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archiveXML - 2005

La désinfection des sols, des chantiers très encadrés

La vigne - n°169 - octobre 2005 - page 0

Analyses de nématodes ou test Elisa, déclaration des parcelles où ont lieu les traitements : les vignerons doivent montrer patte blanche pour désinfecter leurs vignes. Les applications sont sécurisées.

Les produits de désinfection des sols permettant de lutter contre le court-noué et/ou le pourridié sont très toxiques. Le Témik 10 G (aldicarbe), de Bayer Crop-Science, est interdit à la vente depuis le 31 décembre 2003 pour la majorité des cultures. Mais en vigne, il a obtenu une dérogation jusqu'à fin 2007. Son utilisation est étroitement encadrée. Sauf en cas de symptômes flagrants, pour justifier du traitement, Bayer conseille de faire un test Elisa ou une analyse de terre pour vérifier la présence des nématodes, vecteur du court-noué. La firme réalise gratuitement cette prestation.
Ensuite, le vigneron doit contacter son distributeur. Ensemble, ils remplissent une fiche de demande d'autorisation d'application. Ils renseignent le numéro cadastral de la parcelle, sa situation, le type de sol, s'il y a la présence d'un point d'eau à moins de 50 m, la surface approximative à traiter... Ils transmettent ce document à la firme. Cette dernière contrôle la situation de la parcelle grâce à la cartographie. En l'absence de doute, elle autorise le traitement. Sinon, un technicien se rend sur place et donne ou non son accord. En cas de refus, il n'y aura pas de désinfection au Témik. Dans le cas contraire, Bayer transmet son accord au distributeur avec les coordonnées d'un applicateur agréé. Le distributeur reçoit le produit et, avec le vigneron, il prend rendez-vous avec l'applicateur. Ce dernier va alors réaliser la désinfection, en vérifiant au préalable qu'il n'y a pas de risque de pollution des eaux. Il remplit ensuite une fiche d'application en indiquant les surfaces traitées, la quantité de produit utilisé...

Cette année, Bayer a amélioré le dispositif en lançant Ultima, des conteneurs qui empêchent tout contact avec les granulés. Après le traitement, le distributeur récupère ces bidons qui seront recyclés. Malgré toutes ces complications, beaucoup de vignerons privilégient le Témik. ' Il est souple d'emploi. Le vigneron peut replanter quelques jours après la désinfection, alors que pour les fumigants, il faut laisser reposer le sol pendant plusieurs semaines ', pose Jean-Paul Raoux, de Charrière distribution. ' Avec la démarche mise en place par Bayer, les personnes se sentent en sécurité ', complète Christian Imbs, de la CAPL. Quant à la procédure, selon les distributeurs elle est assez rapide : il faut compter un délai d'un mois entre la demande et l'autorisation.
Frédéric Gaucher, vigneron à Béziers (Hérault), possède 17 ha. Il a désinfecté cette année en mars 1 ha avec Témik. ' En automne, j'avais opté pour Télone, car ce produit est moins cher. Mais mon fournisseur a tardé à livrer le produit. Après, il était trop tard pour l'appliquer, car la température du sol n'était plus suffisante. Pour le Témik, c'est mon distributeur qui s'est occupé des démarches, cela n'a pas été trop contraignant. Ce produit permet une plus grande souplesse pour l'organisation des chantiers, il n'y a pas de souci de température. J'en ai eu pour 3 000 euros/ha ', témoigne Frédéric Gaucher.

Effectivement, le dichloropropène (Télone 2000, Dorlone 2000, de Dow Agro- Sciences, et DD 92, de Certis) est plus délicat à appliquer. Principale contrainte : le traitement doit s'effectuer trois mois avant la plantation, à une température du sol à 20 cm de profondeur comprise entre 12 et 16°C. Là aussi, il faut passer par un entrepreneur agréé. A l'instar de Bayer, Dow AgroScience recommande d'évaluer au préalable le potentiel infectieux de la parcelle par un test Elisa ou une analyse nématologique.
Hugues Meffre, vigneron à Violes (Vaucluse), possède 100 ha. Dans le cadre du renouvellement de son vignoble, il désinfecte environ 5 ha chaque année. Il le fait avec du Télone, pour un coût total d'environ 2 500 euros/ha. ' Mon choix s'est fait par rapport au prix de revient. Quand j'ai commencé la désinfection, il y a vingt-cinq ans, l'écart allait du simple au double entre le Témik et le Télone. Actuellement, il n'est plus que de 10 % en faveur du fumigant ', explique Hugues Meffre. Il ne fait pas d'analyses, car les symptômes de court-noué sont bien visibles. Côté organisation, il prévient l'applicateur un an à l'avance. Pour déterminer le bon moment, il fait des suivis de la température du sol avec un thermomètre. Dès qu'il voit qu'elle approche des 15° C, il contacte l'applicateur. Avant la fumigation, il passe un griffon à 40 cm pour faciliter la diffusion du produit. Après l'application, il passe un rouleau pour recompacter le sol en surface et limiter la perte de produit. Quinze jours avant la plantation, il repasse un griffon pour permettre l'évaporation du produit au cas où il en resterait. Autre fumigant : l'Esaco, de Cerexagri, à base de métham-sodium. Il est homologué contre le court- noué, mais sa principale utilisation se fait dans le cadre de la lutte contre le pourridié. L'utilisation de ce produit n'est pas soumise à un encadrement particulier.
La firme demande aux distributeurs de remplir une fiche présentant les parcelles (type de sol, topographie), et les conditions d'application, pour évaluer les risques environnementaux.
Bertrand Vigouroux, vigneron à Cahors (Lot),possède 60 ha. Il a utilisé Esaco sur 12 ha contre le pourridié. Dans ce but, il s'est équipé d'un appareil spécifique, équipé de coutres.

Les dernières applications d'Esaco remontent à quatre-cinq ans. Il réalisait les traitements en septembre. Trois semaines à un mois après, il semait de l'orge. Il observait le résultat en mars. ' Après la désinfection, le produit relargue de l'azote. L'orge permet de voir s'il a bien été positionné. Lorsque l'opération est efficace, l'orge pousse très vite. ' Le pourridié n'est plus un problème.
Citons aussi l'Enzone, d'Arysta LifeScience (ex Calliope), homologué uniquement contre le pourridié. De l'avis des distributeurs, il est encore plus compliqué à appliquer car, pour être efficace, il doit réagir avec l'eau. Il nécessite un équipement spécifique. Là encore, il faut passer par un entrepreneur agréé. La SCEA Foncaude, à Cazoules-les-Béziers (Hérault), l'a fait appliquer en mai 2005 sur une parcelle de 25 ares. Renseignements pris auprès de son distributeur, elle a dû faire une demande écrite un mois et demi avant. Le traitement en lui-même s'est fait dans de bonnes conditions. Rendez-vous dans quelques années pour juger de son efficacité.

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