Selon l'Inra de Montpellier, le raisin commence à être mûr lorsqu'il n'entre plus de sucre dans les baies. La société Sféris a développé un appareil pour déterminer ce moment. On peut fixer la date de vendange en fonction du style de vin recherché.
Classiquement, la maturité s'apprécie par le suivi du degré potentiel. Toutefois, ces mesures ne mettent pas toujours en évidence un blocage de la maturation dû à une sécheresse. En effet, dans ce cas, le flétrissement des baies engendre une hausse du degré potentiel. On a l'impression que la maturation se poursuit. Mais il s'agit d'un phénomène de concentration, et non d'une augmentation du poids de sucre par baies.
Alain Deloire, professeur de viticulture à l'Agro-Inra de Montpellier, s'est intéressé à un autre paramètre : le chargement actif en sucre des baies, c'est-à-dire la quantité de sucre qui y entre. Pendant trois ans, une fois par semaine, à partir de la véraison, en collaboration avec la société Sféris (Montpellier), il a réalisé des mesures de poids, de volume et de densité de baies d'une quinzaine de cépages dans une cinquantaine de terroirs en France et en Afrique du Sud.
Grâce à ces mesures, Alain Deloire s'est aperçu que le chargement en sucre passe par trois phases. La première est l'accumulation. Elle consiste en une entrée massive de sucre dans les baies, modulée par le microclimat des grappes. Les baies surexposées au soleil accumulent moins de sucre que celles à l'ombre. Autre constat : la quantité de sucre qui entre dans une baie n'est pas toujours liée à son volume.
Au bout de quelques semaines, cette quantité atteint un plateau : la baie arrête d'accumuler des sucres. La date et la valeur du plateau sont très liées au cépage et à l'environnement de la parcelle. Par exemple, à contrainte hydrique identique, le grenache noir accumule plus de sucre que la syrah.
Le centre ARC-Infruitech, à Stellenbosch (Afrique du Sud), a réalisé tous les cinq jours des microvinifications de syrah. Au départ, la vendange titrait 10° et 15°, lors du dernier prélèvement. Les dégustations ont montré que les vins deviennent qualitatifs au moment où l'accumulation de sucre atteint son plateau. ' A partir de là, on peut considérer que la maturation est terminée et que la maturité commence. Les tanins vont s'assouplir. Le vigneron doit commencer à déguster les baies pour définir la date de vendange en fonction du style de vin souhaité ', expose Alain Deloire. S'il désire élaborer un vin rosé ou un blanc, mieux vaut récolter un peu avant le plateau. S'il veut élaborer un rouge fruité, il va attendre le milieu du plateau. S'il veut un rouge plus corsé, il va attendre la fin du plateau.
Parfois, les baies n'atteignent jamais ce plateau. C'est le cas des parcelles en situation de forte sécheresse. Le chargement en sucre peine : la maturité est bloquée. A l'inverse, dans les vignes très vigoureuses, les baies ne cessent d'accumuler les sucres. Elles se retrouvent alors dans une situation de sous-maturité des polyphénols.
La dernière phase se caractérise par une perte en sucre. En quelques jours, la quantité par baie peut passer de 230 à 200 mg. Les scientifiques n'expliquent pas encore ce phénomène.
A partir de ces travaux, Sféris a développé Dyostem. Cet appareil mesure le volume et la couleur des baies, et l'hétérogénéité de ces deux paramètres. La mesure du volume permet d'apprécier un éventuel flétrissement. Celle de l'hétérogénéité facilite les sélections parcellaires et le pilotage de la vinification.
Combinées à des mesures de titre alcoométrique probable, ces données permettent de déterminer la date de l'arrêt en chargement en sucre pour chaque cépage. Après avoir établi un référentiel, le vigneron peut définir la maturité optimale de sa parcelle en fonction du style de vin recherché. Dyostem est vendu à partir de 10 000 euros HT. Sféris en a déjà commercialisé une dizaine cette année.