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archiveXML - 2004

Les juges peuvent requalifier la durée d'un contrat de travail

La vigne - n°156 - juillet 2004 - page 0

Une affaire récente confirme que les juges ont le pouvoir de requalifier un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Voici quelques règles à respecter pour éviter une telle mésaventure.

Dans le secteur agricole, l'embauche pour un temps limité est courante, du fait de l'activité saisonnière. Qui dit contrat à durée déterminée (ou CDD) suppose deux éléments juridiques : une durée précise et une tâche déterminée. Il s'agit là de règles générales, mais le code du travail a prévu deux exceptions propres à l'agriculture.
La première concerne l'embauche de saisonniers pour les vendanges. Elle est traitée par les articles L. 122-3, 18, 19 et 20 qui précisent le contour juridique d'un ' contrat-vendange '.
La seconde, prévue par l'article L. 122-1-1, concerne le ' remplacement d'un chef d'exploitation ou d'une entreprise que l'article 722-1 à 4 du code rural soumet à la MSA, également d'une aide familiale ou d'un associé d'exploitation ou du conjoint de l'exploitant, lorsque les uns ou les autres participent effectivement à l'activité de l'entreprise '. Dans ce cas de figure, il n'est pas nécessaire de déterminer la durée d'embauche : ce sera le temps du remplacement. Hors de ces deux spécificités, il est impératif de respecter les règles communes imposées par le droit du travail.
Les employeurs doivent rester vigilants sur ces points. En application de l'article L. 122-3-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée doit être passé par écrit, comportant les précisions imposées par cet article (date d'échéance du terme, désignation du poste, durée de la période d'essai éventuellement prévue). A défaut, le contrat sera à durée indéterminée, sans que l'employeur puisse rapporter la preuve d'un contrat verbal à durée déterminée (Cour de cassation, 21 mai 1996). Un arrêt bien plus récent de la Cour de cassation (21 janvier 2004, publié dans La Gazette du Palais du 3 mars 2004) confirme, une fois de plus, ce pouvoir des juges. Il rappelle que les tribunaux ne sont jamais liés par la qualification initialement donnée par les parties. Rendu, il est vrai, en matière industrielle, et dans le cadre d'emploi de travail temporaire (article L. 124-2-1 du code du travail), cet arrêt juge que les contrats avaient pour effet de ' pourvoir durablement à des emplois liés à l'activité normale et permanente de l'entreprise et qu'ils devaient donc être requalifiés en contrat de travail à durée indéterminée à dater de l'embauche '.

Pour que la validité du contrat de travail à durée déterminée en agriculture soit retenue et pour éviter qu'il ne soit requalifié, il est bon de rappeler quelques principes, et notamment ceux posés par un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18 e chambre, 23 mai 1989, société du domaine de Fouquet). Celle-ci a procédé à une requalification après avoir constaté que les contrats ne se rattachaient ' plus à l'exécution d'une tâche précise, mais à des tâches indifférenciées, les salariés assurant la totalité des travaux de l'exploitation agricole ' . De plus, les périodes d'interruption du travail correspondaient ' aux périodes d'inactivité normale dans l'agriculture '. Un salarié embauché pour la taille et qui continuerait, au service de l'employeur, d'oeuvrer pour le palissage ne serait plus dans un contrat à durée déterminée.
Notons, cependant, que le ministre a également précisé ( JO, Assemblée nationale du 9 janvier 1989 - I8I) que ' le travail saisonnier autorise la conclusion par l'employeur d'une clause de reconduction pour l'année suivante sur le même ouvrage ' .
Juridiquement, on le voit, le principe est qu'un contrat de travail est passé pour une durée indéterminée. Il faut donc rester précisément dans les règles (rédiger un écrit en bonne et due forme, prévoir une tâche bien précise et s'y conformer dans la réalité de l'emploi), pour ne pas tomber sous le coup d'une requalification. Dans le secteur agricole, les contrats à durée déterminée sont courants, car l'activité est fonction des saisons. Les pouvoirs publics ont donc prévu un formulaire spécifique : le Tesa (titre emploi saisonnier agricole). Il s'agit d'une simplification réservée à l'embauche des saisonniers.

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