Le président du Comité national vin de l'Inao a rendu public son projet de créer des AOC d'excellence. La Confédération des syndicats de défense des appellations n'en veut pas.
Le 29 avril, René Renou n'a pas enflammé le Comité national de l'Inao avec son projet de réforme des AOC. Convoqué en session extraordinaire, le comité a partagé son analyse des difficultés actuelles. Il a estimé qu'il était temps d'engager une réflexion pour trouver les moyens d'en sortir. Mais il ne s'est pas prononcé sur les idées de son président : elles ne font pas l'unanimité. ' La Cnaoc a demandé que des propositions différentes soient examinées ', a reconnu, diplomatiquement, René Renou, lors d'une conférence de presse le 4 mai. Pour cette organisation, les AOC doivent conserver leur unité. Or, René Renou veut les scinder en deux.
' Il y a deux logiques de production dans les AOC, affirme-t-il. L'une est moderne et s'inspire du positionnement des vins du Nouveau Monde. L'autre entretient un lien fort avec le terroir et la tradition. Si on n'en tient pas compte, si on considère qu'il y a une unité, on est amené à apporter une réponse médiane aux questions qui se posent à nous. On ne donnera pas satisfaction à ceux qui veulent plus de souplesse. On ne donnera pas non plus satisfaction à ceux qui veulent plus de rigueur. '
Afin de coller à cette réalité, René Renou propose de créer, à côté des AOC classiques, les AOC d'excellence. Les premières correspondraient à ' un positionnement plus flexible, en réponse à une demande de modernité souvent exprimée par le marché, que ce soit en termes de pratiques oenologiques ou d'étiquetage , indique un dossier de presse. La nouvelle catégorie renverrait à un positionnement affirmé de terroirs, de tradition et d'exigence. Les règles d'accession seraient extrêmement rigoureuses. L'engagement d'au moins 75 % des viticulteurs sera exigé pour demander l'accès à cette catégorie. '
Quels sont les critères objectifs qui départageraient l'ordinaire de l'excellent ? Il appartient à un groupe de travail d'y répondre. Ce groupe devra également dire sur la base de quels critères on attribuera à une entreprise le rang de site et terroir d'excellence. Par cette mention, l'Inao distinguerait les domaines d'exception au sein des appellations classiques. Le groupe de travail devrait présenter ses premières propositions en septembre. Lorsqu'elles seront définitivement adoptées, chaque syndicat serait amené à choisir son camp, en réécrivant son décret sur la base d'un canevas.
' Les décrets sont incomplets , déplore René Renou. Il faut les réécrire. Il est temps de dire ce que l'on fait et de faire ce que l'on dit. C'est la seul façon de regagner la confiance des consommateurs.. . ' Cela suppose d'aller dans le détail : les décrets devraient dire si l'on autorise les sélections massales ou les clones et, dans ce dernier cas, lesquels. ' En matière de traitements phytosanitaires, il faut dire ce qui est autorisé et ce qui est interdit. '
Troisième volet du plan : la mise à la disposition de l'Inao d'une brigade de contrôleurs provenant des douanes ou des fraudes. Là, il s'agit d'amener la peur du gendarme dans les vignes. Peut-être René Renou a-t-il été inspiré par le succès de la politique répressive en matière de sécurité routière.
Ce plan soulève un flot de questions. Qu'adviendra-t-il des simples AOC ? En quoi se distingueront-elles d'un vin de pays ? Les modalités de son annonce irritent de nombreux syndicats. Ils ont le sentiment que l'affaire est déjà bouclée, que l'on vient d'écrire une nouvelle page de l'histoire des AOC sans eux. René Renou jure que non : ' Le débat est ouvert . ' La Confédération des syndicats de défense des AOC (Cnaoc) a l'intention de faire entendre sa voix. Début mai, elle a refusé la création d'une nouvelle catégorie d'AOC : ' Les assouplissements doivent avoir lieu dans une autre logique de production, celle des vins de pays, et non pas dans les AOC. ' Elle a obtenu qu'au sein de l'Inao, un groupe de travail réfléchisse à la création d'un vin de pays dans les appellations qui n'en ont pas.