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Les staves, entre copeaux et ba rriques

La vigne - n°175 - avril 2006 - page 0

Entre un élevage en barriques, plutôt onéreux, et des copeaux développant des notes boisées moins complexes, les staves jouent la carte du compromis. Ces douelles que l'on fixe dans les cuves ont une durée de vie de dix à douze mois. Elles peuvent servir pour deux vins.

Avec la modification du règlement européen n° 1 493/1999, l'utilisation de morceaux de chêne dans l'élaboration du vin est en passe d'être autorisée. Les produits alternatifs des tonneliers, jusqu'alors cantonnés au rang d'essais, devraient se développer. Outre les copeaux de toutes tailles, un produit semble se démarquer : le stave. Il occupe une position intéressante de compromis entre copeaux et barriques. La plupart des tonneliers en proposent, comme Nadalié, Radoux, Toneleria Nacional, World Cooperage...

' Il s'agit d'une douelle de chêne ayant subi une chauffe particulière dite convective. Contrairement à une chauffe traditionnelle radiative, où l'on observe un gradient de chauffe dans le bois, le système convectif est basé sur un flux d'air pulsé. On obtient un résultat plus homogène avec, peut-être, moins de complexité aromatique ', explique Laurent Vives, de la Tonnellerie Radoux, parlant des produits de la gamme alternative Pronektar.
Ces douelles, d'une surface avoisinant les 0,10 m 2, sont assemblées sur une structure en Inox adaptable à toutes les cuves et tous les matériaux, de façon à obtenir la surface boisée souhaitée. Le prix unitaire fluctue entre 2 et 2,50 euros HT en fonction des fournisseurs, du type de bois et du niveau qualitatif désiré. Avec 3 à 3,5 douelles/hl, pour un rapport surface boisée sur volume approchant le tiers de celui d'une barrique, il faut compter 1 500 euros HT pour équiper, par exemple, une cuve de 200 hl.

Les staves offrent une grande flexibilité d'utilisation. Des essais ont été menés aussi bien en vinification qu'en élevage, sur blancs comme sur rouges, avec des durées de séjour au contact du bois de trois mois à un an. ' L'essentiel, c'est de bien connaître son vin et de savoir quel type de boisé on souhaite ', résume Jean-Claude Mas, des Domaines Paul Mas, à Pézenas (Hérault). Il a mené des essais sur un blanc en élevage, et parfois même dès la vinification. Comme pour des barriques, il a élevé sur une même installation un blanc, puis un rouge (six mois chacun). ' Le système ne supporte pas l'air et au bout de douze mois, il ne reste plus grand-chose à extraire. '
Les Domaines Paul Mas ont opté pour du chêne américain ' parce qu'il correspond plus à nos vins méridionaux, il apporte un boisé plus fin '. Les vins subissent des remontages réguliers, ce qui permet de créer un effet de bâtonnage pour les blancs sur lies, mais également d'aérer les vins à l'aide d'un Inox fritté en cas de début de réduction. Le résultat paraît convaincant : ' On obtient des vins opulents, fruités, aromatiques et riches, des vins qui correspondent aux attentes des clients. '
' C'est l'intermédiaire entre fût et copeaux ', déclare Vincent Bechard, maître de chai de la Cave des vignerons de Calvisson (Gard). Cette cave a effectué des essais sur des blancs en vinification et en élevage. Elle a pratiqué des remontages pour bâtonner, en association avec la micro-oxygénation, pour essayer de reproduire les conditions d'élevage en barriques. ' On est plus proche du boisage d'un fût qu'avec les copeaux, mais avec les oxydations ménagées en moins. ' En effet, ' les phénomènes d'oxygénation et de stabilisation d'un fût sont très difficiles à obtenir en cuve. On obtient cependant un effet structurant, une fraîcheur et une durée de vie du boisé nettement supérieurs aux copeaux ', explique Laurent Vives.

Pour autant, les vins obtenus à Calvisson ' sont ronds et gras, et développent des arômes boisés différents du fût, mais pas moins intéressants si l'on réfléchit en termes de gamme d'arômes et de possibilités d'assemblage à l'avenir '.
' Les staves permettent de développer un côté vanillé qui constitue un atout indéniable à l'export ', affirme Patrick Chabrier, du Domaine Chabrier, à Bourdic (Gard). Il a effectué des essais en élevage sur vins rouges issus de cabernet-sauvignon et de merlot. Avec une cuve en béton équipée, il a boisé un premier vin grâce à un passage de trois à quatre mois, puis un deuxième vin a profité de l'installation pendant six mois. ' Cette cuve n'était pas équipée d'un dispositif de micro-oxygénation, mais le résultat est très satisfaisant sans cela. ' Là encore, la durée de vie des staves varie de dix à douze mois.

Outre sa capacité à développer des touches franchement vanillées, ' l'autre intérêt de ce dispositif, c'est le prix de revient ', fait remarquer Patrick Chabrier. D'un expérimentateur à l'autre, en fonction de l'utilisation des staves, les coûts varient du simple au triple (4 à 15 euros/hl) suivant le nombre de vins passant sur l'installation. L'utilisation de douelles est nettement moins chère que l'élevage en barriques (50 euros/hl en moyenne), mais plus coûteuse que les copeaux (2 euros/hl). Les différences s'expliquent par des économies au niveau du temps de travail, de la main-d'oeuvre et aussi de la place.
Les staves offrent donc la possibilité de dégager des marges de production, qui peuvent être réincorporées dans l'équipement, la communication ou autre, suivant la stratégie propre à chaque cave. Dans la mesure où le client ne réclame pas absolument un boisé-barrique, nous avons peut-être là une arme permettant à certains de rester compétitifs vis-à-vis des vins du reste du monde.
Il reste cependant à voir quelles seront les conditions d'utilisation décrétées par l'Europe. Les staves seront-ils autorisés sur les AOC et sous quelles règles concernant l'étiquetage ?

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