Le décès prématuré d'un conjoint peut avoir de graves conséquences financières. Le conjoint survivant bénéficie de droits accrus depuis juillet 2002. Mais la donation entre époux permet une protection encore plus efficace.
Avant le 1er juillet 2002, le conjoint survivant était le parent pauvre de la succession lors d'un décès dans le couple. En présence d'enfants, il n'héritait que de l'usufruit du quart de la succession. Il passait donc après ses descendants, et parfois même après la famille de son époux. Cet ' oubli ' du conjoint pouvait générer des drames personnels. La loi du 3 décembre 2001, applicable depuis juillet 2002, hisse le conjoint au rang d'héritier légitime et améliore ses droits, notamment en l'absence de donation entre époux ou de contrat de mariage. Désormais, le conjoint survivant bénéficie du quart des biens en pleine propriété ou de 100 % en usufruit. De plus, il se voit octroyer un droit au logement. Cette loi marque une rupture dans le droit successoral français, qui privilégiait les liens du sang aux liens conjugaux, la ' pièce rapportée ' pouvant représenter un danger pour le patrimoine familial...
La France rattrape donc son retard par rapport aux autres pays européens : en Belgique, le conjoint survivant bénéficie de l'usufruit sur toute la succession, alors qu'en Italie, il reçoit la moitié de la succession en pleine propriété s'il y a un enfant, et un tiers s'il y a deux enfants ou plus.
Même si le conjoint survivant est désormais mieux pris en compte, la souscription d'une donation entre époux conserve un réel intérêt en le protégeant plus efficacement. L'objectif est de permettre au dernier vivant de recevoir plus que ce que la loi prévoit. La donation entre époux est un acte révocable, à la différence des dispositions prises dans le contrat de mariage qui, elles, sont définitives. Le recours à une donation suppose une réflexion entre les époux sur le devenir de leurs patrimoines respectifs. Les biens familiaux - un domaine viticole par exemple - doivent-ils rester dans la famille ou non ? Le patrimoine de chacun des époux, les relations entre les beaux-parents et le gendre ou la belle-fille, dans le cas d'un bien professionnel familial, entrent en ligne de compte.
Comme le dit, avec une pointe d'humour, un notaire, ' réfléchir à une donation entre époux ne fait pas mourir. Les Français affichent de grandes réticences à réfléchir aux conséquences de leur décès, car la mort reste un sujet tabou. Mais nous voyons souvent des conjoints en situation difficile à la suite d'un décès prématuré. A la douleur morale s'ajoutent des problèmes financiers très lourds, qui auraient pu être limités. C'est d'autant plus vrai pour un couple d'exploitants viticoles travaillant ensemble, car les capitaux engagés sont importants, et les patrimoines privés et professionnels sont, le plus souvent, imbriqués '.
La donation entre époux, également appelée ' donation au dernier vivant ', permet à chacun de conserver la maîtrise de son patrimoine pendant leur vie commune. Elle recèle peu d'intérêts en l'absence de descendance, sauf si l'un des conjoints a reçu en propre et à titre gratuit des biens de ses parents. L'une des principales vertus de la donation entre époux consiste à protéger le membre du couple survivant de sa belle-famille ou des enfants issus d'une autre union. Ainsi, si les parents sont toujours présents et en l'absence d'enfants, les conjoints peuvent se faire mutuellement don de la nue-propriété de réserve. Au décès du conjoint, le survivant deviendra propriétaire de la moitié de la succession et nu-propriétaire de l'autre moitié. Ses beaux-parents bénéficieront de l'usufruit de la moitié du patrimoine laissé par leur enfant. Sans l'acte de donation, le conjoint n'aurait pas pu devenir nu-propriétaire de la moitié de l'actif successoral. De même, en présence d'enfants d'une autre union, la donation entre époux permet au survivant de bénéficier de la jouissance de l'intégralité de l'actif successoral. Sans donation, le conjoint doit partager la propriété avec les descendants de son époux décédé.
Lors de la signature de l'acte, les notaires conseillent généralement de ne pas choisir entre les différentes options qui s'offrent au survivant (propriété ou usufruit). Il est préférable de laisser le maximum de choix au survivant, qui prendra sa décision selon la configuration familiale du moment et selon ses besoins. Un fichier informatique, centralisé à Aix-en-Provence, recense toutes les donations entre époux. Sur le plan de la fiscalité, qu'importe la nature de l'enrichissement, le bénéficiaire de la donation est soumis au même régime que s'il héritait selon la loi.