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La bentonite cède de l'aluminium

La vigne - n°160 - décembre 2004 - page 0

La bentonite contient de l'aluminium. Elle peut en relarguer une faible proportion dans les vins. Les teneurs retrouvées dépendent du type et de la dose de bentonite apportée, et du vin.

Les produits oenologiques sont-ils sans risque ? Dans un contexte où la sécurité alimentaire est au coeur des préoccupations des consommateurs, la question mérite d'être posée. Au nom du principe de précaution, chercheurs, oenologues et vendeurs de produits se penchent sur le sujet. Ils s'intéressent, entre autres, à la bentonite. En 2001, la directive européenne 2001/30/CE a défini de nouvelles normes de pureté, afin d'homogénéiser la réglementation au sein de l'Union européenne. Elle a été traduite en droit français dans l'arrêté du 9 octobre 2001, relatif aux additifs pouvant être employés dans la fabrication des denrées destinées à l'alimentation humaine.
Concernant les teneurs en métaux lourds, elle impose un maximum de 2 mg/kg d'arsenic et de 20 mg/kg de plomb dans les bentonites. Certains lots de Volclay ne remplissaient plus ces critères. Cette bentonite n'est donc plus commercialisée. Actuellement, les interrogations portent sur l'aluminium. En tant qu'élément constitutif des bentonites, il est susceptible d'être relargué dans les vins. Pourquoi s'y intéresser ? En fait, il est soupçonné d'avoir un lien avec la maladie d'Alzheimer. Chez l'homme, la paroi intestinale constitue une barrière, mais une faible proportion d'aluminium peut être absorbée et passer dans le sang. Il semblerait que certains acides organiques, comme l'acide tartrique, citrique ou succinique, favorisent son absorption.

Dans cet esprit, Mary Kelly et Alain Blaise, de la faculté de pharmacie de Montpellier, en collaboration avec Martine Gilis, du laboratoire OEnoconseil du Languedoc-Roussillon, ont voulu voir l'effet du traitement à la bentonite sur la teneur en aluminium des vins blancs. Ils ont sélectionné trois vins : deux blancs secs et un vin doux naturel. Ils ont testé deux types de bentonites - une sodique et un mélange de sodique et calcique - à trois doses différentes : 30, 60 et 100 g/hl. Ils ont aussi évalué l'effet de l'acidification et de la désacidification.
Les bentonites étudiées relarguent bien de l'aluminium dans les vins, à des valeurs comprises entre 100 µg/l et 800 µg/l, selon le type et la dose de bentonite. C'est la sodique qui en a relargué le plus. La différence est d'autant plus importante que la dose de bentonite est basse. Le collage à 30 g/hl avec la bentonite sodique cède quatre fois plus d'aluminium que le collage avec le mélange. A 100 g/hl, elle apporte 80 % d'aluminium en plus. Les chercheurs expliquent ce phénomène par la structure des bentonites.
Autre constat : l'un des vins blancs secs a extrait plus d'aluminium que les deux autres vins. Or, ce vin avait une teneur en fer plus basse. L'hypothèse serait que comme il y a moins de fer, cela laisse l'acide citrique plus libre pour complexer l'aluminium.

L'acidification à l'acide tartrique aurait tendance à augmenter l'extraction de l'aluminium. Mais, là encore, tout dépend de la dose de bentonite et du type de vin. Ainsi, après un collage aux doses de 30 g/hl ou 60 g/hl de bentonite sodique, la teneur finale en aluminium est inférieure dans le vin acidifié. En revanche, après un traitement à 100 g/hl, elle est supérieure dans le vin acidifié. Dans le cas du collage au mélange de bentonite, on constate sur l'un des vins blancs, une augmentation systématique de la teneur en aluminium. Sur l'autre vin blanc, il n'y a pas d'augmentation de la teneur en aluminium, sauf après l'ajout de 100 g/hl. Quant à la désacidification, elle a tendance à diminuer l'extraction de l'aluminium.
Soyons rassurés : à ce jour, rien ne permet d'affirmer qu'il y a un risque pour la santé. Pour cela, il faudrait faire des études de biodisponibilité, afin de savoir quel pourcentage d'aluminium dans les vins est absorbé par l'organisme. De plus, les teneurs retrouvées sont faibles par rapport à la norme pour la consommation maximale d'aluminium, fixée par l'Organisation mondiale de la santé : 7 mg/kg de poids corporel par semaine. Pour un adulte de 60 kg, cela correspond à 60 mg par jour. Or, en France, la consommation moyenne est d'environ 5 mg/jour.

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