Le ' Nouveau projet professionnel ' nantais entrera en vigueur au cours de l'année 2004. A la clé : une réduction du potentiel de production du muscadet, le repositionnement de ce vin et sa revalorisation.
Confronté à une crise sans précédent, le vignoble nantais annonçait, en juin 2003, la mise en place d'un ' Nouveau projet professionnel ', dont la rédaction s'est terminée fin 2003. Le financement doit être bouclé au printemps 2004. Ce n'est pas la première fois que le vignoble annonce des mesures de restructuration. En 1996, un audit, réalisé par le cabinet Sofra, avait conduit à un premier plan d'aide à l'investissement. Aujourd'hui, il s'agit d'un train de mesures collectives.
Premier point et le plus important : la restructuration de la production. Le négoce réclame une plus grande cohérence de l'offre avec ses besoins, notamment pour le muscadet-sur-lies. Les sorties s'élèvent à 280 000 hl, alors que les viticulteurs en déclarent 400 000 hl. Dès l'année 2003, les négociants ont demandé la réduction des volumes déclarés.
Selon un second audit mené par Sofra en 2003, le potentiel de production du muscadet doit diminuer de 2 300 ha d'ici à 2008, celui du gros-plant de 1 000 ha. Le projet professionnel prévoit un arrachage volontaire définitif. La reconversion qualitative différée pourrait aussi s'appliquer. Le double objectif est de réduire les volumes et de faire progresser la qualité : l'arrachage s'appuie sur la redélimitation des appellations. Il n'a pas encore suscité l'engouement des viticulteurs. Les critères de recevabilité des dossiers sont jugés complexes, car l'arrachage ne doit pas être le fait de la pression foncière exercée par la ville de Nantes, mais bien d'un repositionnement qualitatif. La redélimitation est commencée depuis plusieurs années, notamment sur le Muscadet Sèvre-et-Maine, qui représente le gros des volumes. Elle est presque achevée sur les communes de Vallet et Le Loroux-Bottereau, où l'on retrouve une grande diversité de terroirs. C'est là que les experts ont rodé leur méthode qui sera extrapolée aux autres communes. La redélimitation devrait s'achever en 2006.
La reconquête passe aussi par une offre plus claire et un vin plus accessible. Le muscadet générique pourrait ainsi être plus sucré. ' Nous devons faire des muscadets comme les consommateurs les aiment, et pas comme nous aimons les boire ', reconnaît Marcel Jussiaume, président du Syndicat d'appellation. ' Cela peut se faire sans se renier en tant qu'appellation, renchérit Pierre Lieubeau, président de l'interprofession. Nous allons commencer à consulter producteurs et négociants sur le sujet. Nous envisageons une étude consommateurs, marché par marché. '
L'offre régionale devrait se repositionner sur trois segments : une grande base de muscadet, au-dessus les sur-lies; au sommet les crus communaux. En échange, la production attend de réels efforts en terme de communication. Pour 2004 - pudiquement appelée année de transition en terme de budget - la promotion sera concentrée sur la région nantaise, où le vin est peu connu et consommé.
D'ici à 2006, le budget de l'interprofession doit doubler et atteindre 3 Meuros. L'objectif non dissimulé de la production, en restructurant son offre, est d'obtenir une contractualisation plus forte de la part du négoce. Mais cela relève de l'initiative individuelle. L'interprofession compte sur une prise de conscience collective. Une méthode de travail sur les relations entre les deux familles est en cours d'élaboration. ' D'ailleurs, la notion de projet collectif voit sa limite quand on sort du Pays nantais, insiste Pascal Guilbaud, président du groupement des négociants et éleveurs des vins de Nantes. Or, entre 100 000 et 120 000 hl sortent de la région, soit pas moins de 20 % de l'appellation. ' Les deux familles souhaiteraient renforcer l'interprofession, pour lui donner les moyens de prendre des mesures volontaristes d'orientation des marchés.