S'il ne vient pas de Champagne, ce n'est tout simplement pas du vrai champagne , tel est le message délivré par le CIVC dans quelques revues américaines. Cette campagne s'inscrit en marge des négociations entre les Etats-Unis et l'Union sur le commerce du vin.
Depuis le 15 janvier 2003, de grands points d'interrogation interpellent les lecteurs américains. Les questions suggèrent des origines loufoques pour des produits américains connus : les pommes de Washington proviennent-elles du Nevada ? Le saumon d'Alaska de Floride ? Les oranges de Floride du Maine ? Ce qui reviendrait à demander à un Français si le nougat est fabriqué à Nantes ou la choucroute à Montpellier...
En partant du principe que certaines denrées proviennent de lieux précis, le CIVC (Comité interprofessionnel des vins de Champagne) amène le lecteur à prendre conscience que le champagne ne peut provenir que de la Champagne. ' Notre but est de prendre les consommateurs américains à témoin en leur disant que l'origine, c'est important, précise Daniel Lorson, responsable de communication au CIVC. Nous avons choisi des exemples significatifs aux yeux des Américains, des produits emblématiques autres que le vin. En matière de vin, les consommateurs américains n'ont pas encore de réflexe géographique. ' Le budget de la campagne dépasse 1,5 M$, financés par le CIVC, l'Onivins et la région Champagne-Ardenne.
La première vague est publiée dans Vanity Fair, The New Yorker Economist, New Republic, Weekly Standard, Wine Spectator et Saveur , ciblant les décideurs mais aussi les producteurs de vins américains. D'autres insertions devraient suivre, le CIVC espérant convaincre les autres AOC européennes usurpées de se joindre au combat. ' Notre message sera plus efficace s'il fédère d'autres produits européens ', explique Daniel Lorson. Des contacts avec les producteurs de Porto, de Rioja (Espagne), de Chianti (Italie) ou encore de Rhein Wein (Allemagne) sont en cours. Pour l'heure, la Bourgogne, plus précisément Chablis, envisage de rallier la Champagne. Et pour cause, aux Etats-Unis, il se vend sept fois plus de faux chablis que de chablis authentiques.
Les bulles sont moins sujettes à la contrefaçon, mais les volumes sont plus importants. Aux Etats-Unis, on compte deux à trois fois plus de faux champagne que de champagne français (20 millions de cols), représentant 50 millions usurpés, un sixième de la production annuelle de champagne !
Ce petit coup de projecteur s'insère dans le cadre, beaucoup plus vaste, des négociations sur le commerce du vin entre l'Europe et les Etats-Unis. Bien plus que sur le terrain publicitaire, c'est donc dans les bureaux des négociateurs que le respect des indications d'origine trouvera peut-être bientôt un écho. En contrepartie, les Américains souhaitent que le principe de la reconnaissance mutuelle soit adopté. C'est-à-dire qu'un vin apte à être vendu aux Etats-Unis le soit automatiquement en Europe, et réciproquement. Les pratiques oenologiques interdites en Europe sont au coeur du débat. Pour sensibiliser les parlementaires européens, le CIVC est allé à leur rencontre l'été dernier, puis les a invités aux vendanges 2002. En mêlant publicité et lobbying, le CIVC montre, une nouvelle fois, sa motivation à faire respecter l'utilisation du mot ' champagne '. Verdict courant 2003...