Christophe et Patrick Chabrier mènent, en parallèle, la vente directe en bouteilles et le travail en partenariat avec des négociants, pour lesquels ils élaborent des vins aux profils bien définis et vendus en vrac.
'Lorsque nous avons décidé, en 1998, de quitter la coopérative pour créer notre cave, nous ne connaissions rien à la vinification. Nous avons appris avec nos acheteurs. N'ayant pas d'habitudes de travail, nous avons mis leurs conseils en oeuvre sans à priori, et nous avons rapidement obtenu des résultats ', racontent Patrick et Christophe Chabrier, vignerons à Bourdic (Gard).
Avec Louis, leur père, et Robert, leur oncle, ils cultivaient alors 115 ha de vignes, 10 ha d'asperges et 120 ha de céréales au sein d'un Gaec à quatre. Leur vignoble, replanté avec des cépages aromatiques, produisait des vins de pays et de table. ' La coopérative du village était dynamique, mais nous avions envie de vivre autre chose. Nous en sommes sortis en deux étapes. Avec mon frère Christophe, nous avons d'abord créé la SCEA domaine Chabrier fils, et nous avons investi 450 000 euros en 1998 dans une première cave de 4 000 hl. Puis, en 2000, nous avons créé à quatre la SCEA domaine du Vieux Castille et nous avons investi 450 000 euros dans une deuxième cave de 5 500 hl, ainsi que 380 000 euros dans un caveau de vente ', précise Patrick Chabrier.
Le hasard a placé sur leur route l'entreprise de négoce Domaines Michel Bernard, qui cherchait des fournisseurs prêts à travailler en partenariat. ' Elle nous a mis le pied à l'étrier pour élaborer des vins de qualité. Nous avons beaucoup appris avec leur oenologue. ' En parallèle, les frères Chabrier ont commencé à élaborer leurs propres cuvées pour la vente directe en bouteilles. De 15 000 cols en 1998, ils sont passés à 120 000 cols en 2002. ' Avec le TGV, nous ne sommes plus qu'à trois heures de Paris, et les résidences secondaires se multiplient. Cela nous amène une clientèle d'amateurs de vins, qui achètent facilement des quantités lorsque le rapport qualité/prix leur convient ', souligne Patrick.
Près de 70 % des bouteilles sont commercialisées au caveau sous les dénominations ' vin de pays d'Oc ' et ' vin de pays du Duché d'Uzès ', à un prix qui va de 3,10 à 6,50 euros par col. ' C'est là que nous obtenons la meilleure valeur ajoutée. Nous ne cherchons pas à pousser à fond la bouteille dans les autres circuits. Cela nous demanderait trop de travail pour une valeur ajoutée moindre. Nous approvisionnons quelques cavistes et restaurateurs situés dans notre environnement proche, car ce sont de bons prescripteurs. A l'exportation, nous travaillons seulement avec deux importateurs, en Suisse et en Irlande. Nous préférons nous limiter à des clients choisis qui nous apportent de la notoriété. Pour le reste, nous misons sur le partenariat pour valoriser nos vins en vrac ', explique Patrick.
Au fil des rencontres, les deux frères ont diversifié leurs partenaires. Ils travaillent aujourd'hui avec quatre négociants et un acheteur de raisin. ' Pour la récolte 2003, tout est prévendu. Chaque parcelle est affectée à un client et à une cuvée. En fonction du profil de vin demandé, nous déterminons ensemble le travail à réaliser à la vigne et nous nous fixons un objectif de rendement. Les oenologues de nos acheteurs viennent visiter les parcelles, et nous accompagnent durant les vendanges. '
En 2002, les raisins ont été vendus à 0,49 euros/kg pour le cabernet-sauvignon et le sauvignon blanc. La rémunération des vins en vrac s'est étalée entre 45 euros/hl pour des carignans de plaine et 150 euros/hl pour une cuvée haut de gamme. Les rendements, adaptés au profil du vin recherché et à la parcelle, ont varié de 100 hl/ha pour des rosés en vin de table à seulement 40 hl/ha pour les cuvées sélectionnées de vins de pays.
' Sur le domaine Chabrier fils, nous obtenons une bonne valeur ajoutée, mais sur celui du Vieux Castille, c'est un peu juste. Pour progresser, nous devons monter en gamme ', affirme Patrick. Pour l'instant, tous les vins sont vendus dans l'année. Les frères Chabrier vont commencer à élever des cuvées et ils prévoient, à terme, la construction d'un chai spécifique. A la demande de leurs clients, ils ont aussi commencé à pratiquer des vinifications en fûts avec bâtonnage et élevage sur lies. ' Nous sommes ouverts à leurs demandes, nous aimons apprendre ! Et s'il faut investir pour travailler mieux, ce n'est pas un problème, tant qu'il y a une rémunération en face . '
Sur le haut de gamme, ils estiment que la marge n'est pas encore pleinement satisfaisante. ' Pour diminuer les rendements, nous devons investir beaucoup d'heures dans les travaux en vert. Dans quelques années, lorsque les vignes se seront rééquilibrées, cela devrait aller mieux ', affirme Patrick.
La prochaine étape sera le passage des vins de pays du Duché d'Uzès en VDQS, qui devrait intervenir pour la campagne 2004-2005. ' Nous sommes en train d'adapter notre encépagement pour profiter à fond de cette nouvelle possibilité. Nous ne vendrons pas forcément nos vins plus chers. Mais nous comptons bien mettre en évidence la typicité de notre terroir et progresser encore en notoriété . '
L'EXPLOITATION EN DATES
1986 Patrick s'installe avec son père et son oncle
1989 Installation de Christophe
1993 Programme de plantation intensif
1998 Construction d'une cave, 1 er partenariat
2000 2 ième cave et caveau de vente
2002 Inondation (perte de 1 000 hl)
2003 Achat d'une effeuilleuse