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Stabiliser les cours du vrac : un pari difficile

La vigne - n°142 - avril 2003 - page 0

Réserves qualitatives, transparence des marchés, prix éthiques, contractualisation, les initiatives ne manquent pas pour tenter d'équilibrer les marchés du vrac. Avec plus ou moins de réussite.

Poussée de fièvre ou déprime : lorsque les prix des vins en vrac font trop ' le Yo-Yo ', c'est toute la filière qui souffre. Et chacun aimerait bien connaître un remède magique aux variations excessives. Mais ' aucun système ne peut stabiliser les prix du vrac ', constate implacable Jean-Pierre Py, président de la Fédération nationale des syndicats de courtiers en vins et spiritueux. ' Quoi que l'on puisse mettre en place, il y a toujours un revers à un moment ou un autre. ' Au final, c'est l'adéquation de l'offre à la demande qui commande. La principale marge de manoeuvre consiste à jouer sur cet équilibre, d'autant que toute intervention sur les prix est prohibée. Chaque région tente d'actionner ses propres leviers : réserve qualitative, prix éthiques... avec plus ou moins de bonheur.
' C'est la cinquième campagne où nous conservons une bonne stabilité des prix, affirme Jérôme Villaret, d'Inter Rhône, autour de 122 euros/hl pour les côtes-du-rhône, alors, qu'auparavant, les cours pouvaient fluctuer de 99 euros/hl à 130 euros/hl. '

Inter Rhône possède-t-elle une arme secrète ? Non, mais l'interprofession a mis en place les outils prévus par l'organisation commune de marché. D'abord, la communication avec l'enregistrement et la diffusion d'informations sur les transactions. Une meilleure transparence a un effet réconfortant. Elle limite les rumeurs, les spéculations et les paniques. Elle fait office de thermomètre et permet aux opérateurs de se positionner.
Deuxième point, la mise en place d'une réserve qualitative, depuis 1998, et qui totalisait 200 000 hl à la fin de la campagne 2001-2002. Elle bloque des vins et assainit le marché. Elle est débloquée en cas de déficit de récolte ou d'emballement des cours. La récolte 2002 étant peu abondante, les vignerons qui n'ont pas fait le plein sont autorisés à libérer la réserve pour mettre en vente l'équivalent du rendement autorisé, soit 52 hl/ha. Sur le plan régional, cette mesure devrait se solder par une diminution du volume en réserve. On estime qu'il devrait rester 150 000 hl en 2003.
A Cahors, la réserve qualitative atteint presque une récolte. ' Mais le plus important, selon Jean-Marie Sigaud, président de l'interprofession des vins de Cahors, est d'établir des relations cordiales avec les maisons de commerce pour connaître les tendances et les difficultés du marché. Ensuite, il faut inciter les vignerons à stocker jusqu'à ce que les cours se redressent . '
Ainsi, à la fin de l'année dernière, ils ont gardé pendant trois mois leur millésime 2001, le temps que le marché revienne, en janvier 2003, à des cours entre 126 et 130 euros/hl (126 euros/hl est le prix de référence calé sur le prix de revient). Pour arriver à ce résultat, qui équivaut à une mise en réserve supplémentaire et volontaire, il a fallu un travail de relations humaines, mais aussi d'information titanesque.
Tout autre est la situation dans le Bergeracois. Là, il n'y a pas de réserve. Après une très forte hausse en 1998, les prix ont commencé à chuter pour atteindre des tarifs de 750, voire 680 euros/tonneau de 900 l en fin de campagne 2002. En novembre 2002, la situation devenant difficile, négoce et viticulture se sont accordés pour définir un prix éthique. Basé sur l'estimation du coût de revient, il s'élève à 770 euros le tonneau. Par ailleurs, dans l'espoir de mieux négocier, sept coopératives de Dordogne projettent de mettre en place une plate-forme commune de vente. Elle devrait être opérationnelle dès la prochaine campagne.

Entré dans une spirale infernale depuis deux à trois ans, après une surchauffe en 1998, le Beaujolais s'est laissé surprendre par l'étendue de ses stocks. La réserve qualitative de 5 hl/ha en appellation Beaujolais et Beaujolais-villages, décidée en 2001-2002, n'a pas eu les effets escomptés. L'interprofession a pris la décision de rééquilibrer l'offre en retirant 90 000 hl du marché en juillet 2002. Cette opération a accéléré la prise de conscience de l'intérêt d'un pilotage des quantités disponibles en fonction des perspectives de débouchés, mais elle a eu les conséquences que l'on sait en terme d'image.
' Pour fonctionner, une réserve qualitative pas ne doit pas avoir de limitation dans le temps, on ne peut préjuger de la période à laquelle on va la libérer ', affirme Jean-Philippe Code, du CIVB (Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux). Ce système a été abandonné dans la région, sauf pour certaines appellations - les côtes qui, en 2002, ont bloqué le quart de la récolte soit 200 000 hl - qui en ont fait un moyen d'échelonnement des sorties. Ainsi, pour les premières Côtes de Blaye, la réserve est obligatoire et concerne la moitié de la récolte en 2002 (28 hl sur 56 hl). Elle sera débloquée à l'automne 2003. ' L'objectif est de ne pas saturer le marché en libérant 300 000 hl d'un coup ', explique Christophe Château, directeur du syndicat.
En Bourgogne, des expériences peu satisfaisantes de blocage des volumes ont été tentées. ' Avec cent appellations, il est très difficile d'organiser une gestion collective comme en Champagne ', commente André Ségala, directeur du Bureau interprofessionnel du vin de Bourgogne. Dans les pistes de réflexion, le renforcement des contrats négoce-production a la cote : il est auréolé d'une vertu équilibrante sur le marché.




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