La Vigne a 15 ans. Nous célébrons cet événement avec un numéro exceptionnel. Dans les pages suivantes, quarante vignerons, oenologues, négociants et techniciens témoignent de l'un des bouleversements qui se sont produits pendant cette période.
En quinze ans, que de changements ! S'il fallait en résumer la conséquence, beaucoup diraient : ' Nous n'avons plus le droit à l'erreur. ' Fini l'époque des approximations dans la culture de la vigne, de la vinification ou de l'élevage du vin. Fini le temps où l'on pouvait dépenser sans compter. A l'étranger, plus aucun opérateur n'attend la France comme s'il n'existait qu'elle. Le premier numéro de La Vigne paraissait en février 1990. En couverture, nous annoncions : ' Cotisations sociales, vos revenus éraflés '. Sur sept pages, nous mesurions l'impact du nouveau mode de calcul des cotisations MSA. Quinze ans plus tard, aucun vigneron n'a oublié cette coûteuse réforme. Beaucoup la considèrent toujours comme une injustice puisqu'ils cotisent sur leur capital. Cependant, un bouleversement bien plus profond était en germe : l'émergence du Nouveau Monde et de ses vins nets et réguliers, conçus au goût des consommateurs comme tous les produits alimentaires issus de l'industrie. Les winemakers anglo-saxons se mettaient à appliquer à la lettre l'enseignement des écoles françaises. Ils partaient à l'assaut des marchés. Ils avaient des budgets de promotion suffisamment alléchants pour inciter les détaillants à miser sur leurs vins. Ils avaient une solide foi dans le progrès, quand nous ne trouvions rien de plus abouti que de critiquer cette notion. Ils misaient sur les cépages. Une mode passagère ! raillait-on du haut de nos appellations. Elle n'allait même pas effleurer nos terroirs. Ce fut une grave erreur de jugement dont nous payons le prix. Mais La Vigne n'a pas voulu en rester là et se contenter de ressasser les échecs et les ratés. Nombreux sont ceux d'entre vous qui ont intégré les changements, les faits ou les connaissances nouvelles de ces quinze dernières années. Ils ont su résister à la pression du Nouveau Monde, établir des rapports plus profitables entre les producteurs et les négociants, exploiter les connaissances ou les technologies les plus modernes. Ils témoignent dans votre revue que la viticulture française est prête à affronter l'avenir.