Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 2004

Je vise la qualité, sans avoir de garanties

La vigne - n°158 - octobre 2004 - page 0

Anne Calmel adapte la conduite de ses vignes aux profils de vins recherchés par sa coopérative. Malgré des aléas climatiques, elle persévère pour progresser et donner à sa coopérative les moyens de se placer sur les marchés.

Au-delà du goût du métier, Anne Calmel a une endurance et une détermination indispensables pour garder le cap dans les moments difficiles. Sur son exploitation de 18 ha, la trésorerie est souvent tendue. Certains mois, il faut faire l'impasse sur les prélèvements privés. ' Pour l'instant, je dégage l'équivalent d'un Smic. Lors de mon installation en 1996, j'ai dû emprunter pour acheter les vignes de mes beaux-parents, qui étaient en métayage. Pour ne pas accroître l'endettement, je renouvelle le vignoble progressivement. Je produis encore 60 % de vins de table ', explique cette vigneronne adhérente de la cave coopérative de Puisserguier (Hérault).
En huit ans, elle a pu acheter ou replanter 5,2 ha de chardonnay, de viognier, de merlot, de cabernet-sauvignon, de grenache et de pinot noir. Ces parcelles produisent des vins de cépage. Anne Calmel y dégage un produit brut de 4 300 à 4 600 euros/ha. Mais il lui reste encore 12,8 ha de carignan et de cinsault, qui donnent des vins de table. Là, avec un rendement de 90 hl/ha, le produit brut plafonne à 3 200 euros/ha et la marge est réduite. ' Mais je ne peux pas les arracher trop vite, car j'ai besoin de conserver un chiffre d'affaires, le temps que les nouvelles plantations entrent en production ', souligne Anne.

Près de 80 % de son vignoble est palissé. Sur les nouvelles plantations, elle a installé deux paires de fils releveurs pour avoir une bonne surface foliaire. Elle taille court les parcelles destinées à produire des vins de cépage, ajustant le nombre d'yeux au potentiel qualitatif.
La coopérative classe les apports en lot 1, 2 et 3. ' Je cherche à me placer en lot 1 ou 2. Mais, à l'arrivée, c'est la nature qui décide. J'ai une parcelle de chardonnay qui passe en lot 1 un an sur cinq. Le botrytis y est difficile à contrôler. Cette année, il y avait des grappes attaquées et une charge excessive. Elle a été classée en lot 2 . '
Pour deux cépages, la coopérative distingue une catégorie haut de gamme, supérieure au lot 1. Sur une parcelle de merlot, Anne Calmel a pris des risques et s'est engagée dans cette démarche de haut de gamme. Elle réduit les rendements, visant 35 à 40 hl/ha. Elle ébourgeonne l'intérieur des souches et soigne la protection pour pouvoir récolter à la maturité optimale. ' En trois ans, cette vigne a été sélectionnée en haut de gamme une seule fois. La charge était à peine supérieure à l'objectif et, avec un éclaircissage léger, j'ai rectifié le tir. J'ai alors obtenu des raisins bien concentrés. Mais le climat joue parfois contre nous. En 2004, les pluies d'août ont fait gonfler les grappes, et le rendement risque de dépasser de 20 % les prévisions. ' Anne Calmel manque de temps. ' Je limite l'ébourgeonnage. Pour que l'éclaircissage donne des résultats, il doit être fait au bon moment. Mais je suis souvent débordée, et quand je ne peux pas intervenir, je m'abstiens. Quant à l'effeuillage, je n'en fait pas pour l'instant. '
Lorsque la classification espérée n'est pas atteinte, elle perd de l'argent, car elle a réduit ses rendements sans obtenir de meilleurs prix.
En chardonnay, l'acompte est de 106 euros/hl sur le lot 1, 92 euros sur le lot 2 et 68 euros sur le lot 3. Sur le merlot, il est de 125 euros/hl pour le haut de gamme, 73 euros/hl en lot 1, 61 euros en lot 2 et 53 euros en lot 3. Des bonus peuvent ensuite être attribués aux différentes cuvées, en fonction des résultats commerciaux obtenus.

' Dans les démarches de qualité, le résultat n'est pas garanti à l'avance. Certaines années, les efforts ne sont pas payés en retour. Mais je continue car, au niveau de la coopérative, nous avons besoin de progresser pour mieux nous placer sur les différents marchés. '
Avant de s'installer viticultrice, elle a commercialisé du vin. ' J'ai pu toucher du doigt qu'il est difficile de vendre plus cher. Pour améliorer nos marges, nous devons réduire nos coûts sur nos exploitations, mais également innover pour mieux répondre aux attentes des consommateurs. '

Ce constat pousse Anne Calmel vers de nouvelles voies. ' J'ai des terres maigres où le carignan a un potentiel intéressant. Je le taille court et je pousse la maturité. J'obtiens des raisins plus aromatiques, qui peuvent apporter un caractère méditerranéen aux vins de pays d'assemblage. '
La prochaine nouveauté sur son exploitation, ce sera l'appellation. ' Mon père sera à la retraite cet automne. Je vais reprendre ses vignes, qui bénéficient pour partie de l'AOC Saint-Chinian ', précise Anne. Ce vignoble, déjà bien réencépagé, devrait lui apporter une meilleure rentabilité, et donc plus d'assise financière pour accélérer les replantations.


L'EXPLOITATION EN DATES
1994 Reprise des vignes des beaux-parents
1996 Installation officielle
1997 Premières plantations de cépages améliorateurs
2001 Parcelle engagée en haut de gamme
2002 Lutte raisonnée et CTE
2004 A l'Automne, reprise des vignes des parents




Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :