ImprimerLe château de la Guipière a arraché 3,30 ha en 2003. L'exploitation s'est ainsi concentrée sur ses parcelles les plus qualitatives et a pu se passer de salarié.
Le château de la Guipière, à Vallet (Loire-Atlantique), s'étend sur 25 ha. Joël Charpentier et son frère, installés en Gaec, y produisent des AOC Muscadet Sèvre-et-Maine sur lie, et des VDQS Gros Plant du Pays Nantais sur lie. Il y a trois ans, l'exploitation comptait 4,80 ha de plus. Entre temps, les Charpentier ont arraché une partie de leurs vignes, et rendu une parcelle qu'ils avaient en fermage. ' Cela faisait un an que notre salarié nous avait quittés , expose Joël Charpentier. Avant de songer à arracher, nous avons essayé de le remplacer, mais les deux personnes qui ont pris sa place ne se sont pas plu. Avec mon frère, nous avions trop de travail. Nous avons tenté de vendre l'une de nos parcelles qui fait 3,30 ha. Nous avons mis une annonce à la Safer et chez un notaire, mais en vain. C'est alors que nous avons pensé à l'arrachage. '
A partir du moment où ils ont envisagé d'arracher, les Charpentier se sont rapidement décidés. Ils n'ont pas hésité sur la parcelle. Ils ont choisi la moins qualitative. ' Elle est située dans une cuvette sur un terrain hydromorphe, décrit Joël Charpentier. Les vins qu'on y élaborait étaient précoces, manquaient de corps. En plus, nous avions acheté cette parcelle récemment. Tout le reste de la propriété est d'un seul tenant. Cette parcelle ne faisait pas partie du même îlot. '
Pour conforter son choix, Joël Charpentier a rencontré un ingénieur de l'Inao. Ce dernier lui a confirmé que la parcelle était moins qualitative que les autres et que, dans le cadre de la redélimitation de l'aire, elle allait faire l'objet d'un déclassement en Muscadet générique. Les Charpentier ont ensuite vérifié qu'ils étaient éligibles à la prime européenne. Le dossier a été réalisé en décembre 2002 et ils ont arraché début juin 2003. Ils n'ont pas pu toucher l'abondement du conseil régional, n'étant pas en cessation d'activité.
Parallèlement à cet arrachage, ils ont cessé de louer une parcelle d'1,5 ha. Avec presque 5 ha de moins, les Charpentier arrivent à se passer de salarié, même si le travail est lourd à deux, comme le souligne Joël Charpentier : ' Si l'économie générale du Muscadet se portait mieux, nous prendrions un salarié. '
L'arrachage a procuré un peu de trésorerie à l'exploitation et permet des économies : ' Nous devons dépenser 15 000 euros de moins, car le vin issu de ce terroir était vendu en vrac au négoce. Il n'était pas bien valorisé. Et comme nous avons un salarié en moins, le calcul est vite fait ... '
De plus, l'arrachage leur permet de s'organiser différemment et de gagner du temps. ' Avant, quand mon frère traitait, il ne pouvait pas le faire dans la journée . Il devait finir la parcelle le lendemain. A présent, il fait tout dans la foulée. ' Les viticulteurs n'ont pas eu de problème avec leurs voisins. ' Certains ont juste dit que nous arrachions pour vendre en constructible. Mais ce n'est pas allé plus loin ', affirme Joël Charpentier. Ils se servent un peu de l'arrachage dans leur discours commercial, mais c'est un argument à double tranchant : ' Nous n'en parlons pas trop, car on risque de nous répondre que nous avions donc une mauvaise parcelle avant. ' L'arrachage ne change pas fondamentalement les choses au niveau commercial : les vins vendus au négoce ne sont pas achetés plus cher. L'exploitation a juste moins de vin à écouler par ce circuit.
Quand ils font le bilan, Joël Charpentier et son frère ne regrettent pas d'avoir arraché. Ils pensent même que tous les viticulteurs du Muscadet devraient en faire autant sur 10 % de leur surface.
