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Sancerre : 'Nos négociants sont des viticulteurs'

La vigne - n°148 - novembre 2003 - page 0

Tous les metteurs en marché de Sancerre ont leurs racines dans le terroir de l'appellation. Ils la vendent avec d'autant plus de conviction, au travers de tous les circuits imaginables.

Sancerre, petite appellation de 2 600 ha, produit 160 000 hl environ, dont 80 % de blanc. ' Les stocks sont toujours faibles, la demande restant supérieure à l'offre, expose Alexandre Mellot, président du Syndicat des négociants des vins du Centre. Le corollaire, ce sont des prix très généreux. ' Le prix du vrac, aujourd'hui stabilisé, a crû de 20 % en cinq ans.
La croissance des surfaces est maîtrisée : depuis les années 60, l'Union viticole sancerroise a plafonné les autorisations de plantations nouvelles à 50 ares par exploitant, afin ' d'obliger les producteurs à s'impliquer dans la commercialisation, explique Denis Vacheron, président de l'union. Nous ne voulions pas de viticulteurs qui plantent sans être sûrs de vendre '.
A peu de choses près, l'appellation est vendue par les opérateurs du cru. Les négociants extérieurs n'obtiennent qu'un tiers des 30 000 hl vendus en vrac. Et ils sont du Val de Loire. Quant au négoce local, il achète plutôt des raisins ou des moûts. D'ailleurs, ses racines sont dans le terroir : ' Un négociant, chez nous, est souvent un viticulteur qui a réussi, explique Denis Vacheron. Il est devenu négociant, parce qu'il manquait de volume pour ses marchés. Mais il est viticulteur avant tout. ' Alexandre Mellot confirme. Il pousse même le raisonnement plus loin : grâce aux volumes qu'ils détiennent, les négociants sont présents sur tous les marchés et sont de toutes les manifestations. ' Nous assurons la promotion du sancerre dans tous les pays, car en tant que viticulteurs, nous mettons toujours en avant notre appellation. ' Les négociants sont des locomotives.

Une autre explication du succès de cette appellation est la diversité des marchés. ' Un peu, partout ', pour reprendre les mots de Denis Vacheron. Dans chaque circuit, les Sancerrois ont plusieurs interlocuteurs. Ils ne dépendent jamais d'un gros acheteur. L'export représente un peu moins de la moitié des sorties de vin, vers une douzaine de destinations. Les vignerons assurent la moitié des exportations en volume et plus de 150 viticulteurs exportent, sur 342 déclarants.
En France, l'appellation Sancerre est surtout destinée à des réseaux spécialisés, à forte valeur ajoutée. 30 % des volumes sont vendus en restauration, 30 % par des cavistes et seulement 10 % en grande distribution. Les 30 % restants sont achetés à la propriété. L'essentiel de la vente en grandes surfaces est réalisé par l'unique coopérative de l'appellation, la Cave des vins de Sancerre, dirigée par Fabrice Robineau. ' La cave a fait beaucoup pour la connaissance du produit au niveau du grand public, estime-t-il. Même si la valorisation est moindre, il ne faut pas négliger un circuit qui commercialise 70 % des vins consommés à domicile. ' ' C'est l'histoire de cette région, qui fait que l'appellation est connue ', si l'on en croit Benoît Roumet, directeur du Bureau interprofessionnel des vins du Centre (BIVC). L'interprofession ne communique pas sur cette appellation, faute de budget. La promotion est faite sur les salons, par les producteurs ou les négociants qui se déplacent.
' Notre communication est dans la bouteille. La qualité doit être au rendez-vous, pour ne jamais décevoir. Mais nous devons aussi produire un vin qui ne peut pas être fait ailleurs. '
Sancerre joue à plein la carte de l'appellation, du terroir. ' Nous ne vendons pas du sauvignon, mais du sancerre ', clame Benoît Roumet. C'est pourquoi il considère que l'intégration du produit dans sa région est essentielle. Ce que l'on comprend d'autant mieux à la lumière des chiffres de ventes directes à la propriété. La proximité de Paris est l'un des arguments avancés pour expliquer le succès des ventes au caveau. ' Nous travaillons beaucoup actuellement au niveau du tourisme. '
Il s'agit surtout de développer l'image du produit, et de faire en sorte que les consommateurs ' mettent autre chose que du vin derrière le mot Sancerre. La cathédrale de Bourges est à nous, le crottin de Chavignol aussi '. L'objectif est de créer une synergie entre les différents atouts régionaux. Le festival de bande dessinée Bulleberry a été notamment créé dans ce but.

' A l'occasion du dernier festival, l'épouse d'un des dessinateurs est venue me voir, en me félicitant pour les vins qu'elle jugeait très féminins, raconte Benoît Roumet. C'est pour moi une grande satisfaction, car de plus en plus, ce sont les femmes qui achètent les vins. Alors, si le style leur plaît, tant mieux ! '
Ce qui distingue le sancerre d'un autre sauvignon, c'est bel et bien son style. ' Les Anglo-5saxons apprécient ce qu'ils appellent la 'drinkability' de nos vins, c'est-à-dire leur facilité d'accès. ' Les vins de Sancerre correspondent au style de consommation actuel : ' Equilibre sur la fraîcheur, peu alcoolisés, mais ronds. ' Ils sont accessibles aux novices : ' Il n'y a pas besoin de clé pour boire du sancerre. ' Ce qui n'empêche pas les amateurs de ' 's'éclater', nous disposons de trois terroirs différents, assemblés ou non, qui confèrent au vin un potentiel de vieillissement plus ou moins grand '. La complexité existe pour ceux qui la recherchent, même si c'est une appellation monocépage.
Dans un contexte où la qualité des vins est en pleine progression, il fallait également que le sancerre suive. ' Les viticulteurs ont su rentrer dans un cercle vertueux, se réjouit le directeur de l'interprofession. Ils ont mieux valorisé leurs produits, donc ils ont investi pour poursuivre cette valorisation. ' Les investissements ont fait progresser la qualité des blancs. Aujourd'hui, ils profitent également aux vins rouges et aux vins rosés (respectivement 15 % et 5 % des volumes de l'appellation).


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