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Des oenologues recrutent des agronomes

La vigne - n°156 - juillet 2004 - page 0

En Alsace et dans le Midi, des oenologues embauchent des agronomes, afin qu'ils suivent les vignes toute l'année. Ils veulent régulariser la qualité des raisins et conduire les parcelles selon les objectifs fixés à la cave.

'Nous constatons une grande hétérogénéité entre les parcelles, pour un même cépage ', indique Stéphane Gresser, oenologue à Andlau (Bas-Rhin). Pour lui, on ne peut plus s'en contenter. ' Il y a une marge de progrès à explorer pour régulariser la qualité des raisins et améliorer l'expression des fruits. Ces progrès, nous les obtiendrons au niveau de la conduite de la vigne. Pour cela, nous avons besoin de spécialistes ', affirme-t-il.

Il a donc embauché un agronome ayant des connaissances en oenologie. ' Nous allons proposer un suivi, qui comportera plusieurs visites dans les vignes avant les vendanges, et un bilan complet durant l'hiver pour faire le lien entre la vigne et le vin . '
En Languedoc-Roussillon, ce type de prestation existe déjà depuis plusieurs années. La demande s'affirme. Les effectifs s'étoffent peu à peu. ' Nous avons embauché une agronome, puis deux, qui font surtout du conseil viticole et un peu de conseil oenologique. Et les prochains oenologues recrutés devront avoir des compétences en agronomie ', souligne Jean Natoli, dirigeant d'un laboratoire à Saint-Clément-la-Rivière (Hérault).
A l'ICV (Institut coopératif du vin), le département vigne et vin existe depuis 1999. ' Nous employons cinq ingénieurs, répartis sur l'arc méditerranéen. Dans nos activités, nous avons un volet de conseil aux entreprises coopératives ou indépendantes, un volet de formation, et un volet de recherche et développement. Ce dernier nous permet d'affiner nos connaissances sur les relations entre les caractéristiques des raisins et celles des vins ', explique Jacques Rousseau, responsable de ce département. Les formules proposées s'adaptent à la diversité des demandes. Elles vont de l'intervention ponctuelle destinée à résoudre un problème bien identifié, jusqu'au suivi de toutes les parcelles du domaine. Elles se démarquent du conseil agronomique classique, qui porte surtout sur la protection et la fertilisation du vignoble. Elles ciblent la conduite de la vigne, en relation avec l'oenologue qui conseille la cave. L'objectif final est d'obtenir des raisins aptes à produire le style de vins qui est souhaité.
Le coût du suivi varie de 1 000 à 3 000 euros/an, et dépend de la fréquence des visites. ' Chez certains clients, je passe toutes les semaines ; chez d'autres, une ou deux fois par mois. Je peux également venir à deux ou trois stades clés du cycle de la vigne pour affiner la nutrition, par exemple ', explique Stéphanie Prabonnaud, chez Natoli & Coe. Avec sa collègue Sylvie Courselle, elle conseille une vingtaine de domaines en Languedoc.

Chez Alfred et Annick Pérolari, exploitants sur 14 ha de vignes à Berlou (Hérault), c'est la première année que Stéphanie Prabonnaud intervient. ' Nous avons eu un gros problème d'oïdium en 2003, et nous voulons améliorer notre protection phytosanitaire ', explique Alfred. En ce début juin, Stéphanie Prabonnaud répond à ce besoin. Elle leur recommande de resserrer les cadences et de prévoir un poudrage de soufre sur le carignan. Sur certaines parcelles, pour faciliter la pénétration des traitements, elle ajoute qu'il faut ébourgeonner, alors que sur d'autres, ce n'est pas nécessaire. Mais ses conseils ne s'arrêtent pas là. Ils portent sur tous les aspects de la conduite de la vigne. Sur ce grenache qui a peu coulé, il faudra prévoir de tomber des grappes. Sur cette syrah, le relevage doit être fait rapidement.
Stéphanie Prabonnaud connaît le temps nécessaire aux travaux en vert. Elle les compare à la main-d'oeuvre disponible. Très vite, elle s'aperçoit que ses clients ne pourront pas tout faire. ' Elle nous aide à établir des priorités. Nous démarrons dans le métier. Nous devons aller à l'essentiel ', affirme Annick Pérolari.

Au-delà du conseil, l'agronome a un rôle de formation. ' Mon but est d'amener le vigneron à devenir plus autonome ', souligne Stéphanie Prabonnaud. Mais l'accompagnement peut aussi conserver un intérêt dans la durée. ' Quand j'ai repris le domaine en 2000, je n'avais pas de formation viticole. Je pensais avoir besoin d'un suivi pour quelques années seulement. Aujourd'hui, je n'envisage pas de m'en passer. Ce n'est pas à la cave de rattraper les erreurs de culture. Avant d'afficher des ambitions en matière de vins, il faut s'en donner les moyens au vignoble ', affirme Raymond Miquel, du domaine Barrubio, qui cultive 27 ha à Saint-Jean-de-Minervois (Hérault).
Il est suivi par Stéphanie Prabonnaud. ' En trois ans, elle m'a aidé à affiner la conduite de chaque parcelle et à construire une gamme cohérente. Elle connaît bien l'exploitation et, en même temps, elle a un regard extérieur qui m'aide à ne pas rester dans la routine ', souligne Raymond Miquel.



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