Les vignerons du canton de Sigean (Aude) se sont retrouvés dans un chai souterrain le 16 janvier, pour fêter la Saint-Vincent. Un moment chaleureux, bienvenu dans ces temps difficiles.
Depuis treize ans, les vignerons de Peyriac-de-Mer, Portel-des-Corbières et Sigean, trois communes des Corbières maritimes, fêtent la Saint-Vincent. Les premières célébrations ont eu lieu à Peyriac, à l'initiative d'une association créée au sein de la coopérative Les caves Rocbère. ' Au début, les habitants du village ont été surpris de nous voir défiler dans les rues. Mais au fil des années, un consensus s'est fait autour de cette manifestation, qui attire de plus en plus de monde ', raconte Monique Boudousq, première présidente de l'association dénommée Saint-Vincent.
En 1995, la coopérative aménage une ancienne mine de gypse pour y créer Terra Vinea, un chai d'élevage assorti d'un musée. La célébration se déplace alors dans ce nouveau lieu. Nous sommes dimanche 16 janvier. En cette matinée, après avoir fait le tour du village de Portel-des-Corbières, la procession arrive à l'entrée du chai. Les cavaliers ouvrent le cortège, suivi par une calèche accompagnée d'une troupe d'enfants en costume languedocien. Ils portent des bouquets de fleurs de la garrigue et des petits fagots de sarments. Puis viennent les vignerons avec, sur leurs épaules, une statue de saint Vincent, un tonneau rempli de vin et les trois outils symboliques du métier : la serpette, la hotte et le pressoir. Derrière eux marchent la fanfare, les confréries et les représentants des douze terroirs de l'appellation Corbières.
La procession emprunte la galerie qui descend dans l'ancienne mine. A l'arrivée, près d'un millier de personnes se retrouvent rassemblées dans la grande salle creusée dans le gypse, à 80 m sous terre. Alain Planet, le nouvel évêque de Carcassonne, est venu célébrer la messe. L'odeur des vins en cours d'élevage flotte dans l'air. La température est douce. Les premiers mimosas ornent l'autel. En cette période difficile, Alain Planet souligne la nécessité de ne pas céder à la tentation du chacun pour soi, de préserver la fraternité, la solidarité et l'esprit d'assistance mutuelle. Il bénit ensuite le vin contenu dans le tonneau, qui sera utilisé pour la célébration de la messe. A la fin de la cérémonie, l'abbé André Vergnes invite avec humour l'assemblée à revenir aux nourritures et aux boissons terrestres, qui les attendent un peu plus loin dans les galeries de l'ancienne mine.
Les participants savourent ensuite longuement autour d'un verre de corbières le plaisir de se rencontrer et d'échanger des nouvelles des uns et des autres, avant de rejoindre la salle des fêtes où aura lieu le repas. ' Dans nos villages, il y a trente ans, nous nous retrouvions au café le soir. Aujourd'hui, chacun reste devant sa télévision. Nous avons besoin de moments comme çà pour maintenir des liens ', souligne Christine Rolland, une viticultrice qui a repris le flambeau de l'association Saint-Vincent.