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Avocat et expert-comptable, les nouveaux conseillers de gestion

La vigne - n°155 - juin 2004 - page 0

Les avocats spécialisés et les experts-comptables deviennent très actifs sur le marché du conseil auprès des vignerons. Ils concurrencent les centres de gestion. Chacun a ses points forts. La pertinence des conseils tient à la capacité de l'interlocuteur à saisir les besoins de son client.

Il est loin le temps où le vigneron faisait ses comptes sur un petit cahier à spirale... L'univers des exploitations étant plus complexe, le recours à des spécialistes devient plus fréquent, voire indispensable. Et si beaucoup de vignerons adhèrent à un centre de gestion et d'économie rurale, on observe une montée en puissance des avocats spécialisés en viticulture et des experts-comptables.

' Même si la profession est bien informée, de nombreux vignerons ne s'adressent pas au bon interlocuteur , estime Michel Desilets, avocat spécialisé au barreau de Villefranche-sur-Saône (Rhône), dont la moitié de la clientèle est viticole. Quand ils ont un problème juridique, ils ne savent pas vers qui se tourner. Par conséquent, ils vont souvent au moins cher, voire gratuit, où ils obtiennent des réponses de circonstance et incomplètes. Par exemple, pour des problèmes de fiscalité, les exploitants vont voir leur comptable. '
' Notre premier contact avec les vignerons s'établit souvent lors d'un problème. L'idéal serait que les chefs d'exploitation viennent nous voir une fois par an pour faire le point, en préventif, sur leur entreprise. Nous pourrions alors examiner ensemble si la formule juridique de leur entreprise correspond le mieux à leur situation, et aussi les mettre en garde sur les risques auxquels ils s'exposent, concernant les contrats de travail, d'assurance, etc. ' Dans ce cabinet, un audit de ce type coûte moins de 750 euros HT, la consultation horaire s'élevant à 150-180 euros selon la complexité du dossier.
Basé à Libourne (Gironde), Olivier Monroux, avocat, travaille avec des vignerons de la France entière. Son champ d'intervention est large (transactions, installation, droits des marques viticoles, réglementation communautaire...) et il a décidé de ne pas pratiquer de tarif horaire. ' Je fournis une fourchette tarifaire à mon client. Je ne veux pas être un 'bandit' si le dossier est facile, et je souhaite gagner ma vie si j'ai un coup de génie. '

Olivier Monroux a, lui aussi, le sentiment d'un public averti, mais pas toujours clair sur ses attentes : ' Le vigneron connaît beaucoup de choses. Il se renseigne, compare, exerce souvent un mandat électif en tant que maire, administrateur de coopérative ou d'une banque. Mais il n'est pas rare qu'un vigneron de 45 ans, avec trois enfants, souhaite avoir le même montage juridique de société que son voisin célibataire de 75 ans ! ' Ils ne sont pourtant pas dans la même situation pour la transmission de leur bien.
Le rapport des vignerons avec les experts-comptables est différent. En leur confiant leur comptabilité, la relation s'inscrit sur du long terme et le conseil en gestion vient naturellement. Les vignerons apprécient également d'avoir un contact privilégié avec un professionnel qui sort du sérail agricole.
Pour Jean-Louis Giornal, implanté à Orange (Vaucluse), ' l'expert-comptable apporte une compétence dans un domaine vaste, allant de la comptabilité au droit des sociétés, du droit rural à la transmission de patrimoine. Je fais le point une fois par an avec mon client, pour estimer le temps que je lui ai consacré. En général, les trois premières années génèrent beaucoup de travail, qui n'est facturé que partiellement, car ma collaboration s'inscrit dans la durée. En moyenne, je consacre 15 h/an à la comptabilité d'un coopérateur, et 15 h à le conseiller, pour un montant annuel de 1 600 à 2 200 euros HT. Pour une cave particulière, le montant de ma prestation s'élève à 2 500 euros HT si mon client gère sa comptabilité sur un logiciel, et à 4 500-5 300 euros si j'effectue toute sa comptabilité, en plus du conseil. Je me base sur un taux de 50 euros/h. '

Pour faire face à la concurrence, la plupart des centres de gestion misent sur leurs points forts, à savoir leur spécialisation et leurs bases de données. C'est le cas du CDER de la Marne qui a 8 000 clients, dont 2 600 vignerons et 3 000 agriculteurs. ' L'effet de masse nous donne les moyens d'exprimer notre compétence, précise-t-on au CDER. Nous sommes spécialisés en comptabilité, gestion, conseil juridique et informatique, ce qui nous permet d'avoir une vue globale des exploitations. '
Le CDER propose des missions à la carte, mais surtout un abonnement annuel comprenant quatre niveaux d'intervention en gestion. L'offre va de l'accès aux statistiques et analyses de groupe au service Stratèges, qui comprend plusieurs visites d'un conseiller de gestion, lequel peut accompagner l'adhérent chez l'assureur ou le banquier. Tous les clients du centre de gestion reçoivent une lettre d'information hebdomadaire sur les nouveautés touchant à leur profession, et peuvent assister à des réunions sur des thèmes précis. Ils peuvent aussi contacter gratuitement l'un des vingt juristes du centre.
Par ailleurs, le CDER vient de créer un nouveau service, Stratégies placement, pour faire un point sur le patrimoine du vigneron, et proposer des actions adaptées à sa situation et à ses objectifs. Le coût de ce service va de 300 à 800 euros selon la nature du patrimoine. L'adhésion à un centre de gestion permet également de bénéficier de l'abattement de 20 % du revenu imposable.
Parce qu'il permet d'éviter des erreurs, le conseil de gestion est précieux. ' Quand je vois les heures que passent certains vignerons à choisir un enjambeur, j'aimerais qu'ils soient aussi exigeants dans le choix de leur conseiller de gestion , témoigne un banquier. La conjoncture interdit des erreurs de gestion ou de fiscalité. Si le conseiller ronronne, s'il n'est pas force de propositions, il faut savoir s'en séparer. '

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