. Il est inscrit dans l'OCM des vins jusqu'en 2006. Actuellement, c'est l'article 28 qui prévaut, mais il n'a été accepté par la Commission européenne que pour 2001- 2002 et 2002-2003. Alors plutôt que de passer les trois campagnes suivantes sous un régime transitoire, le SGV a lancé une proposition qu'il souhaite voir mise en place dès la prochaine campagne : l'affectation pluriannuelle des parcelles à une production précise.

Ainsi, les Charentais auraient à se déterminer entre quatre options. Dans une parcelle donnée, ils devront se contenter de produire soit du cognac, soit du pineau-des-charentes, soit du VDT, soit au choix du jus de raisin ou du vin de base pour l'élaboration de mousseux. Selon Philippe Boujut, président du SGV, ces nouvelles règles permettraient de ' mettre en place un système basé sur l'offre et la demande, de construire l'équilibre du marché du cognac et d'obtenir une hausse significative des prix. Chaque produit doit correspondre, en qualité et en quantité, à la demande des acheteurs '.
Ce ' schéma d'avenir ' fait consensus dans la région. Il est soutenu par le Bureau national interprofessionnel du Cognac, le Comité du pineau et celui des VDP. Avec ce nouveau régime, les productions peu évoquées habituellement, comme les jus de raisins ou les vins de base mousseux, qui représentent plus de 1,4 Mhl, seraient enfin prises en compte, avec des hectares dûment affectés. Parallèlement, le potentiel des eaux-de-vie de cognac, de 480 000 hl d'AP/an, serait conforté.
En effet, en partant de l'hypothèse d'une QNV de 6 à 8 hl d'AP/ha, ces 480 000 hl équivalent à 65 000 ha. Le reste, soit 10 000 ha, serait donc affecté à l'avance aux autres productions. Ainsi, les besoins des différents débouchés seraient-ils couverts avec une garantie d'accès au marché pour chacun des produits élaborés dans les Charentes.

Les rendements en cognac, pineau et VDP devraient s'indexer, dans un premier temps, sur les règles actuelles. Pour le cognac, le rendement global sera maintenu à 120 hl/ha, mais la QNV pourrait être modulée en fonction des besoins. Le SGV table, pour le lancement du ' projet d'avenir viticole ', sur une QNV de 8 hl d'AP/ha. L'excédent devra être dénaturé ou distillé à 94,8 % avec interdiction d'en faire du brandy. Pour le pineau, le rendement devrait être de 80 hl/ha. Quant aux produits destinés à la transformation, les rendements seraient les suivants : 130 hl/ha de vins de base et, sur la même parcelle, 50 hl de jus de raisins, ou 180 hl de jus de raisins uniquement. La surveillance s'accroîrait pour veiller à ce que ces jus ne soient pas transformés en d'autres produits. Enfin, pour les VDT, c'est la réglementation en vigueur qui s'appliquera.

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