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Le synthétique s'implante en Europe

La vigne - n°140 - février 2003 - page 0

Le bouchon synthétique prend son envol sur les marchés traditionnels, lassés des goûts du liège, mais fidèles à l'image du bouchon. Les CHR servant le vin au verre lui réservent un très bon accueil.

'Chaque fois que j'ouvre une bouteille, j'ai peur de ne pas reconnaître mon vin , confie Seppi Landmann, viticulteur à Soultzmatt (Haut-Rhin). Je crains davantage les légers goûts liégeux, qui dénaturent le vin, que le véritable goût de bouchon . ' Il a donc décidé d'embouteiller son haut de gamme avec des synthétiques, ' parce que c'est sur cette catégorie que cela pose le plus de problèmes. Nos clients veulent une bouteille parfaite, ce qu'un bouchon de liège à 0,60 ou 0,75 euros ne garantit même pas . ' En 2002, il a conditionné 4 000 bouteilles avec un Nomacorc, un synthétique extrudé qui a l'avantage de ressembler au liège. Il semble relativement confiant.
Le liège garde encore la préférence des consommateurs, du moins dans les pays traditionnels, ' mais cela pourrait changer rapidement, estime Arnaud Immelé, oenologue du laboratoire Immelé, à Westhalten (Haut-Rhin). Si le liège faisait aujourd'hui son apparition sur le marché du bouchage, personne n'accepterait ses 5 à 7 % de défaillance ! ' Le ras-le-bol est général en Alsace, peut-être parce que les vins blancs sont plus sensibles. ' Il y a trois ou quatre ans, personne n'envisageait d'acheter du synthétique. Aujourd'hui, même certains viticulteurs bio se posent la question. '

Au Gaec Bonnet Huteau, à la Chapelle-Heulin (Loire-Atlantique), de petits volumes ont été conditionnés avec un synthétique (Nomacorc) à titre d'essai, il y a quatre ans. Depuis 2002, c'est une gamme complète qui est ainsi bouchée. Une partie de ces bouteilles est destinée à la vente directe. ' Techniquement, ce produit nous satisfait, tant en termes de goût que de couleuse , sur nos vins d'entrée de gamme à courte rotation (trois ans environ), précise Jean-Jacques Bonnet. Ce qui n'est pas le cas avec la plupart des bouchons utilisés en Muscadet, car le prix des entrées de gamme tire forcément la qualité vers le bas. Ma politique, c'est donc soit le tout synthétique, soit un très beau naturel. L'intermédiaire n'apporte ni les garanties de l'un, ni la qualité de l'autre. '
Au domaine de la Grange, à Mouzillon (Loire-Atlantique), Dominique Hardy s'est également posé la question du synthétique pour le gamay rosé et le muscadet. Lassé des problèmes de goût de moisi sur ses entrées de gamme sur lesquelles il utilisait un bouchon technique, il a essayé deux synthétiques (NuKorc et Nomacorc) en 2002 sur près de 15 000 bouteilles, vendues en CHR en France. Pour ce choix, il s'est basé sur l'expérience des laboratoires oenologiques et d'autres vignerons.
De plus en plus de viticulteurs s'intéressent au synthétique. L'accueil de la clientèle française reste une inconnue. Selon Jean-Jacques Bonnet, ' les avis sont variables. Nous avons des retours positifs des particuliers, d'autres sont indifférents. Il y a bien quelques cas de rejet, mais difficiles à mesurer, car pas toujours déclarés . ' Dominique Hardy confirme cette tendance, précisant qu'un seul client ' a trouvé le vin moins bon simplement parce qu'on avait changé le bouchon. Mais il est revenu sur son opinion depuis '. En revanche, le synthétique remporte un franc succès auprès des CHR servant le vin au verre, très satisfaits de n'avoir plus à craindre de goût de bouchon.

Les synthétiques représentent actuellement environ 5 % du marché mondial du bouchage, selon la Fédération française des syndicats du liège. Ils conquièrent peu à peu les marchés traditionnels du fait de leur ressemblance avec un bouchon en liège et des garanties qu'ils apportent en terme de goût.
Les fabricants ont trop peu de recul sur ces produits pour les recommander sur des vins de garde. Selon Sylvain Luneau, du laboratoire Val OEno en Val-de-Loire, ' ces produits peuvent convenir sur des vins blancs, même de garde, mais nous n'avons pas de recul sur les rouges pour des gardes supérieures à deux ans '. Dans les régions productrices de vins blancs (Alsace, Mâconnais, Muscadet), le synthétique commence à se faire une place.

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