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Des dérivés de la levure amélior ent les vins

La vigne - n°166 - juin 2005 - page 0

Depuis plusieurs années, chercheurs et fabricants étudient les produits de dégradation de la levure et leurs propriétés. Leurs travaux ont abouti à la création d'une nouvelle génération de produits oenologiques qui protègent les vins de l'oxydation, éliminent des tanins ou apportent de la rondeur.

Lorsque la levure se dégrade par autolyse, elle libère de nombreux composés. Certains d'entre eux ont des effets intéressants sur la structure et l'expression du vin. On exploite traditionnellement leurs propriétés lors de l'élevage sur lies. Mais cette pratique, longue, coûteuse et difficile à maîtriser, comporte des risques. Les fabricants de produits oenologiques cherchent donc le moyen de s'en passer. Ils proposent des produits de dégradation de la levure, contenant les mêmes substances que celles libérées lors de l'élevage sur lies. En laboratoire, il est possible de mimer l'autolyse. On fait subir un traitement (thermique, chimique ou enzymatique) à une levure vivante pour obtenir une levure inactivée, c'est-à-dire morte. Ensuite, on vide la cellule de son contenu. On obtient alors d'une part l'enveloppe cellulaire ou l'écorce et, d'autre part l'autolysat. Aujourd'hui, on commercialise uniquement des écorces ou des produits constitués d'enveloppe et de contenu cellulaire de levures, mais jamais d'autolysat seul.
Les écorces, utilisées pour prévenir les arrêts de fermentation alcoolique, sont constituées de polysaccharides, dont la plupart sont des mannoprotéines. Elles ont un effet sur le volume en bouche. Elles fixent des molécules volatiles, ce qui augmente la persistance aromatique. Elles améliorent la qualité et la tenue de la mousse des effervescents.

Le contenu cellulaire est constitué de peptides, d'acides aminés, de nucléotides et de nucléosides. On connaît un peptide très réducteur, c'est le glutathion. Ce dernier protège le vin du brunissement et freine l'oxydation d'arômes fragiles comme les thiols. Sa présence dans certains nouveaux dérivés de levure explique, en partie, leurs propriétés antioxydantes.
En Champagne, la maison Moët & Chandon a montré que certains composés peptidiques ont des goûts sucrés, d'autres acides. Plus récemment, à la faculté d'oenologie de Bordeaux, Anne Humbert a réalisé une thèse avec l'appui de Laffort oenologie et Sarco. A cette occasion, elle a découvert que des fractions de petits peptides ont un caractère sucré. Ces composés ont été isolés, concentrés, puis ajoutés à différents vins. Dans un vin rouge, leur présence se traduit par une plus grande sensation de rondeur. Dans les blancs, ils atténuent la sensation d'acidité. Par ailleurs, les nucléotides sont fréquemment utilisés en agroalimentaire comme exhausteurs de goût.
Forts de ces découvertes, les fabricants proposent de nouveaux produits oenologiques, ayant des incidences sur le vin. Ils succèdent à une première génération de dérivés de levure qui était commercialisée uniquement comme activateur ou régulateur de fermentation.
Biolees (34 euros/kg, soit 1,36 euros/hl pour une dose de 40 g/hl), le dernier-né de la société Laffort oenologie, est positionné comme un auxiliaire d'élevage. Il apporte des peptides pourvus d'un effet édulcorant et des écorces qui adsorbent les tanins. Il agit donc directement et indirectement sur le profil du vin. Les fractions amères et astringentes précipitent et sont éliminées lors d'un soutirage, comme par collage.

Après dix années de recherche, notamment avec l'institut Jules Guyot de Dijon, OEnofrance a mis au point la gamme Genesis. Genesis Fresh (0,75 à 1,33 euros/hl) est un activateur de fermentation, riche en polysaccharides et peptides aux propriétés réductrices. ' Rendus biodisponibles, ces peptides préviennent le brunissement des vins blancs et rosés tout en préservant la fraîcheur de leurs arômes ', indique-t-on. Ce produit contient aussi de la cellulose qui permet de raccourcir la phase de latence avant fermentation, un autre moyen de préserver les arômes primaires de l'oxydation. Autre nouveauté, Genesis Lift, préparation à base d'écorces (entre 0,30 et 2,50 euros/hl selon le type de vin et la dose employée) élimine les acides gras toxiques pour les levures, en apportant rondeur et souplesse aux vins rouges, rosés et blancs. Il y a un effet collage du vin.

Lallemand, avec l'Inra de Montpellier, a mis au point Optired (0,55 à 0,90 euros/hl) et Optiwhite (0,50 à 1 euros/hl). Le premier, par une libération accrue de polysaccharides dès le début de la fermentation, favorise la stabilisation des complexes tanins-anthocyanes. Les vins présentent alors une couleur plus soutenue et plus stable au cours du vieillissement. De plus, l'interaction entre les polysaccharides et les tanins conduit à une diminution de l'astringence, à un vin plus rond. Le deuxième, par sa richesse en polysaccharides, augmente le volume en bouche. Il est aussi doté de propriétés antioxydantes, protégeant la couleur et les arômes du moût et du vin.
Quant à Spindal, il a sorti la gamme Bâtonnage plus début 2000 (25 à 35 euros/kg, à 40 g/hl cela coûte entre 1 et 1,40 euros/hl). Elle comprend deux produits. Le 150 KD, riche en polysaccharides de 150 Kdalton, a surtout un effet volume. Le 20KD, riche en composés azotés, a davantage une action antioxydante. ' On le conseille sur un blanc ou un rosé, sensible à l'oxydation, surtout si l'acidité est faible ', annonce Walter Mulinazzi. D'après lui, ces produits remplacent un élevage sur lies, en évitant les risques de réduction ou de montée en acidité volatile.



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