Retour

imprimer l'article Imprimer

archiveXML - 2005

La distillation de crise est ouverte aux AOC

La vigne - n°165 - mai 2005 - page 0

La France a obtenu de la Commission européenne l'ouverture d'une distillation de crise destinée à ses vins d'appellation tranquilles, pour 1,5 million d'hectolitres à 3,35 euros/°hl.

C'est une première pour la France. Le 28 avril, la Commission européenne a autorisé l'ouverture d'une distillation de crise pour nos vins d'appellation. La mesure, défendue par le ministre de l'Agriculture Dominique Bussereau, concerne 1,5 million d'hectolitres (la profession avait demandé 2 Mhl) au prix de 3,35 euros/°hl. La publication du règlement communautaire est attendue pour le 20 mai. Cette mesure de crise est réservée aux producteurs, mais elle est ouverte à toutes les appellations. Dans leur ensemble, les représentants professionnels saluent la performance ministérielle. D'aucuns font valoir que le contexte politique européen a dû jouer en sa faveur : ' A l'approche du référendum sur la constitution et par crainte d'une montée du non dans l'Hexagone, on peut penser que la Commission européenne a préféré caresser la France dans le sens du poil ', remarque un haut responsable. La bonification obtenue rassure les organisations professionnelles sur les chances de succès de la distillation.
' A moins de 2euros/°hl, aucun producteur d'appellation n'aurait été intéressé ', affirme Christian Paly, président de la Confédération nationale des AOC (Cnaoc), et d'ajouter : ' J'espère qu'avec 3,35 euros/°hl, ils vont franchir le pas. '
La Confédération des coopératives vinicoles de France est aussi satisfaite du prix obtenu, mais fait remarquer que l'Espagne a bénéficié ' d'une enveloppe budgétaire bien supérieure ' (voir la brève ci-contre). Elle fait aussi valoir que ' dans le secteur des vins de table et de pays, la situation s'est dégradée ' et qu'il faudra donc ' là aussi, rester vigilant '. Pour Xavier de Volontat, président des Vignerons indépendants : ' A l'avenir, il faudra produire ce que l'on sait vendre. ' On peut penser que Bruxelles a pris quelques assurances sur le sujet...

' En contrepartie de cette aide structurelle exceptionnelle, la Commission européenne a demandé aux régions qui vont distiller de prévoir des mesures structurelles ', affirme un responsable national. Outre l'arrêt de toutes plantations nouvelles et la réduction des rendements, cela signifie des arrachages à venir. Bordeaux a déjà chiffré son objectif à 10 000 ha. Dans le Beaujolais, on parle de 2 000 à 3 000 ha. Les Côtes du Rhône viennent de mettre le sujet à l'ordre du jour. Les premières estimations vont de 1 000 à 2 000 ha à supprimer.
Sans plus attendre, ces trois régions ont un autre défi à relever : elles doivent inciter les viticulteurs à distiller les volumes en trop. ' Cette mesure conjoncturelle est un fusil à un coup. Nous n'aurons pas de deuxième chance. J'espère que les trois vignobles qui l'ont appelée de leurs voeux vont désormais jouer le jeu ', déclare Xavier de Volontat.
Face à la nécessité de faire le ménage dans les chais pour alléger les marchés, les régions réfléchissent à des mesures complémentaires pour rendre la distillation la plus attractive. Bordeaux souhaite majorer la prime communautaire d'un supplément de solidarité. ' Celui-ci serait versé par ceux qui ont des marchés et qui souhaitent donc débloquer leurs vins mis en réserve en 2004 ', explique Roland Feredj, directeur de l'interprofession.

A Bordeaux, tout le monde semble d'accord sur le principe de cette taxation de solidarité. Reste à en définir le montant. ' Compte tenu du niveau de la prime accordé à Bruxelles, je pense qu'un complément de 25 euros/hl serait un bon compromis. Cela permettrait une rémunération honorable de la distillation, sans trop peser sur ceux qui veulent racheter leur réserve pour vendre ', déclare Xavier Carreau, président de la Fédération des grands vins de Bordeaux. Et de calculer : ' Le tonneau de bordeaux générique envoyé à la distillerie serait rémunéré 587 euros, alors qu'il s'échange sur le marché du vrac dans une fourchette de 800 à 1 300 euros . '
Dans les Côtes du Rhône, l'interprofession compte réserver ses aides aux relogements des vins, aux viticulteurs qui distillent. Elle envisage aussi de leur concéder une avance de trésorerie. Christian Paly, vice-président d'Inter-Rhône, explique : ' Nous voulons créer un pool avec les banques. Celles-ci accorderaient des facilités de caisses pour la période comprise entre l'enlèvement des lots à distiller et le paiement par le distillateur. Les intérêts de ces emprunts à très court terme pourraient être pris en charge par l'interprofession . '
Dans le Beaujolais, on souhaite que les aides aux viticulteurs en difficulté (voir article ci-après) soient réservées en priorité à ceux qui distilleront.



Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :