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Des vignerons délèguent les traitements

La vigne - n°143 - mai 2003 - page 0

Moins de souci de main-d'oeuvre, d'entretien et de réglage de matériel, voilà ce que recherchent les vignerons qui délèguent leurs traitements à des entrepreneurs de travaux viticoles. Ces prestataires font valoir leur expertise pour les convaincre de leur confier une mission aussi délicate.

Pris entre les difficultés de recrutement, la multiplication des contraintes réglementaires et les exigences croissantes de qualité, les vignerons doivent gérer au mieux la main-d'oeuvre et le matériel. Le recours à des entreprises de travaux agricoles reste marginal, mais progresse rapidement. Il concerne des tâches aussi délicates que les traitements phytosanitaires.
Les raisons qui amènent les vignerons à confier ces opérations à un prestataire sont diverses. ' Nous prenons en charge le programme annuel de traitements d'une dizaine de domaines. Il peut s'agir d'investisseurs, qui nous délèguent tout leur vignoble, comme de vignerons, qui nous confient seulement un site éloigné de leurs autres parcelles, par exemple. Pour des raisons de logistique, nous sommes alors mieux placés qu'eux pour intervenir. Ils préfèrent s'agrandir en nous déléguant le travail, et conserver du temps pour s'investir dans la commercialisation, une fonction qui dégage plus de valeur ajoutée ', explique Patrick Bonnamy, de l'entreprise de travaux agricoles Banton et Lauret, en Gironde.

Les pluriactifs, possédant seulement quelques hectares, n'ont pas toujours la disponibilité pour intervenir au bon moment dans leurs vignes. Trouver des ouvriers qualifiés et autonomes devient difficile, et ils préfèrent confier le travail à une entreprise qui dispose de matériel performant, bien entretenu, et de personnel formé et encadré. Les vignerons proches de la retraite peuvent aussi faire ce choix, lorsqu'ils n'ont pas de successeur. Ils évitent ainsi d'avoir à investir, en fin de carrière, dans le renouvellement du pulvérisateur ou la mise aux normes de l'aire de remplissage et du local phytos. L'entreprise, avec plus de surface à traiter, est souvent mieux placée pour amortir ce type d'investissements.
' Je suis équipé de trois enjambeurs avec des rampes à pendillards qui traitent neuf rangs à la fois, et qui font chacun 1 000 h/an. Les chauffeurs sont formés et connaissent les parcelles qu'ils doivent traiter. Je tourne de l'un à l'autre avec une tonne de 2 000 l pour les ravitailler et vérifier que tout va bien. Pour conserver un client, il faut être efficace à 100 %. Je suis très sollicité, mais je ne peux pas prendre davantage de surface ', explique James Dardenne, vigneron et entrepreneur, qui traite en prestation 60 ha de vignes en Champagne.
' Le réglage des pulvérisateurs devient sophistiqué, alors que la main-d'oeuvre qualifiée se fait rare. En travaillant à 150 ou 200 l/ha, s'il y a une erreur de dosage sur une cuve de 2 000 l, cela concerne tout de suite des surfaces importantes. En tant qu'entrepreneur, j'ai un agrément d'applicateur et je fais suivre, tous les ans, deux jours de formation à mon personnel. Je m'engage par contrat sur la qualité de l'application, et j'invite mes clients à mettre des papiers hydrosensibles dans leurs vignes pour la vérifier ', souligne Jean-Marie Villaret, qui réalise l'ensemble des traitements sur une dizaine de domaines de l'Hérault.
La délégation peut concerner l'application seule, le vigneron gardant la responsabilité du choix des produits et des dates de traitements. Le coût est alors compris entre 30 et 60 euros/ha et par traitement, en fonction de la surface et du groupage des parcelles. Il peut se négocier à l'heure, à l'hectare, ou dans un forfait annuel. Lorsque l'entreprise doit tout prendre en charge, le coût s'approche des 100 euros/ha. En cas d'échec du traitement, sa responsabilité peut être engagée, et elle dispose, pour cela, d'une assurance adaptée.
' Sur une partie de la surface que je traite, j'observe les vignes et je décide moi-même du programme à réaliser, en m'appuyant sur les avertissements, le réseau Magister et un consultant privé. Je choisis les produits et je négocie même les prix. Sur l'autre partie, c'est le client qui m'indique ce que je dois faire ' , précise James Dardenne.
' J'ai délégué l'application, mais pas l'observation des vignes, ni le choix des produits et des dates de traitement. C'est un travail que j'aime, il fait partie du coeur du métier de vigneron, et je tiens à le conserver ' , explique Jacques Astruc, qui gère plusieurs domaines appartenant à un négociant du Languedoc. Depuis trois ans, il fait appel à l'entreprise de Jean-Marie Villaret pour réaliser les traitements sur l'un de ces domaines, qui couvre 80 ha. ' Nous utilisions auparavant un châssis de machine à vendanger équipé d'une cellule de pulvérisation et de manchons rajoutés. L'ensemble ne répondait plus aux normes de sécurité, il fallait investir. J'ai comparé les coûts avec du matériel neuf en propriété et en prestation. Durant les dix premières années, c'était l'entreprise qui revenait le moins cher. J'ai franchi le pas et, aujourd'hui, je ne reviendrais pas en arrière. '

Les traitements sont réalisés avec un enjambeur équipé pour travailler sur quatre rangs à la fois, en face par face. ' Lorsque je juge qu'il faut intervenir, j'avertis l'entreprise par fax au moins 24 h à l'avance. Je dispose d'un plan du domaine informatisé, il me suffit de l'imprimer pour indiquer précisément au chauffeur les parcelles à traiter. '
Jacques Astruc a également choisi de déléguer la taille, l'ébourgeonnage et les vendanges à un prestataire spécialisé dans les travaux manuels. ' Je n'ai plus besoin que de deux permanents sur 80 ha. J'ai trouvé deux jeunes sérieux que j'ai formés et, pour le reste du travail, je fais confiance à mes prestataires. '

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