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Impossible d'éviter les CVO

La vigne - n°155 - juin 2004 - page 0

Pour la Cour de cassation, une interprofession n'est pas une organisation qui relève de la liberté de réunion et d'association, consacrée par la Convention européenne des droits de l'homme. Selon elle, elle peut prélever des cotisations volontaires obligatoires.

Gageons que l'arrêt fera date ! Le 9 mars 2004, la Cour de cassation a mis un terme à un contentieux entre un producteur angevin et le Conseil interprofessionnel du vin d'Anjou et de Saumur (Civas), à propos du refus de paiement des cotisations réclamées par ce dernier. La procédure judiciaire a été longue.
Déjà en avril 1999, La Vigne avait rendu compte du jugement du tribunal et de ses motifs. A l'époque, les juges de première instance avaient accepté l'argumentation du viticulteur. Il faisait valoir que l'adhésion obligatoire au Civas était contraire à la liberté d'association, posée par l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme. En appel, le Civas avait obtenu gain de cause. Restait à savoir ce qu'allait juger la Cour de cassation... Les juges ont rappelé que l'on pouvait se référer, dans un premier temps, à la loi du 16 juillet 1952 qui a créé le Civas. Selon le code rural, commenté par les experts du droit, il s'agirait donc d'une association de la loi de 1901. Mais, comme le relèvent les juges, c'est sans compter la loi du 10 juillet 1975 sur les interprofessions, codifiée dans les articles L 632 et suivants du code rural. Ce texte reconnaît le Civas comme un organisme interprofessionnel, auquel l'adhésion peut être volontaire, mais étendue selon une procédure particulière à tous les producteurs.
Pour la cour d'appel, puis celle de cassation, ' le Civas, personne morale de droit privé, chargé d'assurer l'application et le contrôle effectif des décrets d'appellation d'origine, a été créé par la puissance publique qui a défini sa composition, son fonctionnement, ses objectifs, ses modes de financement '. Pour les juges, cette organisation lui confère une prérogative de puissance publique. De plus, comme le relèvent les magistrats, un commissaire du gouvernement siège et assiste à toutes les délibérations pour donner son acquiescement ou soumettre au ministre les questions soulevées. Ils en déduisent que le Civas ne constitue pas une association au sens de l'article 11 de la Convention européenne...
Le vigneron faisait aussi valoir une incompatibilité entre les cotisations et la taxe parafiscale qu'il devait déjà verser à son interprofession.

Son argumentation reposait sur l'idée que le Civas, personne morale de droit privé, ne pouvait pas percevoir des cotisations obligatoires de la part de professionnels, déjà soumis au prélèvement d'une taxe parafiscale. Selon le vigneron, il y avait un double prélèvement obligatoire non justifié. Pour la Cour, la réponse se trouve dans le décret du 25 mars 1977, aux termes duquel les ressources du Civas sont assurées notamment (et donc pas exclusivement) par une taxe parafiscale.
Par ailleurs, l'article L 632-6 du code rural, reprenant l'article 3 de la loi du 10 juillet 1975, décide que les organisations interprofessionnelles reconnues (c'est le cas du Civas) sont habilitées à prélever des cotisations qui ne sont pas des taxes parafiscales. Il est ajouté que les cotisations litigieuses ont été approuvées à l'unanimité des professions représentées au sein du Conseil et ont fait l'objet d'une demande d'extension. En conséquence, les juges en déduisent que les cotisations sont bien justifiées.
Le résultat de cette longue procédure est financièrement lourd pour le viticulteur qui en était l'objet. A l'origine, on lui réclamait des cotisations arriérées. Le tribunal les avait estimé dues, mais laissant la porte ouverte pour l'avenir à une contestation. A l'issue du procès, c'est pour l'avenir, comme pour le passé, qu'il devra les cotisations levées par l'organisme interprofessionnel reconnu. Nul ne sait ce que le procès aura coûté au producteur. N'aurait-il pas mieux fait de s'incliner ? Une chose est sûre : l'instance a permis de clarifier certaines particularités des interprofessions.

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